Après les adultes fous de littérature, les enfants amateurs de littérature jeunesse, voici les ménagères, et les ménagers gâtés par la rentrée.
Hachette cuisine a eu la bonne idée de rééditer une grande spécialiste des fondamentaux. Depuis des lustres c'est auprès de Jacqueline Gérard que je retourne lorsque j'ai besoin de me rafraichir la mémoire sur les ingrédients d'une potée, le temps de cuisson d'un poulet, l'ordre dans lequel il faut mélanger sucre-oeufs-beurre et farine pour réussir un gâteau ... et je crois que je vais, comme on dit, changer de crémerie ...
Rien n'est jamais trop complet mais avec 500 recettes au total, ces deux vade-mecum de Françoise Bernard vont accompagner la nouvelle génération et sans doute permettre à l'ancienne de se remettre à jour.
Je me suis amusée à comparer quelques classiques. Ainsi quand les anciens se limitent à mettre des pommes de terre et des carottes dans le navarin de mouton, Françoise ajoute du concentré de tomates, des navets et des petits pois (page 102). Elle le désigne sous le nom de Navarin printanier, ce qui le resitue dans la saison où il est le meilleur.
Coté sucré, j'ai, vous l'aurez parié, scruté les cakes. La version anglaise de Jacqueline (page 382) est beaucoup plus calorique que celle que Françoise donne page 81. Pour le même nombre d'oeufs on a 20% de moins de beurre, de sucre et de farine. La quantité de rhum aussi a considérablement diminué. Mais le plus déterminant est le processus de cuisson, à température constante de 150° pour la première, tandis que la seconde commence à four plus chaud, pour descendre à 100° au bout de 20 minutes.
Le débat autour de ce dessert si difficile à maîtriser est donc relancé et voilà détrônée La cuisine, si longtemps qualifié de livre fétiche, depuis sa parution en 1974 chez Larousse. Le plus amusant est que Françoise Bernard n'est pas une jeune bloggeuse mais une respectable dame. La petite dactylo du groupe Unilever fut choisie pour vanter les mérites de la margarine Astra avant de faire l'apologie de la cocotte-minute pour SEB et d'entrer à RTL. On n'a pas attendu les Master chef et autres challenges pour se passionner pour la cuisine. Le premier livre de Françoise Bernard fut jugé très moderne et c'était en 1963 !
Cinquante ans plus tard elle est toujours aux fourneaux, et nous fait encore saliver, ayant accepté courageusement de reprendre toutes les recettes dont elle a raison d'être fière et d'y apporter des modifications afin de les adapter à nos modes de vie. Cela mérite un grand salut.
Les Grands Classiques Salés et Les Grands Classiques Sucrés de Françoise Bernard, Hachette Cuisine, mai 2012
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