
C’est une histoire de jalousie, de c’est bien fait pour leur tronche, à l’égard de personnes qui avaient cru leur rêve accessible.
Combien y-a-t-il de bâtiments comme le Signal aujourd’hui ? Et surtout demain, avec les problèmes de montée des océans. On peut penser à Etretat, et à toutes ces côtes qui supportent des maisons qui menacent de s’effondrer sur la plage en contrebas.
Cette interrogation donne à cet ouvrage une dimension supplémentaire. Quant au contexte il est éminemment romanesque, offrant donc un cadre fictionnel très inspirant.
Construit entre 1965 et 1970 sur la côte sableuse aquitaine, à une époque où on pouvait donner un tel nom à un bâtiment, et préfigurant un ensemble gigantesque (il aurait dû y en avoir neuf identiques sur cette artère plus un hôtel de luxe, un centre de thalasso, des piscines, des commerces …) cet immeuble d’habitation a permis à une population modeste d’accéder au logement "face à la mer". Mais on a négligé l’érosion marine, accélérée par le réchauffement climatique.
Le bâtiment n'est pas décrit avec beaucoup d'éléments anthropomorphiques mais on sent combien l'attachement rend sa destruction tragique, avec une comparaison très juste au processus d’agonie d'un être humain quand les proches ne savent plus se positionner entre la vie qui s’accroche et la mort qui s’impose déjà. La mort n’interviendra qu’en 2023 mais elle est déjà annoncée en 2019 (p. 99).
Sophie Poirier a donc la possibilité d’y entrer encore, et encore, s'étonnant au fil des années que : Ce n’est finalement jamais la dernière fois (p. 109).
Alors l'autrice raconte ses incursions, pendant lesquelles elle est rarement seule. Les appartements vides, parfois vandalisés, racontaient une histoire. Arrivent une série de photos noir et blanc témoignant d'un bâtiment encore présent, mais de moins en moins vivant, dont les vagues ne sont plus qu'à 9 mètres, puis le paragraphe unique, lapidaire : L’immeuble Le Signal a finalement été démoli en février 2023 et remplacé par une dune sur laquelle ont été plantés des oyats.
Il n'aura pas eu le destin d'une pyramide, ni celui du phare de Cordouan, auquel il faisait face depuis 50 ans dans une position paradoxale (p. 63). Sophie Poirier le pense construit pour l'éternité depuis 1584. Peut-être que son classement au patrimoine de l'UNESCO lui garantit des soins particuliers mais d'autres édifices sont menacés. Comme le phare de La Coubre, situé sur la commune de La Tremblade, 52 km plus loin.
Il signale, avec Cordouan, l’entrée dans l’Estuaire de la Gironde. Il est intéressant de savoir qu'il a été mis en service en 1895 à 1,5 km de la côte. Dix ans plus tard, seulement dix ans, l'érosion étant menaçante, on construisit un brise-lame pour tenter de ralentir l'avancée des vagues, mais l'océan continua d’avancer inexorablement.
On construisit donc le phare actuel, non plus en pierres mais en béton, davantage encore en retrait, à 1,8 km du (nouveau) rivage qui fut mis en service le 1er octobre 1905. Il n’est actuellement plus qu’à seulement 150 m du trait de côte, preuve que la nature est plus forte que tout.

Ce livre nous rappelle l'urgence à admirer les côtes atlantiques. A pied … ou à vélo comme je le préconisais ici.
Le Signal de Sophie Poirier, collection Babel, Actes Sud, en librairie depuis février 2025
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