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dimanche 5 mars 2017

Stavanger au Studio Hébertot

Voilà un huis-clos qui nous plonge d’emblée dans une ambiance étrange, est-ce un rêve, un cauchemar, un peu des deux ?

L’avocate Florence Bernstein accueille chez elle un jeune homme, Simon, qu’elle vient de sauver du suicide. "Se coucher, c’est un acte ordinaire… sur des rails un peu moins mais avec une coupe de champagne, ça m’a intriguée".

Ils se font face, lui frigorifié, hagard, elle, sûre d’elle, curieuse de lui, maniant l’ironie avec dextérité. Ils ont en commun la solitude, des souffrances mal colmatées et … Stavanger, ville portuaire en Norvège. 

Le temps d’une nuit froide, ils vont faire connaissance, se cogner au passé, s’amadouer, se rejeter, se retrouver. On ne peut pas en dire beaucoup sur cette pièce afin de ménager l’effet de surprise final, Olivier Sourisse l’auteur y cultive le mystère et une certaine complexité. 

Florence est le maître du jeu. Sylvia Roux, tailleur pantalon noir et coupe de champagne à la main, domine à la perfection son rôle de femme ambigüe. Avec assurance, calme et habileté, elle pousse Simon vers des questionnements auxquels il répond du bout des lèvres. Lui qui est verrier et a la passion de la transparence reste opaque sur ce qui l’a poussé à de telles extrémités suicidaires. Le temps est habité de leurs confidences mais aussi de leur silence.

Thomas Lempire qui est dans la peau de Simon incarne magistralement le type noyé dans son angoisse. Son secret est trop lourd à porter mais il ne peut le livrer qu’avec parcimonie. Il a peur, peur d’elle, peur de lui-même : "Faut que je sorte, que je me protège". Ses éclats de colère et crises de panique laissent transpirer son immense trouble intérieur.

Florence essaye de plaisanter avec lui pour l’aider à se soulager de ce poids morbide qui le hante. Mais elle-même, tout en lui montrant ici et là qu’elle le devine, ne se dévoile qu’avec prudence. La mise en scène signée Quentin Defalt n’est pas là pour réchauffer l’atmosphère ! La pièce est quasiment plongée dans le noir. Au centre une grande table en métal noir avec un chandelier. Une "nappe sonore" revient régulièrement faire monter la tension : bruit de train sur les rails, la mort, ou celui d’un battement de cœur, la vie ?

Tous deux se cachent des choses et nous les cachent par la même occasion ! Qui sont-ils vraiment ? Beaucoup de pistes d’interprétation sont possibles, pourtant au fil de l’histoire, des révélations se font à tâtons dans le noir jusqu’à un dénouement assez inattendu…

Merci à Sylvia Roux et Thomas Lempire qui nous offrent une interprétation d’une grande justesse. Olivier Sourisse a écrit la pièce en trois semaines à l’impulsion juste pour eux. Elle est donc taillée à leur carrure de comédiens hors-pair. Les portraits sont lourds mais on s’attache aux personnages sans les juger. La pièce n’est pas une pièce simple, c’est un ovni théâtral qui vaut la peine d’être découvert. Et comme le dit Thomas Lempire : "Tout est écrit dans les mots, il y a juste à les ressentir."

Stavanger jusqu’au 29 avril 2017

Auteur : Olivier Sourisse
Comédiens : Sylvia Roux et Thomas Lempire
Mise en scène de Quentin Defalt.
Collaboration artistique d’Alice Faure. Scénographie d’Agnès de Palmaert.
Lumière d’Olivier Oudiou.
Création sonore de Ludovic Champagne.
Costumes de Mine Vergès.
Du mardi au samedi à 21h00 et le dimanche à 15h00
Sudio Hebertot :
78 bis Boulevard des Batignolles, 75017 Paris
Tel : 01.42.93.13.04
www.studiohebertot.com

Billet rédigé par Isabelle F.

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