Je suis impressionnée par le palmarès de Paul Saint Bris en découvrant que son (premier) roman L’allègement des vernis a déjà reçu plus de vingt prix littéraires dont le prestigieux (et futur défunt) Prix Orange du Livre, créé en 2009.
Mon intérêt provient surtout du fait qu’il s’agit d’un premier roman et que le chantier de rénovation des peintures de Notre-Dame a stimulé mon intérêt pour ce sujet. En outre les tableaux sont manifestement une forte source d'inspiration pour les écrivains, comme en a témoigné l'excellent ouvrage de Camille de Peretti, L'inconnue du portrait. Il faudrait aussi citer Grégoire Bouillier (Le syndrome de l’Orangerie) et Thomas Schlesser (Dans les yeux de Mona). D’autres encore peut-être.
L’héroïne de L’allègement des vernis est La Joconde, en italien La Gioconda. Encore désigné sous les noms de Monna Lisa, ou Portrait de Monna Lisa, ce tableau a été peint par Léonard de Vinci entre 1503 et 1506 ou entre 1513 et 1516, et peut-être jusqu'à 1517. Il représente un portrait mi-corps, celui de la Florentine Lisa Gherardini (p. 204), épouse de Francesco del Giocondo, sur un panneau de bois de peuplier de 77 × 53 cm, exposé au musée du Louvre. C’est l'un des rares tableaux attribués de façon certaine à Léonard de Vinci.
Ces gens ne viennent que pour elle. Pour elle, ils ont fait le tour de la terre , parfois ils ne connaissent qu’elle et cela leur suffit. (…) Elle est l’art, sa figure incarnée. Ils la miment, la copient, l’adulent ou la détestent. Ils n’en détournent jamais le regard (p. 45). Aurélien n’en fait pas mystère. Le directeur du département des Peintures du Louvre préfère de loin les peintures d’un autre italien de la Renaissance, Andrea Del Sarto (1486-1530).
Il n’occulte pas la querelle politique a propos de sa présence dans les collections françaises en nous rappelant que ce tableau n’a jamais été livré à son commanditaire. Il voyagea à dos de mule avec Leonardo quand il rallia Le Clos Lucé pour rejoindre François 1er (p. 211) qui l’avait très probablement acquis. Il revient à plusieurs reprises sur son histoire en s’arrêtant longuement sur son vol en août 1911, qui lui aussi est véridique.
La crise pandémique a participé à la baisse de fréquentation des musées, c’est un fait connu. Malgré une notoriété planétaire, le phénomène a touché la belle dame en ralentissant la venue de visiteurs étrangers à Paris. Paul Saint-Bris s’appuie sur cette vérité pour monter une fable autour de la nécessité de la restauration du plus célèbre des tableaux de ”notre” patrimoine. Car la vieille dame baigne dans une marée verdâtre. D’où la suggestion de procéder à un allègement de ses vernis ( p 46) en conclusion d’implacables arguments marketing.
L’idée est portée par la nouvelle présidente du Louvre, une certaine Daphné, dont Aurélien a trouvé un air de ressemblance avec le Portrait d’une jeune femme de Lubeck tenant un œillet de Jacob van Utrecht. ( p 29). Cette femme énergique, d’un pragmatisme désinhibé, adepte du nudge, technique de management visant à suggérer le changement plutôt que l’imposer (p 28), rompue à l’exercice des médias, voudrait faire croire qu’avant elle le musée était à l’âge de pierre. Sois le maître et le sculpteur de toi-même, telle est la devise qu’elle a emprunté à Zarathoustra (p. 28).
L’homme sera-t-il assez audacieux pour supporter la pression et s’attaquer à l’ultime chef-d’œuvre ? Sa personnalité intense et libre nous le laisse croire. Face à Monna Lisa, l’Italien va confronter son propre génie à celui de Vinci, tandis que l’humanité retient son souffle…
Paul Saint-Bris a conçu un roman qui navigue entre plusieurs styles, à la frontière du polar et de la fantaisie, pour se moquer du monde de l’art et donc des artifices en tous genres, qu’ils soient d’ordre social (à travers le personnage de Claire, la compagne d’Aurélien), entrepreneurial (à travers Daphné et les multiples sociétés d’études et de conseil), marketing, car le parcours pédagogique de l’exposition Raviver la Joconde, ambition et technique d’une restauration, peut-être trop scientifique et difficile d’accès ne réussira pas à attirer le public et se conclure à par un flop (p. 257), qu’également mégalomaniaque (à travers Gaétano), ridiculisant au passage les procédés de surveillance par caméras électroniques dont il souligne l’intérêt comme leurs limites. Avec parfois un humour franchement ironique dont les artistes font les frais, à l’instar de Buren qui, dans la cour du Palais-Royal, à la porte du ministère de la culture, aurait créé le meilleur terrain de chat perché au monde (p. 122).
Il en profite aussi pour déplorer la diminution de l’intérêt des jeunes générations pour la culture et l’appauvrissement de leurs connaissances si bien que, bientôt, les références connues aujourd’hui leur feront cruellement défaut (p. 99).
Considérant que Monna Lisa a fait l’objet de multiples déclinaisons commerciales j’ai choisi d’illustrer cet article par l’affiche ”She si Mona”, à prononcer Cheese Mona, que j’avais remarquée lors de ma visite du Musée vivant du fromage.
De 42 cm x 59,4 cm (format standard A2), elle représente La Joconde tenant en ses bras trois fromages d'exception : Le Persillé de Tigne, le Bleu de Termignon, et l'Abondance.
Je signale que l’impression est faite sur un papier mat couché de 170 g/m², pour assurer une qualité visuelle élevée. Le papier, issu de forêts gérées durablement, allie respect environnemental et rendu esthétique. Un vernis UV sans solvant recouvre l'affiche, offrant une protection renforcée contre l'usure et le frottement, assurant ainsi une longévité accrue et un toucher agréable.
Son auteur promet qu’avec ses couleurs dominantes marron vert, cette affiche apportera une touche d'élégance et de caractère à tout espace de vie ou de travail. Ces mots, qui reprennent la description du produit auraient pu avoir été écrits par l’auteur du roman, prouvant la minceur entre la fiction et la réalité.
L’allègement des vernis de Paul Saint Bris, chez Philippe Rey, en librairie depuis le 12 janvier 2023
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