J’ai beaucoup aimé un album de BD futuriste dont le titre, Paris 2119, situe l’action dans un monde où les drones et les hologrammes ont envahi les espaces, publics comme privés, et font désormais partie du quotidien.
Je ne sais pas si les auteurs en ont eu conscience mais cet album pose une problématique très actuelle, celle des puisqu’on entend s’élever des protestations des écologiques à l’égard des vols long-courriers.
On peut lire qu’on a en effet rendu accessible au XX° siècle le voyage à tout le monde et plus seulement aux riches. Mais avec la croissance de la pollution, et la menace pour la planète, on a inventé au XXI° siècle la culpabilité du voyage.
En conséquence, la plupart des parisiens ont opté pour des cabines Transcore qui leur permettent de se téléporter individuellement au bout du monde en quelques secondes. Très pratiques puisqu’il y en a à chaque coin de rue.
Par contre, les marginaux et les pauvres (mais aussi les nostalgiques) utilisent toujours le métro bien qu’il soit devenu insécure parce qu’il est essentiellement squatté par les laissés-pour-compte.
Et comme chaque habitant a été implanté d’une puce pour être géolocalisé H24, suivre -et surveiller- leurs déplacements est donc banalisé.
C’est Philippe Chappuis qui a conçu le scénario et le story board. On connaît cet auteur suisse sous le pseudo de Zep, pris en hommage à Led Zeppelin qui est son groupe préféré. La plus célèbre de ses bandes dessinée, lancée en 1992 avec les éditions Glénat, raconte les aventures de l’irrévérencieux Titeuf.
Aujourd’hui il collabore avec un autre éditeur, Rue de Sèvres, et l’album conçu avec Dominique Bertail est aussi particulier qu’original. Il a créé le personnage de Tristan qui rejette la déshumanisation de ce nouveau monde. Le jeune homme ne craint pas de passer pour un marginal en continuant à prendre le métro et à marcher dans les rues, contrairement à sa compagne Kloé, adepte de la téléportation intercontinentale, bien que ses voyages lui donnent mal à la tête.
D’autres faits inquiétants surviennent. Une femme, en particulier, émergeant hagarde d’un Transcore, éveille les soupçons de Tristan. Que leur cache-t-on ? Ce moyen de transport est-il sans danger ? Servirait-il des intérêts malveillants sous couvert de progrès ?
Sous la plume de Bertail, la Ville Lumière apparaît comme une cohabitation de quartiers délabrés dans un Paris musée transformé par un art brut qui a mal vieilli. Pourtant, quelques éléments de notre siècle actuel perdurent encore, tel que le métro ou l’Eurostar. Et on reconnaît des endroits emblématiques qui font le charme de la capitale, comme les passages couverts, le Marché aux puces, la place de l’Étoile et plus furtivement la Tour Eiffel et le Trocadéro.
J’ai aimé les dessins, l’harmonie des couleurs, certes souvent sombres mais élégantes, avec des tonalités de bleus qui revisitent le noir et blanc, tout en conservant la connotation polar.
Dans cette ambiance rétrofuturiste on ressent une certaine angoisse mais quelques plages d’espoir apparaissent ... notamment avec la subsistance d’arbres protecteurs et quelques éditions rares de livres de papier.
Cette bande dessinée nous interrogent en tout cas sur l'avenir qui se profile.
Paris 2119, de ZEP et Bertail, aux éditions Rue de Sèvres
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