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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

vendredi 6 février 2009

J'ai tant rêvé de toi

Sophie Wilhelm emprunté ce vers à Robert Desnos pour en faire le titre de son spectacle sur le thème de la rencontre. Avec l’intention de réciter sur scène ce poème que finalement elle ne dit pas. C’est une phrase qui résonne comme le refrain d’une chanson intérieure. Tout le monde n’est-il pas potentiellement amoureux, toujours ?

J'avais eu l'occasion de faire sa connaissance avec les abonnés de la Médiathèque d'Antony (92) où elle présentait son prochain spectacle en décembre dernier. Elle en avait donné ce soir-là quelques extraits prometteurs que j'avais retranscrits pour le blog.

Elle avait accepté de me revoir une dizaine de jours avant la première représentation, à la Maison du conte de Chevilly-Larue (94). Si elle éprouvait encore beaucoup d’interrogations mais elle se sentait suffisamment à l’aise pour accepter de livrer un peu d’elle, de son parcours, de ses rêves et de ses cauchemars.

Sophie Wilhelm adore les petits détails qui font les rencontres, qui sont toujours les mêmes et pourtant à chaque fois légèrement différents. Elle a procédé par collectage pour composer le texte de son spectacle. Toutes les histoires qu’elle raconte sur scène, des premiers flirts aux amours les plus folles, lui ont été inspirées par des confidences qui ont patiemment été consignées dans un carnet. Pendant notre entretien elle y notera quelques phrases… comme de petits trésors.

Il faut dire que Sophie adore les mots. A tel point que sa compagnie s’appelle Les mots du vent. Rien d’étonnant à ce qu’elle ait fini par s’installer au-dessus d’une rivière, sur une colline battue par les vents, au Sud de Saint-Mihiel, en Lorraine. Quand elle parle de la campagne on sent combien la nature lui est viscéralement essentielle : J’ai vécu quelques mois sans électricité. Cela donne le prix de la lumière qui brûle inutilement.

Est-ce pour cela qu’il y a sur scène un lampadaire qui joue quasiment le rôle d’un partenaire ?
Je m’étais pris les pieds dans le fil d’alimentation. L’abat-jour s’était brisé sous le choc mais je n’avais rien jeté. Je suis retombée dessus alors que je cherchais un objet au cours d’une répétition. Cette lampe a vite pris du sens. Je peux jouer avec, tordre sa tige, m’en servir comme d’un micro, y pianoter un rythme, l’allumer, l’éteindre, l’étreindre aussi.
Car Sophie Wilhelm joue sur scène avec sa voix et son corps. Elle est capable de nous emmener dans un train qui n’est pas qu’imaginaire. Elle ne parvient pas néanmoins à isoler le début du commencement de sa « carrière » de conteuse.
Le monde m’est toujours apparu comme une réserve d’images. Sur la plage, sur le podium d’une fête populaire, en classe de 6ème. Partout ! La vie n’a de sens que si on la raconte.
L’envie et le don n’auraient pas suffi. Née au bord de la frontière allemande, Sophie Wilhelm a passé son enfance près des mines de charbon. Elle a enchaîné le conservatoire d’art dramatique de Metz avec des expériences multi-artistiques à Strasbourg, un passage dans un centre culturel sarthois, les cours de mime de l’école Omnibus au Québec. Elle s'est positionnée à la première place du dernier grand prix des conteurs de Chevilly-Larue en 2000.

Après c’est le travail, le travail et encore le travail qui lui permet de devenir une conteuse qui va compter dans le cercle plutôt fermé des conteurs professionnels. Le public l’a beaucoup appréciée le 30 janvier dernier sur la scène de la Maison du Conte. Et je gage que le public meusien qui viendra l'écouter à Commercy le 27 février prochain (salle des Tilleuls) sera ému et qu'il rira aussi tout autant que nous.

Car ce qu’elle donne à voir est extrêmement abouti. Avec une remarquable économie de moyens elle campe une kyrielle de personnages que tout oppose. Sans effets sonores abusifs (comme cela semble malheureusement devenir la mode), avec un décor ultra-minimaliste et une délicate mise en lumières (signée par Sam Mary) elle réussit à nous transporter très loin. On prend le TGV, on surfe sur Internet, on va dans les cafés, on danse avec elle, on se noie dans les yeux du marchand de glaces et on l’approuve quand elle nous confie que le regard d’amour neuf est le plus beau de la rencontre.

J’ai tant rêvé de toi est un de ces « petits » spectacles qui font du bien et dont les directeurs de salle auraient tort de priver leur public. Qu’on se le dise !

Renseignements complémentaires : Compagnie Les mots du vent - http://lesmotsduvent.org/

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