Monter les quelques marches de la Pâtisserie des rêves, c'est accéder à une forme de paradis. C'est aussi un peu Noël avant l'heure, ou Noël toute l'année pour les gourmands.
J'avais raconté un gouter, puis un petit déjeuner mémorable. Permettez-moi de revenir sur le sujet en présentant cette fois les grandes spécialités de la maison.
On ne touchera les gâteaux qu’avec les yeux. Ils sont présentés sous cloche, exposés comme des objets d’art au centre de la boutique sur un meuble conçu spécialement et autour duquel les enfants aiment tourner autant que les adultes.
Le concept est de trouver, dans un lieu unique tous les grands classiques que nous avons tant aimés, et dont nous nous sommes peut-être lassés tant ils ont été reproduits à grande échelle, jusqu’à en perdre leurs valeurs de base.
Philippe Conticini et Angelo Musa ont tout repris et leur gamme est désormais très large et parfaitement au point après des mois et des mois de travail et de subtiles modifications. Elle fait de nouveaux adeptes de jour en jour. Les plus grands pâtissiers en font la louange, comme l’écrit Christophe Michalak sur son blog.
Tout est délicat. A commencer par le logo qui reprend les trois galets des Maisons des Rêves crées par Thierry Teyssier mais on pourrait aussi bien –si on a l’œil gourmand- y voir le dessin stylisé d’une religieuse.
Après La Table d’Anvers, puis Petrossian, la Maison Peltier et un détour par New York, Philippe Conticini avait pris la direction de l’équipe de France de pâtisserie qui comprend un chef prometteur, Angelo Musa. Elle monte sur la plus haute marche du podium de la Coupe du Monde en 2003. Et Angelo est devenu Meilleur Ouvrier de france depuis 2007.La rencontre entre Philippe et Thierry s'est faite très exactement à Romaneira, une quinta traditionnelle portugaise située dans la vallée du Douro. Un lieu de rêve, imaginé par Thierry qui en a confié la carte à Philippe (aidé de Miguel Castro e Silva). De leur collaboration naitra une puis deux Pâtisseries des rêves qui assurent à Philippe Conticini de devenir désormais la référence en matière de création pâtissière.
A moins d’avoir un appétit d’ogresse, d’avoir jeuné depuis huit jours ou d’avoir une conscience professionnelle sans limite, il est impossible de tout tester. J’ai fait de mon mieux avec la complicité de Claire.
A tout seigneur tout honneur avec le Paris-Brest qui est en passe de devenir une institution. C’est étonnant comme un gâteau qui est à ce point différent de la version originale sur le plan esthétique peut en respecter le gout. Il est rigoureusement identique en version familiale et en version individuelle. Avec une forme de couronne en pâquerette compose quasiment six bouchées « pré-découpées ».
Évidemment il n’est pas trop sucré, très parfumé, avec une crème au beurre vanillée et pralinée très équilibrée, absolument pas écœurante, rendue aérienne par une émulsion de lait, et renforcée par un cœur coulant en praliné pur. Le résultat confère au sublime car il conjugue le mou et le croustillant. Rien d’extravagant à ce que plus de cent personnes viennent spécialement pour lui le samedi.
Les ventes sont également dépendantes de la météo. Moins il fait beau plus on écoulera de Paris-Brest et de Saint-Honoré. Aussi Claire s’appuie-t-elle sur les prévisions météorologiques pour passer ses commandes en conséquence.
Le Saint-Honoré est un autre grand classique, souvent monté à la minute devant le client avant d’être mis en boite, soigneusement calé entre des piques roses au logo de la maison. Encore une innovation qui garantit aux gâteaux d'arriver en parfait état chez vous. Même si vous avez le bras dansant sur le chemin aucun ne risque de glisser. ceux qui ont fait la désastreuse expérience de l'écrasement d'une Chantilly sur le bord cartonné d'une boite comprendront sans besoin de leur faire un dessin.
Le Saint-Honoré est devenu rectangulaire. Il comporte ici deux carolines (nom donné à ces éclairs miniatures) à la vanille posés sur un feuilleté. Les coques de choux sont moulées dans un caramel et délicieusement croquantes. Chacun, et c’est là une des originalités de la recette, est garni d’une crème pâtissière vanille, ce qui n’existe pas ailleurs. La Chantilly est extra et vanillée elle aussi.
Le Montblanc est un produit d’hiver, demandé toute l’année ; l’an dernier sa production devait s’arrête fin janvier mais il a été présenté jusque fin mars.
Il contient de vraies brisures de marron glacé parfumées à l’armagnac. Des inclusions de meringue enrichissent la crème de marron et la Chantilly est aromatisée avec un fruit au nom étonnant de main de boudha, un agrume proche du citron vert.
C’est, je crois mon dessert préféré, incomparablement supérieur à la spécialité d’un célèbre salon de thé de la rue Royale.
Après ce tiercé gagnant plus classique est la tartelette au citron … encore que. Un biscuit noisettes recouvre la pate sucrée pour lui éviter d’être détrempée. Il supporte un confit de citron qui confère acidité et pointe d’amertume en compensation du goût sucré de la crème de citron qui le recouvre. Une meringue italienne donne une envolée charmante à la tartelette. En portion familiale chaque convive peut prétendre à un morceau de la pointe, le chef pâtissier y tient.La Tatin est un feuilleté cuit séparément des pommes. Les fruits sont tranchés en fines lamelles, confites puis caramélisées. Pour l’anecdote il est amusant d’apprendre que cette cuisson inversée a été appliquée à une spécialité qui avait été cuite elle-même à l’envers la première fois.
Le moka, créé au XIX° siècle par M. Quillet, le pâtissier inventeur de la crème au beurre. Une cliente est particulièrement ravie d’apprendre qu’il « ressorte » et apprécie sa forme en grain de café et son glaçage brillant.
A la Pâtisserie des Rêves il a été rebaptisé Grand Cru. Il devient un biscuit fondant au chocolat avec un croustillant à la fleur de sel, assurant une surprise au niveau des textures. Il possède un unique et curieux coin arrondi. Ganache et mousse au chocolat sont réalisées avec un cacao à 70%. Il est conseillé de le laisser à température ambiante une quarantaine de minutes avant d’y creuser la première bouchée.
Au total ce sont 15 grands classiques qui sont régulièrement « à la carte » mais la liste ne fait que s’allonger. C’était des desserts vieillots, plutôt boudés, réservés à des occasions spéciales, uniquement les week-ends. Et maintenant le Paris-Brest, pour ne citer que lui, est réclamé tous les jours.
Le choix est vaste et on tourne plusieurs fois autour de la desserte avant d'arrêter son choix. On aimerait soulever les cloches pour respirer les parfums. La vue est une telle promesse de bonheur ...Avez-vous remarqué la coque qui emprisonne les éclairs ? La surprise en fait craquer plus d'un.
Le baba a retrouvé ses lettres de noblesse. Il se laisse déguster en couple, selon son envie, après l'avoir soi-même imbibé de rhum, en alternant la petite cuillère entre deux crèmes à la saveur différente.
On peut aussi préférer les desserts de saison, comme les tartes, qui sont magnifiques.
Il y a beaucoup d’habitués dans la boutique de la rue de, des fidèles de Saint-Cloud et de Fontainebleau, quelques touristes … La population est très variée. J’entends un fidèle qui achète deux tartes chaque week-end souhaiter ajouter aujourd’hui un Mont-Blanc.
Un autre décide de ne prendre que des choux à la vanille, pour éviter les conflits. Un troisième demande in extremis un flan pâtissier (si dense mais si crémeux) et une tarte pommes-coings, pour changer. Comme vous le constatez, chacun sa stratégie.
D’autres enfin repartent avec une récréation gourmande contenue dans une boite carré, à l'instar des boites à gâteaux de notre enfance. Ils la finaliseront une fois de retour chez eux, comme un chef.
Par exemple le gâteau aux pommes.
Et puis, si on veut encore aller plus loin dans l'aventure on feuillettera les Sensations que Philippe Conticini nous livre dans un album magnifique. Peut-être osera-t-on rêver l'imiter ?Dans quelques jours la boutique sera méconnaissable, avec une profusion de bûches, d’aspect plutôt classique à ce qui m’a été annoncé. Je vous laisse juger sur place et sur pièces !
La Pâtisserie des Rêves
93 rue du Bac, 75007 Paris, Tel. : 01 42 84 00 82
111, rue de Longchamp, 75016 Paris
De 8h à 20h sauf lundi
Site: www.lapatisseriedesreves.com
« Sensations » par Philippe Conticini aux éditions Minerva, 2009, 45 €
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