Je comprends que le livre de Sophie Divry ait séduit. Il est mitonné avec les ingrédients qui font saliver le lecteur "moyen". Pardon de le souligner mais les épisodes sur la sortie de ce diable en collant résille version sado-maso et les dispositions typographiques à connotation sexuelle me laissent pensive. Franchement, il m'en faut davantage pour m'extasier.
Pour moi qui connais très bien ce sujet de la précarité et des tracasseries administratives (je dirais même plus, des violences institutionnelles) j'espérais un roman d'une autre stature. Qui soit de taille pour faire bouger les lignes. Je n'ai sans doute pas envie de rire de cela. J'aimerais qu'un auteur de son talent ne s'en amuse pas. Même si elle ne pouvait pas se douter que même ceux qui ont du travail se sentent en danger quand ils entendent les dernières déclarations ministérielles.
Certes elle dénonce un grand nombre des absurdités du système mais en ayant brodé un roman qu'elle même qualifie d'improvisé, interruptif et pas sérieux, elle éteint en quelque sorte le feu qu'elle a elle-même allumé. Néanmoins on devine qu'elle a mentionné cette assertion pour couper court à la critique en quelque sorte.
Le livre est organisé en trois parties. La première traite de la difficulté économique à être durablement au chômage. La situation équivaut pour l'auteur à défaire sa vie : ne pas pouvoir partir en vacances, divorcer, émigrer ... (p. 42) C'est ce qui s'appelle tirer le diable par la queue.
Elle s'y révèle championne toutes catégories en matière d'énumérations sur parfois trois-quatre pages. Elle est capable d'écrire des sortes de réquisitoires contre telle ou telle façon de penser. Et elle est aussi experte en terme de production de néologismes. Le plus drôle étant françoishollandiennement vieux (p. 219).
Dans la seconde partie elle convient que se bâfrer en famille est une des rares solutions quand on pointe (façon de parler) au chômage depuis plus de trois ans. Elle raconte fort bien l'humiliation de celui qui ne peut pas répondre à la question d'apparence anodine : alors quoi de neuf ?
Elle me donne envie de lui servir la blague qu'Anne Berest glisse dans Bellevue, son dernier livre. Si on vous interroge comment ça va demander si on veut une réponse en deux mots ou en trois. En deux mots : ça va. En trois mots : ça va pas.
La troisième partie se veut comme une forme de renaissance. La jeune femme recommence à travailler, certes en CDD mais tout de même. C'est peut-être parce que j'ai moi-même travaillé dans la restauration que j'ai vraiment beaucoup aimé sa manière si juste de raconter un service. la liste des tâches que l'on gère en parallèle est aussi plausible que drôle (p. 270).
Il y a de bonnes idées et Sophie Divry a du talent, ce que l'on sait depuis plusieurs années. Ses ouvrages en sont la preuve. Mais je conserve au final un avis mitigé.
Quand le diable sortit de la salle de bain de Sophie Divry, 20 août 2015
Livre chroniqué dans le cadre du Prix 2016 des lecteurs d'Antony
Pour moi qui connais très bien ce sujet de la précarité et des tracasseries administratives (je dirais même plus, des violences institutionnelles) j'espérais un roman d'une autre stature. Qui soit de taille pour faire bouger les lignes. Je n'ai sans doute pas envie de rire de cela. J'aimerais qu'un auteur de son talent ne s'en amuse pas. Même si elle ne pouvait pas se douter que même ceux qui ont du travail se sentent en danger quand ils entendent les dernières déclarations ministérielles.
Certes elle dénonce un grand nombre des absurdités du système mais en ayant brodé un roman qu'elle même qualifie d'improvisé, interruptif et pas sérieux, elle éteint en quelque sorte le feu qu'elle a elle-même allumé. Néanmoins on devine qu'elle a mentionné cette assertion pour couper court à la critique en quelque sorte.
Dans un petit studio mal chauffé de Lyon, Sophie, une jeune chômeuse, est empêtrée dans l’écriture de son roman. Elle survit entre petites combines et grosses faims. Certaines personnes vont avec bonté l’aider, tandis que son ami Hector, obsédé sexuel, et Lorchus, son démon personnel, vont lui rendre la vie plus compliquée encore. Difficile de ne pas céder à la folie quand s’enchaînent les péripéties les plus folles.S'il y a une chose sur laquelle on ne peut pas lui en vouloir d'avoir chercher à innover c'est sur le style. Et j'ai vraiment apprécié la liste des auteurs qui l'ont inspirée avec les pages correspondantes. Molière s'y retrouve avec Paul Claudel et même JK Rowling. C'est très intelligemment fait.
Le livre est organisé en trois parties. La première traite de la difficulté économique à être durablement au chômage. La situation équivaut pour l'auteur à défaire sa vie : ne pas pouvoir partir en vacances, divorcer, émigrer ... (p. 42) C'est ce qui s'appelle tirer le diable par la queue.
Elle s'y révèle championne toutes catégories en matière d'énumérations sur parfois trois-quatre pages. Elle est capable d'écrire des sortes de réquisitoires contre telle ou telle façon de penser. Et elle est aussi experte en terme de production de néologismes. Le plus drôle étant françoishollandiennement vieux (p. 219).
Dans la seconde partie elle convient que se bâfrer en famille est une des rares solutions quand on pointe (façon de parler) au chômage depuis plus de trois ans. Elle raconte fort bien l'humiliation de celui qui ne peut pas répondre à la question d'apparence anodine : alors quoi de neuf ?
Elle me donne envie de lui servir la blague qu'Anne Berest glisse dans Bellevue, son dernier livre. Si on vous interroge comment ça va demander si on veut une réponse en deux mots ou en trois. En deux mots : ça va. En trois mots : ça va pas.
La troisième partie se veut comme une forme de renaissance. La jeune femme recommence à travailler, certes en CDD mais tout de même. C'est peut-être parce que j'ai moi-même travaillé dans la restauration que j'ai vraiment beaucoup aimé sa manière si juste de raconter un service. la liste des tâches que l'on gère en parallèle est aussi plausible que drôle (p. 270).
Il y a de bonnes idées et Sophie Divry a du talent, ce que l'on sait depuis plusieurs années. Ses ouvrages en sont la preuve. Mais je conserve au final un avis mitigé.
Quand le diable sortit de la salle de bain de Sophie Divry, 20 août 2015
Livre chroniqué dans le cadre du Prix 2016 des lecteurs d'Antony
En compétition dans la catégorie Romans français avec Après le silence de Didier Castino, Un amour impossible de Christine Angot, Quand le diable sortit de la salle de bain de Sophie Divry, L'orangeraie de Larry Tremblay, et Ce pays qui te ressemble de Tobie Nathan.
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