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mercredi 13 janvier 2016

Les Indociles de Murielle Magellan chez Julliard

Les Indociles est un roman qui monte en puissance un peu à l'instar d'un opéra. Lentement, peut-être "trop", si bien qu'un lecteur impatient risque de sous-estimer le plaisir de lecture qui l'attend dans la seconde moitié.

Murielle Magellan a d’abord écrit pour le théâtre et la télévision. Pour le cinéma également. Elle a co-signé le scénario de Une famille à louer, avec Jean-Pierre Améris qui en a assuré la réalisation il y a quelques mois.

Son premier roman, Le Lendemain, Gabrielle, a paru en 2007 aux Éditions Julliard. A suivi Un refrain sur les murs (2011) et  N’oublie pas les oiseaux (2014), qui révélait beaucoup sur le sentiment amoureux.

Elle va encore plus loin avec celui-ci en s'écartant d'un contexte autobiographique au travers des parcours d’Olympe, Solal, Paul et Khalia, de New York à la villa Médicis, en passant par Paris bien sûr, le quartier gitan de Saint-Jacques à Perpignan, et jusqu’au Chili.

Olympe est une galeriste trentenaire, d’allure androgyne, bisexuelle, enferrée dans une posture de carnivore femelle (p. 90). Sur le plan amoureux c’est une chasseuse, une Don Juane qui ferait bien de se méfier de  la statue du Commandeur (p. 112). Ce n’est pas à proprement parler une sex-addict puisqu’elle est capable de rester chaste plusieurs semaines, mais elle s’autorise ce qu’elle appelle des élans qui n’ont pas seulement à voir avec le désir.

En matière d'art elle pourrait sembler amorale mais elle a un code d'honneur, même s'il est personnel.

Le roman commence et se clôture sur la musique de Bach. Mais Olympe apprécie tout autant Bashung. Elle est libérée de dieu et des dogmes, n’éprouvant ni spiritualité ni foi. Une douleur peut-être, et encore. (p. 30) Elle avait choisi de montrer à sa mère, comme exemple de ce qui lui plait, une toile de 1810, la Mère infortunée de Marie-Françoise Constance Mayer, exposée au musée du Louvre (ci contre).

Khalia, sa jeune assistante, d’origine gitane, est un buvard, une éponge intarissable (p. 98). Elle vendra un tableau, La Prisonnière à Paul, scientifique au cœur pur, marié et fidèle, avec qui elle va  accepter de tenter l’amitié. Il a été peint par un gitan de génie, aujourd’hui reclus. Solal est un peintre de la liberté qui a fini par peindre l’enfermement (p. 98) à qui Olympe va permettre de connaitre (enfin) la reconnaissance et de laisser une trace avec ses "crachats d’or fin" comme il le dit de ses œuvres. Tous les quatre sont des indociles.

Murielle Magellan nous en livre la définition au milieu du roman. Pour eux (p. 125) les succès et les échecs ne sont que les rebondissements d’une vie qui s’écrit chaque jour. Les tiroirs dans lesquels on voudrait les ranger ne ferment pas. Les indociles débordent. (…) Ils font dans l’ombre ou la lumière un chemin qui échappe à ceux qui ont besoin de repères. (…) Ce sont des étonnés. Des modestes. Des vibrants. Des aimants. Des souffrants aussi, souvent.

Je n'ai pas le sentiment de dévoiler excessivement le sujet en mettant cette citation en avant. Murielle Magellan maitrise en orfèvre l'art de la description et du rythme. Etre scénariste muscle sa plume. Si je résume vous y verrez de la cupidité, de l'affairisme, de l'égoïsme et de l'adultère alors que les Indociles ont une forte capacité à vous cueillir et vous emporter. Ils sont sublimes.

Les Indociles de Murielle Magellan chez Julliard, en librairie le 11 janvier 2016 

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