La tournée mondiale de Soy de Cuba a été chahutée par le Covid-19. Initialement programmée en 2020, reportée au printemps 2021, puis à 2022 pour de nombreuses dates. Bien entendu les billets précédemment acquis restent valables.
Les parisiens ont davantage de chance car ils peuvent, depuis le 3 juin et jusqu'au 30 juin, venir applaudir cette troupe cubaine au Casino de Paris. Leur nouvelle comédie musicale Viva La Vida ! est l'un des tout premiers spectacles d'ampleur à être joué dans la capitale pour la réouverture des salles.
On fait un voyage inoubliable aux rythmes exotiques et endiablés, interprétés par des virtuoses engagés parmi les meilleurs musiciens et danseurs de l’île. Ce nouveau spectacle dansant clame haut et fort un hymne à la vie et à la liberté́ sur fond de musiques colorées et de danses fiévreuses : ¡Viva la Vida!
La précédente édition créée en 2011, s’inspirait de la vraie vie de la danseuse Ayala Yanetsy Morejon, interprétant son propre rôle. La jeune femme, originaire des plantations de tabac de Viñales, habitait chez ses grands-parents tout en rêvant d'une vie meilleure. Son corps sublime est taillé pour la danse. Enfant, elle avait deux rêves : jouer du piano et danser. Elle a commencé cet art à 5 ans. Cette maman d'un petit garçon est très fière d’être cubaine mais elle adore Paris, y faire du shopping, et visiter de nouveaux lieux.
Dans ce nouveau spectacle, la vie d’Ayala bascule lorsqu’elle rencontre Oscar, un jeune boxeur travaillant à la fabrique de cigares. Il est joué par Osmani Montero Hernandez, danseur professionnel et notamment soliste au Ballet TV, gagnant 2018 du "Danse avec les Stars" cubain. La danse et l’amour vont réunir leurs destins.
Le propos est simple et il est raconté par le vieux Leonardo, lecteur public de l'une des plus vieilles manufactures de cigares de La Havane qui rassemble 700 ouvriers. En effet, dans les usines de tabac, un homme ou une femme faisait la lecture aux ouvriers et ouvrières en leur lisant chaque jour la presse, Granma, quotidien, des œuvres littéraires internationales, notamment Les Misérables ou Madame Bovary … pour cultiver le personnel pendant qu'il travaillait.
On ne s'attend pas à un livret comme dans les opéras classiques et au demeurant dramatiques. Ce dont on a envie, c'est de gaité et de dynamisme. Et c’est ce qu’on nous offre. Cuba est un petit pays mais le mélange de cultures est d'une richesse incroyable. Il s’exprime à travers la musique, la danse, le théâtre, … Comme le dit Ayala, "Etre cubain, c’est une philosophie de vie. Même si nous avons des problèmes et rencontrons des obstacles, nous gardons toujours le sourire et restons joyeux ; nous avons de l’humour et rions des aléas."
Ce n’est pas pour rien que le spectacle s’appelle Soy de Cuba, viva la vida ! Cet intitulé est une promesse de bonheur, et c'est bien de cela qu'il s'agit. Le mot felicidad (bonheur) revient régulièrement dans les chansons. Les artistes ont été choisis pour leur forte personnalité. Savoir danser n'aurait pas suffi. Ils devaient être en capacité d'exprimer et transmettre tous les sentiments sur scène. Ces danseurs ne jouent pas la comédie mais ce sont de sacrés interprètes ! Il suffit d'un regard, d'un port de tête, d'un sourire pour s'en rendre compte. L'intensité est là. Le charisme aussi. Nicolas Ferru, le producteur, a voulu un spectacle de caractère qui laisserait une empreinte. La musique latino étant montée en puissance ces dix dernières années, il avait conscience du niveau d'exigence du public et il a eu raison.
Grand amateur de cigares, Sébastien Acker a relevé le défi d'écrire sur Cuba. Il s'est baladé dans des manufactures de cigares, des boutiques, véritables sanctuaires qui se visitent presque religieusement pour écrire le spectacle. Fin connaisseur en boxe -il a pratiqué la discipline pendant plus de cinq ans-, il évoque les légendes cubaines du ring : Eligio Sardiñas Montalvo alias Kid Chocolate et Teofilo Stevenson dont les portraits sont accrochés aux murs de plusieurs bars de la Vieille Ville. On dit que la boxe cubaine, c'est le plus beau style du monde !
Il raconte le destin d'un boxeur et d'une danseuse en démontrant que ces deux univers relèvent du langage corporel et possèdent des valeurs fortes, de la noblesse et de l’élégance. La lucha (la lutte) est partout : sur la piste de danse, sur le ring, dans la rue, au cœur de tous les Cubains.
Au célèbre "No sport" de Churchill, s’oppose le non moins célèbre "Le sport est un droit du peuple" de Castro. En 1961, l’INDER, l’Institut national du sport, de l’éducation physique et des loisirs voit le jour à Cuba. Avec cette démarche, Fidel Castro est bien déterminé à intégrer le sport dans le monde du travail alors qu’il était jadis réservé aux classes aisées. Les femmes ne sont pas la dernière roue du carrosse. Au contraire. Les sportifs handicapés non plus. Loin s’en faut. Le credo "sport pour tous" permet non seulement de fédérer la population via des disciplines sportives diverses et partagées par tous, mais d’avoir un effet bénéfique sur la santé des Cubains. Un peuple en forme est plus productif. Cette décision avait permis au Commandante de véhiculer l’excellence cubaine à l’échelle internationale ; Fidel Castro avait signé le décret 83A blâmant le sport pro au prétexte qu’il "enrichissait une minorité aux dépens de beaucoup". Cuba est aussi le pays qui compte le plus de médecins par habitant au monde.
Le show nous entraîne donc dans une manufacture de cigares et dans les coulisses des salles de boxe. Au son des mambos, rumbas, salsas et autres tempos jazz afro-cubains, la charismatique Ayala nous fait entrer dans la danse ! Dans ce tourbillon de rythmes, on découvre une troupe de danseurs cubains triés sur le volet, un orchestre live, un décor composé d’inserts vidéo ingénieux... La magie opère grâce au talent du maestro Rembert Egües, compositeur de légende et directeur musical. L'album de Dany Brillant, La Havane, disque de platine, c'est lui ! Désillusionniste, le tube latino de Mauranne, c'est encore lui. Il signe les chansons du spectacle (à l'exception du titre Tu y yo) et sa direction musicale. Les musiciens ont répété dans son studio-appartement et il est heureux de revenir à Paris où il a vécu trente ans.
Il est sur scène avec 6 musiciens, dont un est également chanteur, et Anna-Marie, la chanteuse. La présence du maestro est une valeur ajoutée. Un gage d'authenticité. Les femmes occupent une belle place, outre Anna-Marie, la chanteuse, il s'est entouré d'une formidable guitariste et d'une tromboniste d'exception (en robe jaune) qui fait un très joli solo.
Julie Dayab & Michaël Xerri assurent la direction artistique et la mise en scène des 18 tableaux. Lui est issu de la musique et du sound design. Elle vient de la danse. Ils sont tous les deux aussi à l’aise avec le spectacle vivant qu’avec la vidéo, la direction artistique, la réalisation, la scénographie, et ont eu à coeur de valoriser et sublimer la culture cubaine. Le mapping est particulièrement réussi, nous projetant au coeur de La Havane, d'une rue à une autre, jusqu’aux mythiques salles de boxe hors d’âge de la capitale. On ne serait pas surpris de voir une évocation d'Ernest Hemingway qui a vécu à San Francisco de Paula, près de La Havane entre 1939 et 1960 et y a écrit, entre autres, Pour qui sonne le glas, Le vieil homme et la mer...
Si l'atmosphère, l'identité et les références culturelles que nous connaissons sont là, ils innovent en ne se contentant pas de jouer uniquement sur le style Buena Vista Social Club. Cette fois, la boxe, sport emblématique à Cuba, s'invite sur scène. Ils ont cherché à donner du caractère et de l’empathie aux personnages. L'exercice a été réellement inspirant pour eux, notamment avec la fabrique de cigares qui, à elle seule, est un personnage à part entière. Aucune place n'est laissée au hasard et tout est travaillé, la technique, la rapidité, la fluidité, la complexité des mouvements, le rythme... Et c'est volontiers que el public accepte de les suivre en frappant dans leurs mains .
Les deux chorégraphes Luis Alberto Moro Ronda, dit Chino, et Dieser Disley Serrano Garcia transmettent au groupe leur passion pour les chorégraphies audacieuses et précises en mélangeant du traditionnel et du moderne.
La troupe de Soy De Cuba est emmenée par 14 danseurs tous cubains et un orchestre live composé de 6 musiciens et 2 chanteurs, recrutés parmi les meilleurs musiciens et danseurs de leur île. Elle signe son grand retour à Paris pour ravir tous les amateurs de musique, danse et culture cubaine. Au fil des tableaux hauts en couleur, cette version inédite offre un panorama de la musique cubaine et de ses danses mythiques : la Salsa, le Mambo, la Rumba, le Cha-Cha-Cha ou encore, le Reggaeton, ou du Cubaton pour un dépaysement total ! Il faut savoir que si les deux premières sont des danses cubaines, par contre la bossa-nova, issue du croisement de la samba et du cool-jazz, a émergé au Brésil à la fin des années 1950.
ll n'y a que des talents parmi les quatorze danseurs, les six musiciens et les deux chanteurs de la troupe. Ils ont créé le spectacle à Cuba mais c'est dans le bassin d'Arcachon qu'ils se sont retrouvés pour le répéter dans sa version internationale et régler les éclairages. On m'a dit qu'ils avaient énormément travaillé. Le résultat est à la hauteur de nos attentes. L'air marin leur a sans doute bien réussi.
Le spectacle commence dans la pénombre d'une vénérable manufacture de cigares fondée en 1845 où l’on pousse souvent les tables le soir pour faire place à la musique et à la danse joyeuse de la "Compana Mango Tabaco" - la compagnie adossée à la fabrique. Quoiqu'on pense de ses effets sur la santé n'empêche que la confection de cigares demeure une spécificité cubaine. J'ai appris beaucoup sur le sujet dont je restitue l'essentiel en fin d'article.
Plus tard, la chorégraphie mime des figures d’entrainement des boxeurs avec des cordes à sauter, des élastiques … On ne sera pas surpris de voir un match, ou du moins une joute, toujours en musique, accompagnée par les percussions et soutenu par la trompette. Un coup de cymbale annonce la fin du combat.
Après l'entracte il m'a semblé que le rythme était encore plus soutenu, multipliant les acrobaties. Un numéro de claquettes fut très applaudi. On ne perd pas un émietté des péripéties qui sont admirablement interprétées. On perçoit la chaleur tropicale sous le masque, et c'est un compliment.
Les moments dansés, joués et les intermèdes musicaux s'enchainent astucieusement tout au long de près de deux heures d'un show qui vaut complètement le déplacement. Quel bonheur de le voir en live, enfin !
En voici un extrait si vous doutez encore :
Viva La Vida ! le nouveau spectacle de Soy de Cuba
Livret : Sebastien Acker
Directeur musical : Rembert Egues
Direction artistique et mise en scene : Michael Xerri & Julie Dayan
Conception video : Michael Xerri
Choregraphies : Dieser Serrano Garcia
Directeur de l’image et Photographe : Philippe Fretault
Au Casino de Paris, 16 Rue de Clichy, 75009 Paris
Jusqu'au 30 juin 2021
Horaires multiples : 14h et 17h30 (les dimanches), 16h et 20h30 (les samedis) 20h ou 20h30 en semaine
Pour en savoir davantage à propos de Cuba et des cigares :
Quelques dates clés :
1492 : Christophe Colomb découvre l’île.
1511 : Début de la colonisation espagnole. La Havane devient une escale stratégique pour les flottes espagnoles et un port fortifié, contrôlant le détroit de la Floride et l’entrée de la mer des Antilles.
1868-78 : Première guerre d’Indépendance.
1898: Indépendance de l’Espagne. Administration des États-Unis.
1952 : Dictature de Fulgencio Batista.
1959 : Révolution cubaine. Début du régime castriste.
2006 : Fidel Castro se retire au bénéfice de son frère, Raúl.
2016 : Mort de Fidel Castro.
A propos des cigares :
Le tabac met 80 jours à pousser et 3 mois à sécher. Outre la culture du tabac, la vallée de Viñales, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, est connue pour ses formations rocheuses uniques et l’agriculture traditionnelle.
On ne fume pas un cigare, on le savoure quasi religieusement. Tout un univers et un vocabulaire bien mystérieux l’entourent. Le cigare est le fruit de l’assemblage complexe de la tripe (tabac qui se trouve à l’intérieur du cigare, et qui est constituée de trois types de feuilles pliées ensemble qui proviennent de différentes parties de la plante), de la sous-cape (qui contient la tripe) et de la cape (feuille qui enrobe le cigare et qui influe sur la combustion, sur la cendre et son aspect esthétique).
La bague de cigare a été inventée par le Néerlandais, Gustave Bock, pour permettre aux marques de se distinguer et pour préserver les amateurs de cigare des effets du tabac sur leurs doigts. Les collectionneurs s’appellent les vitolphilistes, de l’espagnol "vitola".
Pour l’apprécier dans les règles de l’art, on recommande un cérémonial particulier : chaque cigare nécessite une coupe délicate en sa tête, ne dépassant pas l’amorce de l’arrondi, à l’aide d’un coupe-cigare (simple ou double lame) ou d’un emporte-pièce. Il est conseillé de ne pas se précipiter à l’allumage. D'enflammer la totalité du pied, pour que toute la couronne soit en combustion.
Les amateurs éclairés aiment à rappeler aux néophytes que la dégustation se décompose en trois phases distinctes :
Le foin : le cigare démarre doucement et prend de l’ampleur
Le divin : la palette aromatique est optimale, la volupté garantie
Le purin : la tête du cigare s’étant chargée de nicotine, la puissance augmente au détriment des senteurs.
Enfin, le cigare n’est pas conçu pour que l’on inhale sa fumée ! Lorsqu’on a fini de le déguster, on ne l’écrase pas, on le laisse s’éteindre de sa belle mort.
Dans sa célèbre chanson, interprétée en duo avec Catherine Deneuve, Gainsbourg annonçait que Dieu est un fumeur de havane. Il aurait pu dresser une longue liste des amateurs. Hommes politiques, chefs d’État, acteurs, producteurs, gangsters, écrivains, psys, scientifiques, cinéastes et... sportifs comme Fidel Castro, Ernesto Che Guevara, Winston Churchill, John F. Kennedy, Bill Cosby, Philippe Noiret, Robert De Niro, Arnold Schwarzenegger, Sylvester Stallone, Al Capone, Ernest Hemingway, Sigmund Freud, Albert Einstein, Orson Welles, Michael Jordan...
Ernesto Che Guevara a commencé à apprécier le cigare grâce aux... moustiques ! Le révolutionnaire argentin n’avait rien trouvé de mieux que la fumée de cigare pour éloigner les moustiques qui l’envahissaient. Après les cigares bon marché, le Che a adopté les Cohiba !
Le père de la psychanalyse Sigmund Freud était accro au cigare. Dans les temps de vaches maigres, il affirmait : « Je préfère me priver de manger que de fumer ».
Le cigare cubain préféré de John F. Kennedy, le 35e président américain était le Panatela de chez H. Upmann. Fervent amateur, JFK avait ordonné à son attaché de presse, Pierre Salinger, de passer commande d’un millier de Petits Coronas Upmanns avant de ... signer l’embargo sur Cuba !
Les femmes aussi sont amatrices. Ainsi George Sand, éprise de liberté faisant fi des conventions, fut la seule femme de son époque à aimer le cigare. La pop star Madonna confie se relaxer en fumant un cigare Romeo y Julieta.
Whoopi Goldberg fume le cigare depuis son adolescence ; elle possède une gigantesque cave où elle collectionne les plus parfumés des cigares. Un lieu sacré où elle n’hésite pas à partager un Cohiba, la marque cubaine de légende, avec son ami, le réalisateur Ridley Scott.
L’actrice Demi Moore confie préférer les Panatelas, mais a essayé les Montecristo N° 2.
Sharon Stone confesse être nostalgique du temps où son état de santé lui permettait de fumer. "J’aimais tout particulièrement en déguster un dans un environnement approprié : dans un cadre tropical, c’était encore meilleur pour ne pas dire merveilleux !"
Le Top model Linda Evangelista ne tarit pas d’éloges sur le cigare : "Quand vous en choisissez un, tout va mieux !"
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