Je fais une (petite) cure de littérature jeunesse. Si j'avais besoin d'un prétexte je dirais que c'est pour donner de bonnes idées de lecture aux ados histoire de les distraire un moment de leurs tablettes et autres objets connectés. Mais plus honnêtement je peux reconnaitre que lorsqu'un livre est bien écrit peu m'importe la cible.
Je peux m'extasier face à certains albums soit disant adressés à des enfants de moins de 5 ans. La justesse de ton de l'Arbre sans fin de Claude Ponti n'a pas d'égal pour aborder la mort avec un enfant. Comme Max et les Maximonstres de Maurice Sendak pour discuter avec lui des effets de la colère.
La couverture des Effets du hasard se veut sans doute attractive pour une cible ado. C'est toujours assez flashy chez Syros qui espère sans doute retenir l'attention et promettre une certaine facilité de lecture. Je ne suis pas convaincue et ce n'est pas ce qui m'a motivée (je dois convenir que si ce livre n'avait pas fait débat au cours d'une réunion du Comité lecture du Salon du Livre et de la Presse Jeunesse je n'aurais même pas songé à l'ouvrir).
Ce n'est que maintenant que je remarque le code barre après le nom de l'auteur, sans doute une allusion à la manière dont les parents choisissent leur progéniture sur catalogue. Dans ce meilleur des mondes post XX° siècle il est conseillé de commander son enfant en s'appuyant sur des caractéristiques physiques objectifs, comme la couleur des yeux, et surtout de tenter d'obtenir le meilleur investissement QI/Prix en tentant d'obtenir un enfant ultra intelligent.
On ne s'endette pas pour la vie en achetant une maison mais ... un bébé, que l'on veut parfait, cela va de soi.
En cas de déception, il est garanti qu'on peut rendre l'enfant qui sera en quelque sorte soldé à une autre famille. Dis comme ça le roman semble inhumain alors que cette fiction (ouf, c'en est une), racontée du point de vue d'une adolescente hypersensible, se découvre avec plaisir. Maïa a hautement raison de se demander (de nous interroger) sur la probabilité d'être plus heureux avec un QI d'au moins 132.
Les enfants craignent tous de ne pas être aimés pour ce qu'ils sont. Avoir des doutes sur sa filiation fait partie inhérente des questions existentielles de tous les adolescents.
Est-il vrai que plus on rêve, plus on est déçu ? Le processus d'attachement suit-il un schéma immuable ? Tomber amoureux peut-il être considéré comme une maladie bénigne de l'adolescence (p. 20) et se traiter en avalant quelques cachets ? Le sentiment amoureux est-il une addiction dont il faut se préserver ? (p. 45)
Tout en transposant ces questions dans un univers de science-fiction, Marie Leymarie nous fait partager les inquiétudes et les espérances de Maïa, Lily, Anthony. Elle pointe fort justement que pour développer son intelligence un enfant a d'abord besoin d'être aimé. Et elle revisite subtilement le vieil adage de nos parents : passe ton Bac d'abord !
Elle développe aussi une réflexion sur les conditions de vie et l'autonomie qu'on accorde (ou non) à la jeunesse: la liberté est ce qui nous rend humain, alors que la sécurité nous permet seulement de rester en vie (p. 114). Quelles sont les limites que l'on peut franchir par amour, ou par amitié comme va le prouver Lily en prenant de gros risques pour rendre service à Maïa.
Néanmoins les propos qui sont développés ne sont pas si éloignés d'une réalité qui se rapproche à grands pas. La politique sécuritaire rogne sur nos libertés. Des bracelets électroniques de plus en plus sophistiqués mesurent déjà toutes nos actions. Les médicaments "anti–amour" existent, même s’ils ne sont pas commercialisés. Les couples qui ont recours à la Gestation pour Autrui peuvent choisir leurs donneurs sur catalogue (y compris en Europe) et les dérives sont inquiétantes. Mais l'humain restera toujours imprévisible, justifiant le titre de ce livre qui est le dixième écrit par Marie Leymarie.
Née en 1974, l'auteure a suivi des études de russe. Elle a exercé le métier de documentaliste dans les cités de Seine-Saint-Denis et animé des ateliers d’écriture avec des élèves en difficulté. C'est au cours d’un congé parental qu'elle écrit son premier roman et devient traductrice d’anglais.
La couverture des Effets du hasard se veut sans doute attractive pour une cible ado. C'est toujours assez flashy chez Syros qui espère sans doute retenir l'attention et promettre une certaine facilité de lecture. Je ne suis pas convaincue et ce n'est pas ce qui m'a motivée (je dois convenir que si ce livre n'avait pas fait débat au cours d'une réunion du Comité lecture du Salon du Livre et de la Presse Jeunesse je n'aurais même pas songé à l'ouvrir).
Ce n'est que maintenant que je remarque le code barre après le nom de l'auteur, sans doute une allusion à la manière dont les parents choisissent leur progéniture sur catalogue. Dans ce meilleur des mondes post XX° siècle il est conseillé de commander son enfant en s'appuyant sur des caractéristiques physiques objectifs, comme la couleur des yeux, et surtout de tenter d'obtenir le meilleur investissement QI/Prix en tentant d'obtenir un enfant ultra intelligent.
On ne s'endette pas pour la vie en achetant une maison mais ... un bébé, que l'on veut parfait, cela va de soi.
En cas de déception, il est garanti qu'on peut rendre l'enfant qui sera en quelque sorte soldé à une autre famille. Dis comme ça le roman semble inhumain alors que cette fiction (ouf, c'en est une), racontée du point de vue d'une adolescente hypersensible, se découvre avec plaisir. Maïa a hautement raison de se demander (de nous interroger) sur la probabilité d'être plus heureux avec un QI d'au moins 132.
Maïa a les yeux noisette, les cheveux châtains, un petit nez légèrement retroussé et un QI de 117. Elle correspond en tous poinst aux critères choisis par ses parents sur catalogue, quinze ans plus tôt. Un soir, elle est abordée par Anthony, un garçon aux yeux verts. Maïa accepte de prendre un verre avec lui, bien qu’il lui semble beaucoup trop intelligent pour elle. Le garçon vit seul avec sa mère ... qui l'a fabriqué elle-même. La situation est impensable pour la jeune fille.Parce qu'on y traite la question du faux-semblant suivi dans l'espoir de toujours répondre aux attentes. Et c'est bien un aspect universel de la relation parent-enfant. Je me suis souvenue de ma fille me disant, à propos d'un échec à un concours : je sais que je t'ai déçue. Et moi de répondre : non tu ne m'as pas déçue, je suis déçue pour toi. (l'année suivante elle remportait ce concours haut la main)
Les enfants craignent tous de ne pas être aimés pour ce qu'ils sont. Avoir des doutes sur sa filiation fait partie inhérente des questions existentielles de tous les adolescents.
Est-il vrai que plus on rêve, plus on est déçu ? Le processus d'attachement suit-il un schéma immuable ? Tomber amoureux peut-il être considéré comme une maladie bénigne de l'adolescence (p. 20) et se traiter en avalant quelques cachets ? Le sentiment amoureux est-il une addiction dont il faut se préserver ? (p. 45)
Tout en transposant ces questions dans un univers de science-fiction, Marie Leymarie nous fait partager les inquiétudes et les espérances de Maïa, Lily, Anthony. Elle pointe fort justement que pour développer son intelligence un enfant a d'abord besoin d'être aimé. Et elle revisite subtilement le vieil adage de nos parents : passe ton Bac d'abord !
Elle développe aussi une réflexion sur les conditions de vie et l'autonomie qu'on accorde (ou non) à la jeunesse: la liberté est ce qui nous rend humain, alors que la sécurité nous permet seulement de rester en vie (p. 114). Quelles sont les limites que l'on peut franchir par amour, ou par amitié comme va le prouver Lily en prenant de gros risques pour rendre service à Maïa.
Néanmoins les propos qui sont développés ne sont pas si éloignés d'une réalité qui se rapproche à grands pas. La politique sécuritaire rogne sur nos libertés. Des bracelets électroniques de plus en plus sophistiqués mesurent déjà toutes nos actions. Les médicaments "anti–amour" existent, même s’ils ne sont pas commercialisés. Les couples qui ont recours à la Gestation pour Autrui peuvent choisir leurs donneurs sur catalogue (y compris en Europe) et les dérives sont inquiétantes. Mais l'humain restera toujours imprévisible, justifiant le titre de ce livre qui est le dixième écrit par Marie Leymarie.
Née en 1974, l'auteure a suivi des études de russe. Elle a exercé le métier de documentaliste dans les cités de Seine-Saint-Denis et animé des ateliers d’écriture avec des élèves en difficulté. C'est au cours d’un congé parental qu'elle écrit son premier roman et devient traductrice d’anglais.
Les effets du hasard de Marie Leymarie, Syros, en librairie depuis mars 2016
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