Facile à lire, mais sans concession sur le fond et sur la forme, tel est le nouvel ouvrage d'Eric-Emmanuel Schmitt qui s'attaque cette fois au mythe d'Einstein.
L'auteur déboulonne la statue du scientifique en nous rappelant qu'il n'est pas pour rien dans les catastrophes d'Hiroshima et de Nagasaki. Il le fait avec humour dans un texte qui est une pièce de théâtre que l'on pourra voir très bientôt au Théâtre Rive Gauche avec Francis Huster dans le rôle titre, avec aussi Jean-Claude Dreyfus et Dan Herzberg, dans une mise en scène de Steve Suissa jusqu'au 30 mars 2014.
Le conflit moral vécu par les physiciens du XX° siècle était déjà au coeur de Qui es-tu Franz Haber ? qui est jouée au Théâtre de Poche Montparnasse, une pièce que je ne cesse de recommander.
La trahison d'Einstein commence sur les rives d'un lac. Philippe Labro faisaient se rencontrer et dialoguer Franz et Clara sur le ton de la confidence. Eric-Emmanuel Schmitt met en relation un vagabond et un intellectuel.
Einstein est alors en rupture avec la société. Pacifiste militant, il connaît les conséquences terrifiantes de ses travaux théoriques et craint qu’Hitler et les nazis ne fabriquent la première bombe atomique. Devrait-il renier ses convictions et prévenir Roosevelt, afin que l’Amérique gagne la course à l’arme fatale? Quel parti prendre alors que le FBI commence à le soupçonner, lui, l’Allemand, le sympathisant de gauche… le traître peut-être?
Dans cette comédie intelligente et grave, drôle parfois, Eric-Emmanuel Schmitt imagine le conflit moral d’un homme de génie, inventeur malgré lui de la machine à détruire le monde.
Ce lac est dans le New Jersey et nous sommes en 1934 où Eric-Emmanuel Schmitt fera se rencontrer pendant près de 20 ans le savant et un inconnu. Les questions fusent, autant sur cette scène imaginaire que dans la tête du lecteur-spectateur : ce vagabond est-il vraiment un sans abri ? Pourquoi nous sentons-nous si proche du savant ? Est-il acceptable de mettre de coté ses principes sur une étagère (p. 47) Le temps de réfléchir à la meilleure conduite à tenir ? La bombe atomique a t-elle fait perdre la paix à l'humanité ? (p. 97) Pourquoi la société des Nations n'a pas su jouer le rôle d'arbitre ?
Eric-Emmanuel Schmitt installe un univers quasi becketien, jouant avec le rapport que le savant entretenait avec le temps, estimant qu'il est peut-être raisonnable de se mettre à 18 heures quand il a rendez-vous à 17 (p. 30), ou encore qu'il n'est pas grave de dormir peu, du moment qu'on dorme vite (p. 85), comme il fait une allusion subtile à son bégaiement : jusqu'à 7 ans je redisais toutes mes phrases. Ça m'et resté? Ça m'est resté (p. 19). L'auteur défie aussi le tabou du savant inaccessible. Quand le vagabond prétend qu'il ne l'impressionne pas, Einstein répond du tac au tac : çà tombe bien, car moi non plus je ne m'impressionne pas.
Un humour très vif inonde les pages malgré un sujet (la bombe atomique) qui ne s'y prête guère. En toute logique : c'est la seule qualité qui doit se montrer absolue dans cet univers où tout s'avère relatif (p. 37).
On saute d'un registre à un autre : dramatique, comique, historique et même policier. Un brin de religion traverse le livre, le thème est cher à l'auteur. Etre physicien c'est chercher à connaitre les pensées de Dieu (p. 79).
Le livre installe le débat reprochant à la science de ne pas engendrer que des progrès pour la civilisation (p. 126) ainsi que celui de la culpabilité : j'ai toujours eu beaucoup de chiffres dans mon cerveau. S'y ajoutent aujourd'hui ceux des victimes (des bombardements nucléaires p. 132). La responsabilité est cependant collective, depuis Becquerel qui découvrit la radioactivité jusqu'à la mise au point d'Oppenheimer, on peut s'interroger sur le rôle exact de la lettre qu'Einstein adressa effectivement au Président Roosevelet le 2 août 1939.
Il est vrai, en tout cas, que la vie ressemble au vélo, il faut continuer à avancer si l'on ne veut pas perdre l'équilibre (p. 150).
Il est tout aussi juste qu' il est plus facile de désintégrer un atome qu'un préjugé (p. 110), on pourra, au choix ou selon son humeur du jour, lire la pièce comme une pure distraction ou une réflexion philosophique ... La vie, en apparence, n'a aucun sens et pourtant il est impossible qu'il n'y en ait pas un (p. 152) ...
Eric-Emmanuel Schmitt installe un univers quasi becketien, jouant avec le rapport que le savant entretenait avec le temps, estimant qu'il est peut-être raisonnable de se mettre à 18 heures quand il a rendez-vous à 17 (p. 30), ou encore qu'il n'est pas grave de dormir peu, du moment qu'on dorme vite (p. 85), comme il fait une allusion subtile à son bégaiement : jusqu'à 7 ans je redisais toutes mes phrases. Ça m'et resté? Ça m'est resté (p. 19). L'auteur défie aussi le tabou du savant inaccessible. Quand le vagabond prétend qu'il ne l'impressionne pas, Einstein répond du tac au tac : çà tombe bien, car moi non plus je ne m'impressionne pas.
Un humour très vif inonde les pages malgré un sujet (la bombe atomique) qui ne s'y prête guère. En toute logique : c'est la seule qualité qui doit se montrer absolue dans cet univers où tout s'avère relatif (p. 37).
On saute d'un registre à un autre : dramatique, comique, historique et même policier. Un brin de religion traverse le livre, le thème est cher à l'auteur. Etre physicien c'est chercher à connaitre les pensées de Dieu (p. 79).
Le livre installe le débat reprochant à la science de ne pas engendrer que des progrès pour la civilisation (p. 126) ainsi que celui de la culpabilité : j'ai toujours eu beaucoup de chiffres dans mon cerveau. S'y ajoutent aujourd'hui ceux des victimes (des bombardements nucléaires p. 132). La responsabilité est cependant collective, depuis Becquerel qui découvrit la radioactivité jusqu'à la mise au point d'Oppenheimer, on peut s'interroger sur le rôle exact de la lettre qu'Einstein adressa effectivement au Président Roosevelet le 2 août 1939.
Il est vrai, en tout cas, que la vie ressemble au vélo, il faut continuer à avancer si l'on ne veut pas perdre l'équilibre (p. 150).
Il est tout aussi juste qu' il est plus facile de désintégrer un atome qu'un préjugé (p. 110), on pourra, au choix ou selon son humeur du jour, lire la pièce comme une pure distraction ou une réflexion philosophique ... La vie, en apparence, n'a aucun sens et pourtant il est impossible qu'il n'y en ait pas un (p. 152) ...
La trahison d'Einstein d'Eric-Emmanuel Schmitt, Albin Michel, Janvier 2014
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