J'avais l'intention de profiter de mon séjour à Mexico pour revoir la Casa Azul, la maison natale où Frida Kahlo vécut avec Diego Rivera, devenue musée en 1958 à la mort de celui-ci (il y a presque 70 ans). Les files d'attente m'en ont dissuadée et je me suis "consolée" en me rendant dans un nouveau musée consacré à la famille Kahlo, inauguré il y a tout juste trois semaines.Baptisé Museo Casa Kahlo, il est installé dans la Casa Roja, ancienne demeure familiale de l’artiste après de gros travaux de rénovation et d'adaptation dont l'architecture a été confiée au Rockwell Group. Cette "maison rouge" est située à deux pas de la mythique "maison bleue" au 54 rue Aguayo, dans le quartier Coyoacán de Mexico et a ouvert ses portes au public le 27 septembre 2025.
C'est bien davantage qu'un musée parce que le parcours de visite est conçu comme une caisse de résonance où les expériences familiales, les émotions et les processus créatifs sont amplifiés. Chaque mur, chaque pièce et chaque patio retrace un mode de vie respectant l'intimité tout en favorisant l'expression artistique de Frida mais aussi de son père Guillermo Kahlo.On comprend au fil d'un parcours combinant des pièces originales et des ressources numériques (qui enrichissent le récit, tout en respectant l’esprit de la maison) comment l'art, la vie quotidienne et les relations familiales se sont entremêlés pour façonner un héritage universel.
Côté rue, les murs sont de couleur Terre de Sienne, en lien direct avec le nom de l'édifice. On rentre par une sorte de très large couloir qui servait autrefois de garage pour déboucher sur un patio qu’entouré la maison proprement dire. Je ne sais pas quelle était sa configuration exacte quand la famille Kahlo y habitait puisqu’un gros travail de muséologie a été effectué, et qui d’ailleurs a été effectué avec beaucoup de sensibilité.
Nous voici donc dans le patio aménagé en salle d’attente en plein air avec les bancs mexicains traditionnels peints couleur rouille installés autour d’un pamplemoussier qui se trouvait là depuis toujours. On annonce un temps d’attente de 10 minutes entre deux visites guidées mais ce n’est qu’approximatif puisque j’ai patienté presque trois quarts d’heure, que je ne regrette pas car la découverte était passionnante, y compris pour quelqu’un comme moi qui connait plutôt bien la vie de Frida Kahlo. Mais il est préférable de prévoir un livre ou de quoi patienter. Et second conseil, vous munir d’une "petite laine" parce que la climatisation est vraiment réglée au plus bas.
La visite démarre avec un mapping -conçu de manière ludique et inventive- qui reprend l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur Frida pour apprécier la visite. Comme vous le savez sans doute elle est née à Coyoacan et a eu plusieurs sœurs dont la plus importante fut Cristina, à la fois sa meilleure amie et sa rivale (elle a séduit son mari Diego Rivera, à moins que ce ne soit l’inverse).
C’est dans la maison qu’elle a occupée que nous nous trouvons et son empreinte est partout. D’ailleurs nous sommes accueillis par deux portraits immenses, de part et d'autre d'un grand écran sur lequel le mapping est projeté. A droite Cristina, à gauche Frida, à la Maison Aguayo, Auteur inconnu, vers 1947, Archives Isolda P. Kahlo (ci-contre).Un grand panneau nous explique que la maison fut d'abord habitée par Guillermo Kahlo et Matilde Calderón, les parents de Frida alors qu'elle s'installait temporairement avec son mari Diego Rivera dans la Maison Bleue.
Plus tard, cette adresse devint la demeure de Cristina, la sœur cadette de Frida. L'artiste y a également vécu en 1947. Après la mort de Cristina, la propriété a été léguée à sa fille Isolda. Elle appartient toujours à la famille Kahlo, qui l'a généreusement transformée en espace culturel.
La vidéo nous rappelle que Frida a été victime de la poliomyélite très jeune avant de subir à 18 ans le si terrible accident qui va handicaper sa vie adulte, et notamment l’empêcher de mener une grossesse à terme. Pourtant ce n’est pas le courage qui lui aura manqué.
Jeune adolescente, elle se déplaçait à bicyclette avec vigueur et elle a subi courageusement de multiples interventions chirurgicales. En conclusion une première phrase de Frida conclut le film : esta es tu casa, reprenant la formule de bienvenue si fréquente au Mexique affirmant que ma maison est ta maison.
Nous verrons d’autres citations, brodées au fil rouge sur les rideaux du couloir, comme Si quiero la luna, me la bajo yo solita (Si je veux la lune, je la décrocherai moi-même), Porque todo nace de una destruccion (Parce que tout naît de la destruction), Nada vale mas que la risa (Rien ne vaut le rire) …
Nous allons commencer par l’évocation de la cellule familiale, de sa mère Matilde dont on peut admirer une très jolie robe longue de dentelle blanche, et la figure paternelle de Guillermo qui influença tant la carrière artistique de sa fille.
Les parents de Frida se sont rencontrés à la bijouterie La Perla, où ils travaillaient et étaient de proches amis. Carl Wilhelm Kahlo Kaufmann est né en 1871 à Pforzheim, en Allemagne. Après le décès de sa mère, son père s'est remarié et le jeune homme a émigré en Amérique à l'âge de 18 ans pour tenter sa chance et commencer une nouvelle vie. Il a obtenu la nationalité mexicaine sous le nom de Guillermo et a travaillé pour plusieurs entreprises allemandes avant de se consacrer entièrement à la photographie.
Contrairement à ce qui a été dit, la mère de Frida n'était pas originaire d'Oaxaca. María Matilde Filomena Isabel Calderón González est née à Mexico en 1874 mais elle avait des origines indigènes. On voit une photo de leur mariage et le faire-part de la cérémonie (21 février 1898) apparait juste à coté la robe.
Physiquement, je leur ressemble à tous les deux. J'ai les yeux de ma mère et le corps de mon père. Frida Kahlo
La petite fille a manifesté très tôt un certain talent pour l’artisanat et tout ce qu’on peut faire de ses mains comme en témoigne cette petite tapisserie faite à l’âge de 5 ans.
La petite maison avec l'arbre, tapisserie en broderie à l'aiguille, par Frida Kahlo, vers 1912
Cristina était la seule des sœurs Kahlo à avoir des enfants. Frida éprouvait une profonde affection pour ses neveux, Isolda et Antonio, qui comblaient le vide familial qu'elle avait toujours désiré. Après le mariage bref et tumultueux de Cristina avec Antonio Pinedo, Frida, soucieuse du bien-être de sa sœur, l'aida à surmonter sa séparation. Elle la prit sous son aile, l'invita à vivre avec Isolda et Antonio à la Maison Bleue et la soutint financièrement en échange de petits boulots de bureau et de domestiques.
La guide ouvre un tiroir et fait apparaître une minuscule chaussure d’Isolda. Sur les panneaux on remarque une jolie photo de Frida entourée de sa nièce et de son neveu, en costume traditionnel. Et des poupées allemandes ayant appartenu aux enfants à côté d'un portrait d'Isolda Pinedo Kahlo exécuté au crayon par Diego Rivera, Sans date, Collection Isolda Pinedo Kahlo
Et puis cette très touchante carte écrite de la main de Frida : Ma douce petite Isoldita, Je t'offre ce bracelet pour que chaque fois que tu le portes, tu te souviennes que ta tante Frida t'aime de tout son cœur. Et comme symbole du jour où tu es passée de l'enfance à l'âge adulte.
On notera que l'affection d'isolda était symétriquement aussi forte. En légende d'une photo les représentant toutes deux on peut lire : Si je devais décrire ma tante Frida en quelques mots, je dirais qu'elle était aimante, courageuse, intègre, spontanée et généreuse.
On remarquera combien les échanges de lettres étaient ponctués de bisous. Pendant plusieurs années, Isolda et Antonio ont vécu chez leurs grands-parents, avec leur mère et leur oncle et leur tante, Diego et Frida, tandis que ces derniers faisaient régulièrement des allers-retours entre le Mexique et les États-Unis.
Lorsque Cristina accompagnait Frida lors de ses traitements médicaux, Isolda et Antonio étaient pris en charge par leurs tantes, qui leur prodiguaient amour et réconfort.
Bien que ses parents habitassent déjà à Aguayo, ils ne quittèrent jamais la Maison Bleue. Guillermo y conserva son studio de photographie jusqu'à son décès, tandis que Matilde s'occupait de la maison et des animaux pendant les séjours de Frida et Diego aux États-Unis.
Guillermo Kahlo était un photographe talentueux qui a immortalisé le patrimoine architectural mexicain à travers son objectif. Entre 1899 et 1900, Guillermo Kahlo entreprit son premier projet photographique : documenter la construction de la Casa Boker, qui abritait autrefois une quincaillerie allemande. Sous l’administration de Porfirio Díaz, il fut chargé de photographier des bâtiments, des monuments et des ouvrages publics.À l’occasion du centenaire de l’indépendance du Mexique, il fut chargé de documenter les temples et les églises appartenant à l’État fédéral, amorçant ainsi un long périple à travers le pays.
Le musée présente de nombreux clichés, dont celui de Porfirio Díaz, assez célèbre (ci-dessus) et quelques autoportraits. On peut admirer ses appareils qui sont de véritables pièces de collection et comprendre beaucoup de choses intéressantes sur les débuts de la photographie.
Homme à l’esprit vif, au caractère rigoureux et doté d’une grande sensibilité artistique, il était passionné par la nature, la philosophie, la poésie et la musique de Beethoven. Quand le travail de photographe se faisait rare et dans ses dernières années, il se consacra entièrement à la peinture, une activité qu’il pratiquait depuis sa jeunesse, en peignant des aquarelles et des huiles, reproduisant souvent des images de cartes postales, qu'il offrait à sa famille.
Nature morte aux mandarines, 20 mars 1938
Machine à broder
Charola de amapolas, 1924, la première peinture de Frida (plateau de coquelicots)
Frida a peint Plateau de coquelicots à l'adolescence, donc bien avant son accident, en cadeau pour sa tante Ana. Il est possible qu'elle se soit inspirée d'une estampe, semblable à celles que son père utilisait comme référence pour ses aquarelles. Cette œuvre de jeunesse révèle son intérêt pour les motifs naturels et préfigure les natures mortes que Frida peindra plus tard.
De toutes ses filles, Frida était celle avec qui Guillermo entretenait la plus grande affinité et la plus grande complicité. Ils partageaient un tempérament similaire et un amour de l'art. Son père fut sa première influence artistique. Dès son plus jeune âge, elle fut son assistante. Il lui apprit à retoucher et à coloriser des photographies, des compétences qui l'aidèrent sans aucun doute à développer un sens aigu du détail et un coup de pinceau précis qu'elle perfectionnerait au fil des ans.
À travers son objectif, Guillermo Kahlo a immortalisé à travers son objectif des moments précieux avec ses proches. Ses photographies constituent un témoignage inestimable qui a permis de reconstituer l'histoire de la famille Kahlo. La technique de Guillermo Kahlo était irréprochable. Il numérotait méticuleusement les plaques de verre afin de garantir un ordre chronologique précis. Il apportait le même soin à chaque étape du processus : de la préparation des négatifs à la prise de vue, en passant par le développement, le tirage, la retouche et le montage final des photographies, faisant preuve d'une maîtrise exceptionnelle. Il profitait souvent des réunions de famille pour photographier ses proches, et passait ensuite des heures dans son studio à développer et à réaliser des copies de ces clichés, qu'il distribuait ensuite à ses filles et à ses proches.
Une mise en scène astucieuse nous place en position de modèle devant un agrandissement du miroir de Frida et nous pouvons ensuite voir le cliché passer comme par magie d’un bac à un autre avant de sécher sur un des fils suspendus dans l’atelier de son père.
Ce miroir à cadre en bois, appartenait à Frida Kahlo. Elle a commandé plusieurs cadres de ce type pour certaines de ses œuvres, et nombre d'entre elles sont encore encadrées de cette manière. Son design intègre des éléments des retables du néo-baroque espagnol, avec de petits miroirs dans le décor, créant un effet de multiplication sur l'ensemble de l'œuvre. Tout au long de sa carrière, Frida a exploité à maintes reprises les notions de réflexion, d'image dupliquée et de dualité, non seulement comme ressource visuelle, mais aussi comme moyen d'explorer son identité.
Nous traversons ensuite la cuisine avant d'accéder à la salle à manger. C'est une pièce importante parce que les femmes de la famille Kahlo (à l'exception de Frida) étaient d'excellentes cuisinières pour qui la cuisine était le cœur de la maison, le lieu où commençaient les réunions de famille.
Les sœurs partageaient leurs recettes, et leurs cuisines étaient toujours bien fournies en molcajetes (mortiers et pilons), pots en terre cuite, cuillères en bois et autres ustensiles indispensables à la préparation d'une grande variété de plats. Elles étaient des hôtesses chaleureuses et créatives, aimant recevoir leurs proches, exprimant leur affection et leur attachement aux traditions mexicaines à travers des tables ornées de couleurs, de fleurs et de broderies.
La fresque de Frida qui court sur le mur du fond était une idée de Cristina. On peut lire dans une bannière bleue El Meson de los Guriones, sans doute un jeu de mots évoquant l'endroit comme l'auberge des moineaux, en référence au gorrión qui signifie une sorte de moineau (ou de colibri très vorace) dans le dictionnaire espagnol.
Sur le mur de droite, les oiseaux sont posés sur un pamplemoussier, comme l'arbre du patio.
Il ne manque rien. Ni un métate qui est une meule dormante de pierre, d'usage domestique, utilisée pour moudre des graines (ci-dessous à gauche). Utilisée depuis plusieurs milliers d’années dans l’aire culturelle de la Mésoamérique, son nom provient du nahuatl.
Ni le molcajete, un mortier et un pilon taillés dans la roche volcanique, indispensable pour préparer le guacamole (ci-dessous à droite). Cet ustensile de cuisine, l'un des plus anciens au monde, était utilisé par les Aztèques du Mexique pour moudre le maïs en farine.
Et on pourra même consulter deux pages d'un livre de recettes d'Adriana Kahlo, 1930.Dans la salle à manger, les murs accueillent un nouveau mapping, offrant l'occasion d'une évocation du séjour de Frida et Diego à San Francisco et à Détroit, comme de la maison de San Angel.
Chaque objet présenté a appartenu à la famille. Assiettes et nappe brodée sont typiques de l'époque.
On peut lire sur le mur (à gauche) de chaque coté d'une nature morte au crayon : Buvez et n'oubliez pas Dieu.
Entre 1930 et 1933, les sœurs Kahlo et leurs parents ont correspondu avec Frida, alors qu'elle vivait aux États-Unis. La famille se réunissait dans la salle à manger pour discuter des nouvelles que Frida leur envoyait par ses lettres. Malgré la distance, ses sœurs restaient proches et se tenaient au courant de la vie de Frida. Elle leur racontait son expérience à l'étranger et son état de santé, tandis que Matilde, Adriana, Cristina et leurs parents lui donnaient des nouvelles de la famille au Mexique.
L'éloignement de Frida et sa santé fragile inquiétaient beaucoup sa famille au Mexique, qui lui envoyait souvent des messages, des photos et des recettes de remèdes maison, impatiente de la revoir. Plusieurs sont très touchantes.
La salle de bains offre un aperçu de l'intimité quotidienne de la famille Kahlo et des rituels de soins qui ont marqué leur histoire : onguents, flacons de lotion et savons côtoient des médicaments comme le Demerol, témoin des luttes constantes de Frida contre la douleur.
Guillermo, son père, souffrait d'épilepsie et était sujet à des crises nécessitant une intervention immédiate, tandis que Matilde, sa mère, endurait des douleurs intenses dues à des calculs biliaires. Dans ce lieu, ils trouvaient l'intimité dont ils avaient besoin dans leurs moments les plus vulnérables.
Une parole au-dessus de la baignoire signée Frida : Si je pouvais te donner une chose dans la vie, je te donnerais la capacité de te voir à travers mes yeux.
Traverser la chambre de Cristina permet de rappeler qu'elle était la sœur la plus attentionnée que Frida aurait pu avoir. Dès l'enfance, leur lien était marqué par une profonde complicité, un amour inconditionnel et un soutien indéfectible. (il faut rappeler qu'elles n'avaient que 11 mois d’écart).
Frida a subi de nombreuses opérations chirurgicales au cours de sa vie, et Cristina l'a accompagnée et soignée avec dévouement lors de plusieurs de ses convalescences. En 1946, après une opération à New York pour corriger sa colonne vertébrale, sa "Chaparrita (Shorty)", comme elle appelait affectueusement, Cristina, est venue à son chevet pendant des mois, lui prodiguant les soins médicaux et le soutien moral dont elle avait tant besoin.
Une fois de plus une lettre de Frida confirme leur attachement. Elle est reproduite à grande échelle sur le mur de la chambre, côté lit.
Cristina assumait d'autres responsabilités que de veiller sur la santé de sa soeur, comme relever son courrier, faire des courses et la conduire à différents endroits. De son côté, Frida était un soutien financier et moral précieux pour sa sœur, l'aidant à surmonter les difficultés et lui offrant, ainsi qu'à ses enfants, un foyer stable.
J'ai été frappée par la similitude du plafond avec celui observé dans la maison du photographe Manuel Alvarez Bravo, visitée il y a quelques jours.
Carte de félicitations envoyée par Frida à sa soeur Cristina pour le jour de la Fête des mères le 10 mai 1948
Frida était connue aussi pour éprouver une profonde admiration pour l'art populaire mexicain qui se reflétait au quotidien. Elle portait une variété de vêtements provenant de différentes régions du Mexique, complétés par des coiffes de fleurs, des colliers de perles préhispaniques et des bijoux artisanaux. Sa présence singulière captivait les personnes qu'elle connaissait.
Frida portait également de longues jupes ou des jupons pour couvrir sa jambe droite, courte et fine en raison de la poliomyélite dont elle souffrait depuis son enfance. Certains chemisiers amples lui permettaient de masquer les corsets orthopédiques, qui, selon les indications médicales, devaient être portés.
La garde-robe de Frida regorge de vêtements brodés au point de chaînette, comme sur la robe de gauche. Cette technique de broderie est réalisée à la machine à coudre, qui passe de façon répétée en diagonale ou verticale sur le tissu, créant ainsi des chaînes de fils qui se chevauchent et forment des figures géométriques complexes.
Frida admirait en effet la façon dont les femmes de l'isthme de Tehuantepec s'habillaient. Bien qu'elle n'ait jamais visité cet endroit, elle en a adopté les vêtements traditionnels. Dans sa tenue de tous les jours, elle combinait souvent des vêtements de différentes régions, créant ainsi un style unique. La robe de Tehuana (à droite) se compose d'un chemisier court ou huipil, d'une jupe ou jupon, d'un jupon et d'un volant qui orne l'ourlet de la jupe.
Ce type de blouse, ou huipil, est un vêtement traditionnel porté par les femmes de la région zapotèque de l'isthme de Tehuantepec. Il existe des versions pour le quotidien et d'autres pour les grandes occasions, comme celle-ci en velours vert, datant de 1950 en tissu industriel, broderie machine (collection Paola Kahlo). De forme carrée ou rectangulaire, elle se distingue par ses fleurs brodées à la main.
Ce chemisier en coton (Collection Isolda P. Kahlo) est délicatement orné de perles de verre colorées, appelées chaquiras. Il a été brodé avec une grande habileté par les femmes nahuas de la communauté de San Gabriel Chiles, dans la Sierra Negro de l'État de Puebla.
A gauche, ce huipil Guinda (terme signifiant brodé de fleurs), toujours de l'époque 1950, a été confectionné à Juchitán, dans l'État d'Oaxaca, à partir d'un coton très doux surnommé "peau d'ange". Sa broderie, dite "plumeado", doit son nom à la disposition des points, qui imitent la texture des plumes d'oiseaux et mettent en valeur les fleurs et les feuilles brodées.
Un mur entier est couvert de vitrines exposant des bijoux portés par Frida. Elle les utilisait comme un puissant moyen d'exprimer et d'affirmer son identité mexicaine. Elle portait fièrement de grands et lourds colliers composés de pièces préhispaniques. Ce collier était l'un de ses préférés ; il est composé de matériaux tels que l'os, la coquille, le corail, la jadéite et la calcédoine.
Nous descendons alors au sous-sol (le sotano) par un escalier un peu raide. Cet espace était le secret le mieux gardé de Frida Kahlo. Un lieu accessible uniquement à ceux qu'elle jugeait dignes de partager son intimité la plus profonde. Elle pouvait y passer des heures, voire des jours, à peindre, écrire, écouter de la musique ou simplement à réfléchir. C'était l'un des lieux les plus personnels et les plus importants de sa vie. Il lui offrait le calme, une distance avec son environnement et la liberté d'être seule avec elle-même.
Frida avait transformé l'endroit et y avait installé une sorte de refuge sacré, peuplé d'objets qu'elle collectionnait, tels que des ex-voto, des insectes naturalisés, des idoles et des poupées achetées dans le quartier chinois de San Francisco.
Ex-voto de Frida Kahlo, Huile sur métal, Collection Isolda P. Kahlo
Parmi les documents conservés dans les archives de la famille Kahlo figurent diverses lettres que Frida a écrites à ses proches, ainsi que celles qu'elle a reçues d'eux. Lors de ses séjours loin du Mexique, Frida a en effet entretenu une correspondance suivie avec sa famille, ce qui lui a permis de rester informée de leur vie. Elle se souvenait toujours des dates importantes et aimait envoyer des mots tendres. On lui écrivait en retour avec affection, témoignant du lien profond qui les unissait. Les lettres présentées ici nous offrent un aperçu de son univers.
Un des derniers thèmes traités dans la Casa Roja concerne l'activité d'enseignante de Frida dont les élèves, plus d'une centaine, étaient connus sous le nom des "Fridos. Arturo Estrada, Guillermo Monroy, Arturo García Bustos et Panay Rabel comptaient parmi les plus dévoués. Guillermo Monroy en a dessiné le portrait, le 8 décembre 1976, encre sur papier (collection d'Isolda).
C'était une enseignante pleine de vie et de joie, et cela se voyait à quel point elle aimait enseigner. L’influence de Frida fut si profonde qu’elle marqua durablement leurs vies et leurs carrières. Après la mort de leur professeure en 1954, les "Fridos" conservèrent des liens étroits avec la famille Kahlo, notamment avec sa sœur Cristina et sa nièce Isolda. Un film fait revivre l'intensité de cette période.
Isolda Pinedo Kahlo, la nièce bien-aimée de Frida (représentée ci-dessus sur une huile sur toile de sa collection personnelle, peinte par Artaro Estrado en 1957), a soigneusement préservé une collection qui raconte l'histoire familiale, une tâche que ses descendants poursuivent en faisant vivre cet héritage au sein du musée.
La dernière pièce est consacrée à une mission à laquelle Cristina tenait plus que tout : J'ai dû me battre pour élever mes enfants, et il y a quelques années, alors que je dînais avec des amis dans un de ces restaurants chics, j'ai pensé à ceux qui n'ont rien à manger. J'ai alors décidé de ne plus jamais remettre les pieds dans un établissement de luxe et de consacrer mon argent et celui de mes amis à aider les femmes qui en ont le plus besoin.
Des photos, des citations et un film retracent ses actions. C'est dans la maison Aguayo que Cristina Kahlo, avec un profond engagement, a lancé en 1952 le projet social connu sous le nom de "La Ayuda" (L'Aide). Cette action, qui a finalement bénéficié à plus de 500 mères célibataires – des femmes qui élèvent et prennent soin seules de leurs enfants, sans partager ces responsabilités avec un partenaire – visait à leur distribuer une fois par semaine des produits alimentaires et d'entretien de première nécessité afin d'alléger leurs difficultés financières.
Cristina a recherché avec un dévouement inlassable, le soutien de particuliers et d'entreprises pour financer "La Ayuda". Sur le portail de la maison de Cristina Kahlo, au 22 rue Aguayo, à Coyoacán, on pouvait lire, écrit au crayon et en minuscules : "Vive la coopérative ! Que Dieu la bénisse pour les œuvres de charité qu’elle accomplit."
La devise du projet était : "Nous aidons les mères et leurs enfants sans ressources." Chaque femme possédait une carte d’identité. Parfois, Cristina leur fournissait l’argent nécessaire pour se faire photographier, car beaucoup n’en avaient pas les moyens. Une fois par semaine, les mères bénéficiaires se rendaient à la maison du 22 rue Aguayo pour récupérer les paniers de nourriture préparés par Cristina et son équipe. Ces femmes ne venaient pas seulement de Coyoacán, mais aussi d’autres quartiers comme El Peñón, Tacubaya, Portales, La Villa, Mixcoac et Colonia 20 Novembre.
On remarquera sur cet appel à l'aide deux mains en position de coupe, ressemblant curieusement à l'emblème du Refettorio parisien.
Enfin une boutique propose des objets de qualité, qui auraient sans doute été approuvés par Frida, comme ce plat spécifique en laine …
Aguayo 54, Colonia Del Carmen Alcaldía Coyoacán - Mexico
Du mercredi au lundi de 9 à 19 heures. Mardi : Fermé.
Visites guidées toutes les 10 minutes entre 9h 00 et 16h 50 j’ai attendu 45 minutes). Visites gratuites de 17h 00 à 18h 00.
Billets uniquement en ligne





















































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