La sortie du livre de Claudine Desmarteau avait été annoncée pour le 4 mars. Comme des frères va souffrir de la fermeture des libraires.
Quelle malchance pour cette auteure qui, après avoir publié plus d’une vingtaine de livres jeunesse, albums illustrés ou romans (au Seuil Jeunesse, Éditions Panama, Éditions Thierry Magnier, Sarbacane, Flammarion et Albin Michel Jeunesse) signe ici son premier roman adulte. Et ce n'est sans doute pas un hasard si ses personnages principaux sont des adolescents.
La bande, la petite meute, se composait de Ryan, Lucas, Kevin, Saïd, Thomas, Idriss, et puis Quentin… Et sa sœur Iris. Lui c'est Raph, enfin Raphaël, fils unique qui aurait dû avoir un frère, mais la vie en décida autrement. Il se définit comme quelqu'un de banal. Je ressemble à tout le monde ou à personne en particulier et c'est très bien. Je suis insipide et je rêve d'être invisible (page 21).
Lalie, qui traverse new York dans le dernier livre d'Eric Pessan souhaiterait elle aussi avoir le don d'invisibilité (dans Tenir debout dans la nuit). Je fais aussitôt l'hypothèse que l'évènement dramatique auquel le garçon fait allusion et qui s'est passé le samedi de ses 16 ans est sans doute comparable à ce qu’a connu la jeune fille.
Ce roman, qui m'a beaucoup fait pensé à La chaleur de Victor Jestin, pose l’éternel problème de la jeunesse quand elle est désoeuvrée et qu'un leader met en route une idée saugrenue qui va mal tourner. Parce que chacun, à sa manière, attend que quelque chose se passe (page 68). La justesse des dialogues est inouïe. On a le sentiment d’être en bas de leur immeuble alors que les conversations montent jusqu'à nos fenêtres ouvertes. La tension est très forte et attise le rôle que les parents peuvent jouer dans ce type de situation en laissant faire.
On peut aussi penser au film La fille au bracelet qui vient de sortir au cinéma.
A 13-14 ans, ils ont commencé par un truc qu’ils savent être con, cruel, débile mais ils en rigolent (page 71). Ils se comportent comme des Jackass, ces jeunes adultes intrépides qui multipliaient des cascades dangereuses et autres fantaisies sans autre but que de faire rire, dans une émission de télévision américaine, diffusée originellement sur MTV en 1999. Certains de leurs jeux sont minables comme le défi d'avaler un ver de terre (page 172). On devine que d'autres pourraient vite tourner mal.
Evidemment au collège, personne (entendez par-là aucun adulte) ne voulait rien voir, personne ne voulait rien entendre (page 80). Cette liberté dans laquelle se déploie la meute est sournoise. Le lecteur sent le malaise monter d'autant plus que le récit est entrecoupé de chansonnette narquoises…
Un de leurs modèles est maintenant Light Yagami, le personnage principal du manga Death Note. Le niveau de violence monte et lorsqu'il est question d'envie de liquidation avec la citation de personnes ayant réellemtn existé comme Anne Lauvergeon (page 129) j'ai froid dans le dos car je lis ce livre en pleine période d’épidémie de Covid 19, alors que la science-fiction rejoint la réalité.
Raphaël n'est pourtant pas au départ un de ces casse-cous. Il ne s'est jamais senti invincible. Il avoue même être terrorisé en bord de mer, depuis qu'il a vu Les dents de la mer (page 56). Quels dégâts ce film aura faits ! A commencer par les requins, massacrés encore plus depuis.
Au moment où il raconte son récit il a 22 ans, voudrait abolir le passé, même si c'est impossible : je partirais bien en vacances de moi. Sans laisser d’adresse (page 12). La seule chose qui est à sa portée est de se confesser. On apprend que trois personnes lui manquent. On sait déjà que parmi elles figure Éric son professeur de guitare, si motivant. Plus tard (page 106) on comprendra que la mort de son frère, in utéro, est une information capitale. Et j’imagine Iris.
Ce roman a la force d'un coup de poing. Il interroge sur ce qui arrive de beau, comme tomber amoureux, et sur les conséquences "collatérales" mais aussi sur la face sombre de la jeunesse quand elle se sent libre et vivante ... invincible sans doute. Avec évidemment la question de la culpabilité :
Est-ce que c’est ma faute ?
Après un Bac littéraire et des études à l’ESAAD (École supérieure des Arts Appliqués Duperré), Claudine Desmarteau travaille dans plusieurs agences de publicité en tant que Directrice Artistique. Parallèlement, elle commence à dessiner pour la presse (Le Nouvel Observateur, Télérama, Le Monde, Les Inrockuptibles…), et publie son premier album au Seuil Jeunesse en 1999.
En 2001, elle quitte le monde de la pub pour se consacrer entièrement à son activité d’auteur-illustratrice, pour la presse et l’édition.
Comme des frères de Claudine Desmarteau, chez l’Iconoclaste, sortie prévue initialement en librairie le 4 mars 2020
La bande, la petite meute, se composait de Ryan, Lucas, Kevin, Saïd, Thomas, Idriss, et puis Quentin… Et sa sœur Iris. Lui c'est Raph, enfin Raphaël, fils unique qui aurait dû avoir un frère, mais la vie en décida autrement. Il se définit comme quelqu'un de banal. Je ressemble à tout le monde ou à personne en particulier et c'est très bien. Je suis insipide et je rêve d'être invisible (page 21).
Lalie, qui traverse new York dans le dernier livre d'Eric Pessan souhaiterait elle aussi avoir le don d'invisibilité (dans Tenir debout dans la nuit). Je fais aussitôt l'hypothèse que l'évènement dramatique auquel le garçon fait allusion et qui s'est passé le samedi de ses 16 ans est sans doute comparable à ce qu’a connu la jeune fille.
Ce roman, qui m'a beaucoup fait pensé à La chaleur de Victor Jestin, pose l’éternel problème de la jeunesse quand elle est désoeuvrée et qu'un leader met en route une idée saugrenue qui va mal tourner. Parce que chacun, à sa manière, attend que quelque chose se passe (page 68). La justesse des dialogues est inouïe. On a le sentiment d’être en bas de leur immeuble alors que les conversations montent jusqu'à nos fenêtres ouvertes. La tension est très forte et attise le rôle que les parents peuvent jouer dans ce type de situation en laissant faire.
On peut aussi penser au film La fille au bracelet qui vient de sortir au cinéma.
A 13-14 ans, ils ont commencé par un truc qu’ils savent être con, cruel, débile mais ils en rigolent (page 71). Ils se comportent comme des Jackass, ces jeunes adultes intrépides qui multipliaient des cascades dangereuses et autres fantaisies sans autre but que de faire rire, dans une émission de télévision américaine, diffusée originellement sur MTV en 1999. Certains de leurs jeux sont minables comme le défi d'avaler un ver de terre (page 172). On devine que d'autres pourraient vite tourner mal.
Evidemment au collège, personne (entendez par-là aucun adulte) ne voulait rien voir, personne ne voulait rien entendre (page 80). Cette liberté dans laquelle se déploie la meute est sournoise. Le lecteur sent le malaise monter d'autant plus que le récit est entrecoupé de chansonnette narquoises…
Un de leurs modèles est maintenant Light Yagami, le personnage principal du manga Death Note. Le niveau de violence monte et lorsqu'il est question d'envie de liquidation avec la citation de personnes ayant réellemtn existé comme Anne Lauvergeon (page 129) j'ai froid dans le dos car je lis ce livre en pleine période d’épidémie de Covid 19, alors que la science-fiction rejoint la réalité.
Raphaël n'est pourtant pas au départ un de ces casse-cous. Il ne s'est jamais senti invincible. Il avoue même être terrorisé en bord de mer, depuis qu'il a vu Les dents de la mer (page 56). Quels dégâts ce film aura faits ! A commencer par les requins, massacrés encore plus depuis.
Au moment où il raconte son récit il a 22 ans, voudrait abolir le passé, même si c'est impossible : je partirais bien en vacances de moi. Sans laisser d’adresse (page 12). La seule chose qui est à sa portée est de se confesser. On apprend que trois personnes lui manquent. On sait déjà que parmi elles figure Éric son professeur de guitare, si motivant. Plus tard (page 106) on comprendra que la mort de son frère, in utéro, est une information capitale. Et j’imagine Iris.
Ce roman a la force d'un coup de poing. Il interroge sur ce qui arrive de beau, comme tomber amoureux, et sur les conséquences "collatérales" mais aussi sur la face sombre de la jeunesse quand elle se sent libre et vivante ... invincible sans doute. Avec évidemment la question de la culpabilité :
Est-ce que c’est ma faute ?
Est-ce que c'est seulement ma faute à moi ? (page 195)
En 2001, elle quitte le monde de la pub pour se consacrer entièrement à son activité d’auteur-illustratrice, pour la presse et l’édition.
Comme des frères de Claudine Desmarteau, chez l’Iconoclaste, sortie prévue initialement en librairie le 4 mars 2020
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