Le Théâtre du Rond-Point propose en ce moment une pièce étonnante, dont le titre Hetero semble une provocation compte tenu des débats passionnés autour de l'homosexualité.
Il n'en est rien. Le sujet concerne la question de la place dévolue aux femmes et aux hommes, mais surtout aux femmes.
Avoir choisi de faire interpréter le texte uniquement par des hommes permet de neutraliser les différences. Le monde devient unisexe mais les rapports de force instaurés par la tradition sont maintenus, avec une violence qui éclate très vite. Et la question de la distribution des rôles au sein du couple et de la société est révélée avec davantage d'acuité. On continuera longtemps de réclamer les mêmes droits et les même devoirs ...
Les personnages sont en quelque sorte masqués derrière un maquillage blanc qui les présente comme ces clowns blancs dont la drôlerie provient de leur rapport à l'autorité, contrairement aux autres clowns qui font rire avec leurs bêtises. On pense aussi au théâtre No, ce qui donne une touche ancestrale.
Vous aurez compris combien ce spectacle peut s'avérer en fait très subversif. Surtout quand l'un des personnages réclame à l'autre : Montre-toi sous ton vrai visage ! La vie est un combat. Comme le souligne le fils : ce que je n'irai pas chercher ne me sera pas donné.
Les détracteurs estiment assister à un long délayage qui ne leur apprend rien, que les dialogues s'enchainent sans surprise et que le sujet s'épuise. Ils se défendent sans doute de regarder en face une vérité très dérangeante.
Denis Lachaud traite les rapports de domination, de dominé-dominant, en se moquant de la démonstration de la toute-puissance et du pouvoir, notamment dans les rapports de couple entre l'homme et la femme. C'est magistral. S'il y a un point cependant sur lequel je ne suis pas d'accord avec lui c'est qu'au final nous assistons davantage à une tragédie qu'à une comédie parce que son second degré évoque cruellement le premier degré dans lequel se débattent bien des couples.
Les stéréotypes sont immuables. Que ce soit entre employeur et employé ou entre mari et femme. La mise en scène de Thomas Condemine, un ancien de l’École du Théâtre national de Strasbourg (promotion 2007) est assez inventive. Le décor, lui aussi en noir et blanc, est intentionnellement composé de panneaux raccordés entre eux par des toiles qui se boursoufflent par moments. La symbolique de la remise en cause du cadre est évidente.
L'air arrive du dehors, porté par de grandes bourrasques inondant littéralement les personnages de couleurs vives. A la fin personne n'est indemne et tout le monde patauge.
La langue de Denis Lachaud rappelle la syntaxe du théâtre antique alimentée par un lexique contemporain, le tout dans un élan poétique très marqué. C'est très fort et les dialogues sont "serrés". Par exemple le consentement du fils est : "Capitaine de mon père, cow-boy de mon papa, je deviens par notre volonté commune le capitaine de mon promis qui sera mon soldat pour la vie."
On reconnait à intervalles réguliers, et dans un tempo parfois différent, le Chœur des soldats du Faust de Gounod dédié à la gloire immortelle de nos aïeux.
Parmi les comédiens, John Arnold, formé au Théâtre du Soleil, et qui a fait ses débuts dans la compagnie d’Ariane Mnouchkine. Il a réalisé avec succès l’adaptation et la mise en scène du roman de Joan Carol Oates, Norma Jean, qui fut créée au Théâtre des Quartiers d’Ivry.
Hetero de Denis Lachaud, mis en scène par Thomas Condemine, au Théâtre du Rond-Point.
Du 17 septembre au 19 octobre 2014, à 20 h 30, dimanche 15 h 30
Salle Jean Tardieu
Il n'en est rien. Le sujet concerne la question de la place dévolue aux femmes et aux hommes, mais surtout aux femmes.
Avoir choisi de faire interpréter le texte uniquement par des hommes permet de neutraliser les différences. Le monde devient unisexe mais les rapports de force instaurés par la tradition sont maintenus, avec une violence qui éclate très vite. Et la question de la distribution des rôles au sein du couple et de la société est révélée avec davantage d'acuité. On continuera longtemps de réclamer les mêmes droits et les même devoirs ...
Les personnages sont en quelque sorte masqués derrière un maquillage blanc qui les présente comme ces clowns blancs dont la drôlerie provient de leur rapport à l'autorité, contrairement aux autres clowns qui font rire avec leurs bêtises. On pense aussi au théâtre No, ce qui donne une touche ancestrale.
Vous aurez compris combien ce spectacle peut s'avérer en fait très subversif. Surtout quand l'un des personnages réclame à l'autre : Montre-toi sous ton vrai visage ! La vie est un combat. Comme le souligne le fils : ce que je n'irai pas chercher ne me sera pas donné.
Les détracteurs estiment assister à un long délayage qui ne leur apprend rien, que les dialogues s'enchainent sans surprise et que le sujet s'épuise. Ils se défendent sans doute de regarder en face une vérité très dérangeante.
Denis Lachaud traite les rapports de domination, de dominé-dominant, en se moquant de la démonstration de la toute-puissance et du pouvoir, notamment dans les rapports de couple entre l'homme et la femme. C'est magistral. S'il y a un point cependant sur lequel je ne suis pas d'accord avec lui c'est qu'au final nous assistons davantage à une tragédie qu'à une comédie parce que son second degré évoque cruellement le premier degré dans lequel se débattent bien des couples.
Les stéréotypes sont immuables. Que ce soit entre employeur et employé ou entre mari et femme. La mise en scène de Thomas Condemine, un ancien de l’École du Théâtre national de Strasbourg (promotion 2007) est assez inventive. Le décor, lui aussi en noir et blanc, est intentionnellement composé de panneaux raccordés entre eux par des toiles qui se boursoufflent par moments. La symbolique de la remise en cause du cadre est évidente.
L'air arrive du dehors, porté par de grandes bourrasques inondant littéralement les personnages de couleurs vives. A la fin personne n'est indemne et tout le monde patauge.
La langue de Denis Lachaud rappelle la syntaxe du théâtre antique alimentée par un lexique contemporain, le tout dans un élan poétique très marqué. C'est très fort et les dialogues sont "serrés". Par exemple le consentement du fils est : "Capitaine de mon père, cow-boy de mon papa, je deviens par notre volonté commune le capitaine de mon promis qui sera mon soldat pour la vie."
On reconnait à intervalles réguliers, et dans un tempo parfois différent, le Chœur des soldats du Faust de Gounod dédié à la gloire immortelle de nos aïeux.
Parmi les comédiens, John Arnold, formé au Théâtre du Soleil, et qui a fait ses débuts dans la compagnie d’Ariane Mnouchkine. Il a réalisé avec succès l’adaptation et la mise en scène du roman de Joan Carol Oates, Norma Jean, qui fut créée au Théâtre des Quartiers d’Ivry.
Hetero de Denis Lachaud, mis en scène par Thomas Condemine, au Théâtre du Rond-Point.
Du 17 septembre au 19 octobre 2014, à 20 h 30, dimanche 15 h 30
Salle Jean Tardieu
Avec : John Arnold, Valentin de Carbonnières, Christian Caro, Bertrand Farge, Yvon Martin.
Crédits photographiques : Nicolas Mahut.
Texte publié aux éditions Actes Sud-Papiers
Crédits photographiques : Nicolas Mahut.
Texte publié aux éditions Actes Sud-Papiers
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire