En général je donne dans la sobriété pour les intitulés de mes articles mais ce spectacle mérite une exception. On retrouve l'énergie (j'allais me laisser aller à ajouter "positive") de l'Augmentation, que j'avais vu il y a quelques années maintenant. Décidément, Anne-Laure Liégeois appartient au petit groupe des metteurs en scène qui renouvellent le théâtre, quel que soit le registre sur lequel elle travaille.
Après Édouard II et La duchesse de Malfi, elle a choisi MacBeth pour clore la trilogie qu'elle a entreprise sur le théâtre élisabéthain. Elle se dit fascinée par la puissance de l'écriture de Shakespeare pleine d’un humour incroyable et d’une humanité surprenante.
Sa direction d'acteurs et les images qu'elle fait surgir trois heures durant et sans entracte (bonne idée parce qu'on ne décroche pas de la magie) nous rendent la tragédie accessible, avec une résonance dans nos fantasmes contemporains, peut-être aussi parce que les costumes sont ceux qu'on porte aujourd'hui.
Ecrite en 1606, le sujet est inspiré de faits qui se sont déroulés en Écosse de 1040 à 1057, enrichis d'éléments surnaturels comme Shakespeare excelle à le faire. C'est la traduction d'Yves Bonnefoy qui a été retenue.
Selon la légende, prononcer le mot Macbeth dans un théâtre porte malheur. On en parle comme de "La pièce écossaise". Le duo infernal de Macbeth et de sa Lady n'a effrayé ni Olivier Dutilloy ni Anne Girouard qui sont deux comédiens indissociables du travail d'Anne-Laure Liégeois, le premier depuis 1992, la seconde depuis 2004. Anne est une fois encore à l'opposé de la Guenièvre de Kamelot où elle s'était fait remarquer. C'est peu dire qu'ils composent l'un comme l'autre un duo incroyable ... un peu à l'instar du couple qui interprétait toutes les facettes d'une relation avec Ring. Leurs postures sont toujours particulièrement étudiées.
La scénographie multiplie les sensations dès les premières secondes, avec Macbeth, s'ébrouant de joie, éclaboussant le premier rang en traversant la scène de Jardin à Cour sur les premières notes de l'Eté de Vivaldi. Il vient de combattre glorieusement et la fatigue est propice aux hallucinations.
L'apparition des trois Sorcières, à la chevelure flamboyante (Anne-Laure Liégeois est rousse elle aussi), dans une totale nudité à l'exception de bottes rouges vif est saisissante. La pénombre installe un contexte tragique, en tout cas jamais vulgaire ni complaisant.
Les belles prédisent à Macbeth, qui est prêt à tout croire, qu'il sera "sire de Cawdor" et même bientôt "roi".
En attribuant effectivement ce titre à celui qui n'était alors que "sire de Glamis" le roi Duncan ne se doute pas qu'il lance le compte à rebours de sa propre mort. Le spectateur situe l'action en Ecosse grâce à un petit détail vestimentaire, le port d'un kilt par un des personnages. La vision de toute l'armée en costumes trois pièces est absolument étonnante, évoquant des cadres sup dont les canines rayent le plancher des grandes entreprises.
Peu de flots de lumières dans la soirée. Nous sommes au coeur de l’obscurité de l’âme humaine. A l'exception de la scène de couronnement qui se vit sous une pluie d'or (on en aurait presque mal aux yeux), nous suivrons les intrigues dans une atmosphère entre chien et loup. Les couleurs viennent des musiques qui arrivent à point nommé. Comme la Lettre à Elise qu'Anne-Laure a voulu entendre revenir à chaque nouvelle mort.
Les métaphores et les double sens s'enchainent. On a frappé ... commente Macbeth en secouant ses mains rouges de sang.
Certaines répliques prennent un sens plus large ... Laver notre crédit dans des ruisseaux de flatterie ... Nous ne sommes que des enfants mais dans vingt ans nous prendrons dans nos mains notre avenir, nos lendemains ... Donne des mots à ta peine, la médecine est vengeance ...
Le drame est grandiose. Il nous fait réfléchir sur les conséquences d'une ambition démesurée, le poids du désir, l'exercice du pouvoir, le combat entre réalité et illusion, désirs, les relations de couple, la culpabilité, la soif de vengeance et le remords ...
Nous retiendrons plusieurs scènes. Macbeth se drapant dans la nappe en menaçant : va y avoir du sang ! La crise de somnambulisme de Lady Macbeth agitée comme une poupée automate. Le rapprochement du mur de fond, acculant Macbeth au bord du ruisseau, procurant le même effet qu'un zoom au cinéma.
Le cadavre de Banquo, effondré en bord de scène, alors que les invités festoient au second plan.
Macbeth sombrant lui aussi dans la folie et se roulant dans la boue. Et bien sur Lady Macbeth lavant obsessionnellement ses mains qu’elle imagine pleines de sang.
Des moments comiques aussi, comme le God save the king chanté avec le secours d'un iphone pour les paroles.
Les intermèdes musicaux sont brefs. Le son baisse en se poursuivant quelques secondes comme un écho. On entend parfois des cris de corbeaux, un galop de cheval, le hululement d'une chouette. François Leymarie a effectué un travail très juste.
Les costumes ont été conçus par Elisa Ingrassia en s'inspirant, pour Lady Macbeth, de l'univers de Grace Kelly. On peut aussi entrevoir des références à Fitzgerald. La fluidité des tissus autorise tous les mouvements et l'emploi d'un costume de théâtre (emprunté à la Comédie française) au dernier acte nous rappelle que renvoie au XVII°.
N'aurions pas nous aussi été sous le charme d'hallucinations ? Tout en connaissant le travail d'Anne -Laure Liégeois je ne me doutais pas de l'enthousiasme que ce spectacle allait provoquer. A tel point que j'ai très envie de le revoir.
L'apparition des trois Sorcières, à la chevelure flamboyante (Anne-Laure Liégeois est rousse elle aussi), dans une totale nudité à l'exception de bottes rouges vif est saisissante. La pénombre installe un contexte tragique, en tout cas jamais vulgaire ni complaisant.
Les belles prédisent à Macbeth, qui est prêt à tout croire, qu'il sera "sire de Cawdor" et même bientôt "roi".
En attribuant effectivement ce titre à celui qui n'était alors que "sire de Glamis" le roi Duncan ne se doute pas qu'il lance le compte à rebours de sa propre mort. Le spectateur situe l'action en Ecosse grâce à un petit détail vestimentaire, le port d'un kilt par un des personnages. La vision de toute l'armée en costumes trois pièces est absolument étonnante, évoquant des cadres sup dont les canines rayent le plancher des grandes entreprises.
Peu de flots de lumières dans la soirée. Nous sommes au coeur de l’obscurité de l’âme humaine. A l'exception de la scène de couronnement qui se vit sous une pluie d'or (on en aurait presque mal aux yeux), nous suivrons les intrigues dans une atmosphère entre chien et loup. Les couleurs viennent des musiques qui arrivent à point nommé. Comme la Lettre à Elise qu'Anne-Laure a voulu entendre revenir à chaque nouvelle mort.
Les métaphores et les double sens s'enchainent. On a frappé ... commente Macbeth en secouant ses mains rouges de sang.
Certaines répliques prennent un sens plus large ... Laver notre crédit dans des ruisseaux de flatterie ... Nous ne sommes que des enfants mais dans vingt ans nous prendrons dans nos mains notre avenir, nos lendemains ... Donne des mots à ta peine, la médecine est vengeance ...
Le drame est grandiose. Il nous fait réfléchir sur les conséquences d'une ambition démesurée, le poids du désir, l'exercice du pouvoir, le combat entre réalité et illusion, désirs, les relations de couple, la culpabilité, la soif de vengeance et le remords ...
Nous retiendrons plusieurs scènes. Macbeth se drapant dans la nappe en menaçant : va y avoir du sang ! La crise de somnambulisme de Lady Macbeth agitée comme une poupée automate. Le rapprochement du mur de fond, acculant Macbeth au bord du ruisseau, procurant le même effet qu'un zoom au cinéma.
Le cadavre de Banquo, effondré en bord de scène, alors que les invités festoient au second plan.
Macbeth sombrant lui aussi dans la folie et se roulant dans la boue. Et bien sur Lady Macbeth lavant obsessionnellement ses mains qu’elle imagine pleines de sang.
Des moments comiques aussi, comme le God save the king chanté avec le secours d'un iphone pour les paroles.
Les intermèdes musicaux sont brefs. Le son baisse en se poursuivant quelques secondes comme un écho. On entend parfois des cris de corbeaux, un galop de cheval, le hululement d'une chouette. François Leymarie a effectué un travail très juste.
Les costumes ont été conçus par Elisa Ingrassia en s'inspirant, pour Lady Macbeth, de l'univers de Grace Kelly. On peut aussi entrevoir des références à Fitzgerald. La fluidité des tissus autorise tous les mouvements et l'emploi d'un costume de théâtre (emprunté à la Comédie française) au dernier acte nous rappelle que renvoie au XVII°.
N'aurions pas nous aussi été sous le charme d'hallucinations ? Tout en connaissant le travail d'Anne -Laure Liégeois je ne me doutais pas de l'enthousiasme que ce spectacle allait provoquer. A tel point que j'ai très envie de le revoir.
Macbeth, de William Shakespeare, traduction Yves Bonnefoy
Mise en scène Anne-Laure Liégeois
Production du Festin
Avec 16 comédiens formidables
Jusqu'au 14 février sur la scène nationale de Malakoff
3 place du 11 novembre - 92240 Malakoff
01 55 48 91 00
La tournée se poursuivra du 24 au 28 févr. 2014 au Grand T de Nantes, le 04 mars à La Piscine de Châtenay-Malabry (92), le 18 mars 2014 à La Passerelle de Gap, les 20 et 21 mars 2014 au Cratère d'Alès, les 25 et 26 mars à la Maison de la Culture d'Amiens, le 28 mars à l'Entracte de Sablé sur Sarthe, du 01 au 03 avril au Théâtre de l'Union de Limoges et les 08 et 09 avril au Fracas de Montluçon.
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