Un balcon sur la mer, c’est la petite phrase que l’éditeur a choisi de faire figurer sur la couverture, et cela pourrait en être le sous-titre.
C’est la marque de fabrique des Editions Héloïse d’Ormesson : cinq ou six mots pour mettre le lecteur sur la voie et lui donner envie d’ouvrir le roman.
Gilles Paris signe ici son 4ème roman, après Papa et maman sont morts, en 1991, puis Autobiographie d’une Courgette en 2002, Au pays des kangourous, paru en 2012, lequel a remporté de nombreux prix littéraires. A l’instar du héros qui s’interroge à propos de sa maman (p.114), les lecteurs fidèles pourront se demander, in fine, ce qu’aurait été la vie de Gilles Paris sans les livres.
S’il est toujours écrit du point de vue d’un petit garçon on sent tout de même que celui-ci commence à mettre les émotions à distance même s’il demeure sensible au malheur des gens qu’il aime.
Il possède une qualité essentielle, celle de savoir écouter, à laquelle l’auteur attribue un pouvoir magique (p.166).
Les adultes ont une épaisseur bien réelle, avec des personnages très typés et sympathiques comme cette baronne qui s’est adoucie après la mort de son mari et de ses enfants.
Le père est toujours immature, ce qui se retrouve dans nombre de romans appartenant à la littérature de jeunesse, comme dans la série Pauline ou la vraie vie de Guus Kuijer.
Néanmoins, au fil des pages, ce papa affrontera ses démons.
Gilles Paris se défend d’avoir écrit un livre autobiographique (de tous, ce serait celui-là qui le serait le moins affirme-t-il). Il n’empêche qu’il y a mis beaucoup de lui et des gens qu’il a rencontrés. Il est allé sur place en repérage à la résidence du Grand Hôtel du Cap-Martin, à Roquebrune, sur le périlleux chemin des douaniers qui surplombe la côte et lorsqu’il n’a pas pu entrer dans les villas où il fait pénétrer la bande d’enfants il a puisé dans le patrimoine cinématographique les images qui lui permettent d’être au plus près de la réalité.
Il donne en fin d’ouvrage les références sur lesquelles il s’est appuyé. J’ajouterai un film qui a été tant de fois programmé sur les chaines de télé qu’il en est devenu familier : le Château de ma mère, réalisé par Yves Robert en 1990 d’après Marcel Pagnol, avec lequel on trouvera de nombreux points communs.
Dans ce roman le rapport au temps est différent. L’action se déroule l’espace d’un été. Il m’a semblé que les phrases y sont courtes comme pour exprimer une certaine urgence. La météo est un élément qui compte, avec force pluies quasi tropicales et grondements de tonnerre.
Gilles Paris n’a rien perdu de son sens des formules. Comme celle-ci (p. 159) : il porte sa besace Nike sur le côté, très fier, comme si toute sa maison était rangée dedans, qui nous fera lui pardonner l’incartade sur le marché de Vintimille.
Un suspense psychologique s’installe progressivement, peut-être un peu trop lentement mais une fois que les questions essentielles seront posées (p. 164 : mais qui est le petit garçon sur la photo ? p. 191 : Tom et Nathan sont-ils des petits garçons normaux ?) il va bien falloir y répondre.
C’est Victor qui s’y attelle, du haut de ses neuf ans, avec le secours de quelques évocations magiques, parce que la vie sans magie serait "juste" la vie (p. 220) et en suivant le conseil de la baronne de se laisser guider par les lucioles (p. 168).
L’Eté des lucioles est un livre que l’on peut lire sans avoir besoin de croire aux fantômes ni au pouvoir surnaturel des lucioles ou des papillons. Il nous met en garde contre les secrets qui se cachent derrière les portes mais c’est aussi un roman qui donne envie de partir en vacances.
L'Été des lucioles de Gilles Paris, aux Éditions Héloïse d'Ormesson, janvier 2014
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