On peut voir, dans les galeries d’études, et suivant un parcours thématique, trois cents pièces emblématiques d'une collection de 400 000 œuvres échantillons de papiers peints, et qui est la plus importante réserve au monde et qui n'avait pas été montrée depuis 1967.
Le terme de papier peint, tel qu'on l'emploie aujourd'hui, renvoie à ce qu'il fut à partir du XVIII° siècle. Si on utilise le mot "tapisser" c'est parce qu'à l'origine il s'agissait d'embellir les murs de tapisseries, réalisées comme les tapis qui étaient posés sur les sols. Faire le mur fait humoristiquement référence à cette fonction d'ornementation d’une paroi murale.
En toute logique les premiers papiers peints vont imiter les tapis, les stucs comme de parfaits trompe l'oeil pour faire illusion à moindre frais. Ils ont toujours eu vocation à créer des univers et des ambiances.
Le papier peint à motif répétitif à bordures que l'on découvre en sur cette photographie installe une atmosphère napoléonienne d'époque puisqu'il date de 1810/1820. C'est un papier rabouté, fond gris brossé à la main, impression à la planche de bois, appartenant à la collection du musée. Celui qui se trouve devant est aussi une imitation de draperie à motif répétitif, également de la manufacture parisienne Joseph Dufour. Il date de 1808.
L'oeil ne sait pas où se poser en premier. Sur ces paons du papier central le Brésil 1862, manufacture Jules Desfossés ?
La première salle, au titre évocateur "Anoblir le mur", présente des pièces maîtresses, telles que les impressions en arabesque du XVIIIe siècle réalisées par la célèbre manufacture Réveillon (de couleur verte sur la photo ci-dessus) ou encore par des créations contemporaines du Studio Job comme ce Skeleton - collection The new Domestic landscape, qui est une impression numérique sur intissé bleu nuit, 2008
En respectant les normes esthétiques établies, le papier peint est non seulement un objet décoratif, mais il est plus généralement le reflet d’une culture et d’un art de vivre. Voici maintenant au centre un morceau de lé datant de1835, créé par Wagner, pour la maison Délicourt. Derrière, des motifs répétitifs datant des années 1870, imprimés en France ou en Allemagne.
Il s'agit de ce qu'on désignait sous le terme de dominos qui se cantonnent à la répétition de motifs élémentaires, fleurettes schématiques, ou fruits, réduits à un simple cercle orné d’une virgule, taches ordonnées par un réseau de tiges végétales. Ils furent typiques de l'art des XIV° et XV° siècles, initialement des images religieuses (des dominicus).
Cette porte est un trompe-l’œil de la maison Martin Margiela, intissé, impression numérique, 2010, superposée sur un papier contemporain lui aussi (2011) On a Bryck de Christophe Koziel tandis que les pierres et moellons que l'on remarque sur la droite sont de 1794, faits par Jacquemart et Benard.
La deuxième salle, "Imaginer le mur", met l’accent sur les genres artistiques inventés et réinterprétés au fil des siècles, avec des papiers peints tels que ceux d’André Groult, Émile-Jacques Ruhlmann, André Mare, René Fumeron et Léonor Fini. Ces œuvres évoquent certains savoir-faire traditionnels, mais également des approches novatrices offrant un nouveau souffle à la décoration d’intérieur.
On admire des perroquets des années 1925 ... ou de 2011 ou encore de 1912, comme ceux de Barbier George, de la Manufacture parisienne Alfred Hans Paris, un papier continu à pâte mécanique, fond brossé à la main noir, impression à la planche de bois.
Ils font face à une frise d'après un dessin de Henri Stephany, 1921. Plus loin ce papier peint à motif répétitif à raccord droit, Manufacture Paul Gruin, Paris, 1930, papier continu à pâte mécanique teinté gris, impression au cylindre qui évoque l'univers d'artiste comme les époux Delaunay.
L'exposition renvoie à différents courants stylistiques de l’histoire de l’art. L’étrusque, le néo-classique, le néo-gothique ou encore l’orientalisme, sont des références essentielles.
Les deux dernières salles réunissent des productions où le papier laisse place à d’autres matériaux. Le carton, le cuir, ou encore des substances métallisées, libèrent le mur des formes et des méthodes classiques. De nombreux créateurs participent au renouvellement des motifs, comme c’est le cas des éditeurs de Piero Fornasetti, Jean-Charles de Castelbajac et Christian Lacroix. Le papier peint n’est plus juste un ornement, il est une installation murale, jusqu’à même être une œuvre d’art à part entière.
Ces différents types de papiers sont, certes, les témoignages d’une richesse créative, mais ils sont avant tout des acteurs iconiques dans l’histoire des styles et des tendances, reflétant ainsi le goût et les mœurs d’une époque.
En parallèle, à l'étage du dessus, on découvre une exposition en quelque sorte complémentaire "Tissus inspirés", qui est un hommage à Pierre Frey et qui fera l'objet d'un billet spécifique.
Des ponts existent entre les deux. Comme cet origami de papier réalisé cette année par Kumi Yamashita et qui projette les ombres des collaborateurs de cette grande maison.
Faire le mur, Quatre siècles de papiers peints
Du 21 janvier au 12 juin 2016
Les Arts Décoratifs
107 rue de Rivoli
75001 Paris
01 44 55 57 50
Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 18h
Nocturne le jeudi jusqu’à 21 h pour les expositions temporaires
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