Woman at War est présenté comme une comédie alors que je verrais plutôt ce film comme une tragédie en raison du sérieux du sujet (même si effectivement le traitement ne manque pas d'humour, loin de là). Il est certes difficile de le classer dans un genre bien spécifique sauf à inventer celui de thriller écologiste. Il est sûrement un peu de tout ça, finalement.
Il est formidablement interprété, a été tourné au cours de l'été 2017 en Islande (et en Ukraine), dans de magnifiques paysages encore naturels, et s'accompagne d'une bande musicale mélodieuse et envoutante. Il a reçu de nombreuses distinctions, amplement méritées.
Benedikt Erlingsson est un réalisateur, auteur et acteur islandais, très connu dans le monde du théâtre. Son premier film, Des chevaux et des hommes, a reçu plus de vingt récompenses internationales.
Avec ce second long métrage il démontre une fois de plus que les droits de la nature doivent être considérés au même niveau que les droits de l'homme et doivent être défendus par des lois nationales, inscrites dans toutes les constitutions, et par des lois internationales. Alors que la France ne se distingue pas suffisamment dans la sauvegarde de l'écologie on peut malgré tout se réjouir que Woman at war soit une coproduction franco islandaise.
L'actrice principale, Halldora Geirhardsdottir, est elle aussi une célébrité dans son pays. Elle y est connue pour s'être inventé une sorte d'alter ego, un macho abruti avec lequel elle est devenue culte sur la scène théâtrale. Benedikt la connait très bien et on ne peut pas voir de hasard dans le nom qu'il a donné au personnage principal, Halla, qu'il dote ... d'une soeur jumelle, bien entendu interprétée par l'actrice.
Ce personnage est très attachant. C'est une femme forte, qui a des convictions (on remarque chez elle des portraits de Mandela et de Gandhi). On la voit ne pas ménager ses efforts pour braver les éléments et réussir son sabotage. Elle cumule des qualités de coeur avec un courage et une force hors du commun. On admire la performance de la comédienne qui court, tire à l'arc, nage dans l'eau glacée (hormis l'épisode où elle se réchauffe dans un geyzer) et pratique le Tai Chi comme si elle avait fait cela toute sa vie.
J'allais oublier de mentionner qu'à la ville la "femme des montagnes" (c'est le nom par lequel elle signe ses revendications) est cheffe de choeur, ce qui est une double mise en abîme dans ce film musical où Halla ne fait pas "chanter" que les membres de sa chorale.
Quant à Woman on remarquera d'une oreille attentive que c'est (aussi) le nom de la petite chienne du cousin, et que celle-ci joue un rôle déterminant dans l'affaire.
Le spectateur est ainsi confronté à une multitude de paradoxes. En premier d'avoir choisi un pays froid pour dénoncer le réchauffement climatique. En l'occurrence un des endroits qui demeurent encore un peu préservé. Les images y montrent une nature particulièrement sauvage. Ensuite lorsqu'Halla annonce une confession et la réalisation du rêve de sa vie son ami pense qu'il va être question de son acte de bravoure, mais ce sera tout autre chose.
Sa détermination semble sans faille jusqu'à ce qu'une petite fille vienne ébranler ses convictions. La faille de Halla est de ne pas avoir d'enfant. Elle est candidate à l'adoption depuis longtemps et on lui propose d'aller en Ukraine chercher une petite fille. Cela suppose de prendre l'avion et de se soumettre au test ADN qui a été instauré pour piéger la "terroriste" qui a fait sauter le pilone.
Outre le thème central posant la question de la méthode à employer (terrorisme, activisme, lobbying ...) pour faire avancer des idées écologiques, le film interroge sur la loyauté, envers ses amis (le compagnon d'Halla a une fonction importante dans l'usine d'aluminium) et envers soi-même (quel sacrifice est-on prêt à faire pour satisfaire ses convictions). Il fouille aussi la notion de famille à travers le personnage de la soeur (jumelle mais différente en terme de mode de vie) et du cousin (et de ses motivations à soutenir Halla), formidablement interprété lui aussi par Jóhann Sigurðarson.
On remarquera que la meilleure volonté du monde ne peut s'exercer sans soutien. Et qu'on ne peut éviter les dégâts collatéraux. C'est le jeune touriste à vélo qui en fait les frais, de manière récurrente, désigné sans doute par son tee-shirt à l'effigie de Che Guevara.
Ce film est un écrit comme un conte et la présence des musiciens, comme du trio de chanteuses ukrainiennes, surprend et très vite participe à installer de la féérie et du surréalisme dans cette histoire à l'instar d'un film de Kusturica. les chants sont magnifiques, on pourrait même dire magiques et la musique fait partie intégrante du film.
Il est tourné comme un film d'action ou d'espionnage digne d'un épisode de James Bond, dont il reprend les codes : le recours à un drône pour déceler une présence humaine par infra-rouge, les survols en hélicoptère, la traque policière, les courses poursuites, le rituel du smartphone dans le congélateur pour préserver son anonymat ... Il est enfin très drôle avec des scènes d'anthologie comme l'ouverture du coffre dégageant la puanteur du fumier ... et qui évite une fouille minutieuse.
Il s'achève avec une ultime métaphore par une scène d'inondation, présageant une catastrophe écologique comme celles auxquelles on va devoir s’habituer si rien ne change.
Tout est inventé, comme dans les contes, mais tout est plausible et il faut y décoder un message d'avertissement. On y croit parce que le scénario est très solide. Il est à voir, absolument !
Woman at war de Benedikt ErlingssonIl est formidablement interprété, a été tourné au cours de l'été 2017 en Islande (et en Ukraine), dans de magnifiques paysages encore naturels, et s'accompagne d'une bande musicale mélodieuse et envoutante. Il a reçu de nombreuses distinctions, amplement méritées.
Pour résumer : Halla, une femme célibataire de cinquante ans déclare seule la guerre à l’industrie locale de l’aluminium, qui défigure son pays et participe au réchauffement climatique. Elle a recours au sabotage et est prête à prendre tous les risques pour protéger les Hautes Terres vierges d’Islande……Mais la situation pourrait changer avec l’arrivée inattendue d’une petite orpheline ukrainienne dans sa vie.
Benedikt Erlingsson est un réalisateur, auteur et acteur islandais, très connu dans le monde du théâtre. Son premier film, Des chevaux et des hommes, a reçu plus de vingt récompenses internationales.
Avec ce second long métrage il démontre une fois de plus que les droits de la nature doivent être considérés au même niveau que les droits de l'homme et doivent être défendus par des lois nationales, inscrites dans toutes les constitutions, et par des lois internationales. Alors que la France ne se distingue pas suffisamment dans la sauvegarde de l'écologie on peut malgré tout se réjouir que Woman at war soit une coproduction franco islandaise.
L'actrice principale, Halldora Geirhardsdottir, est elle aussi une célébrité dans son pays. Elle y est connue pour s'être inventé une sorte d'alter ego, un macho abruti avec lequel elle est devenue culte sur la scène théâtrale. Benedikt la connait très bien et on ne peut pas voir de hasard dans le nom qu'il a donné au personnage principal, Halla, qu'il dote ... d'une soeur jumelle, bien entendu interprétée par l'actrice.
Ce personnage est très attachant. C'est une femme forte, qui a des convictions (on remarque chez elle des portraits de Mandela et de Gandhi). On la voit ne pas ménager ses efforts pour braver les éléments et réussir son sabotage. Elle cumule des qualités de coeur avec un courage et une force hors du commun. On admire la performance de la comédienne qui court, tire à l'arc, nage dans l'eau glacée (hormis l'épisode où elle se réchauffe dans un geyzer) et pratique le Tai Chi comme si elle avait fait cela toute sa vie.
J'allais oublier de mentionner qu'à la ville la "femme des montagnes" (c'est le nom par lequel elle signe ses revendications) est cheffe de choeur, ce qui est une double mise en abîme dans ce film musical où Halla ne fait pas "chanter" que les membres de sa chorale.
Quant à Woman on remarquera d'une oreille attentive que c'est (aussi) le nom de la petite chienne du cousin, et que celle-ci joue un rôle déterminant dans l'affaire.
Le spectateur est ainsi confronté à une multitude de paradoxes. En premier d'avoir choisi un pays froid pour dénoncer le réchauffement climatique. En l'occurrence un des endroits qui demeurent encore un peu préservé. Les images y montrent une nature particulièrement sauvage. Ensuite lorsqu'Halla annonce une confession et la réalisation du rêve de sa vie son ami pense qu'il va être question de son acte de bravoure, mais ce sera tout autre chose.
Sa détermination semble sans faille jusqu'à ce qu'une petite fille vienne ébranler ses convictions. La faille de Halla est de ne pas avoir d'enfant. Elle est candidate à l'adoption depuis longtemps et on lui propose d'aller en Ukraine chercher une petite fille. Cela suppose de prendre l'avion et de se soumettre au test ADN qui a été instauré pour piéger la "terroriste" qui a fait sauter le pilone.
Outre le thème central posant la question de la méthode à employer (terrorisme, activisme, lobbying ...) pour faire avancer des idées écologiques, le film interroge sur la loyauté, envers ses amis (le compagnon d'Halla a une fonction importante dans l'usine d'aluminium) et envers soi-même (quel sacrifice est-on prêt à faire pour satisfaire ses convictions). Il fouille aussi la notion de famille à travers le personnage de la soeur (jumelle mais différente en terme de mode de vie) et du cousin (et de ses motivations à soutenir Halla), formidablement interprété lui aussi par Jóhann Sigurðarson.
On remarquera que la meilleure volonté du monde ne peut s'exercer sans soutien. Et qu'on ne peut éviter les dégâts collatéraux. C'est le jeune touriste à vélo qui en fait les frais, de manière récurrente, désigné sans doute par son tee-shirt à l'effigie de Che Guevara.
Ce film est un écrit comme un conte et la présence des musiciens, comme du trio de chanteuses ukrainiennes, surprend et très vite participe à installer de la féérie et du surréalisme dans cette histoire à l'instar d'un film de Kusturica. les chants sont magnifiques, on pourrait même dire magiques et la musique fait partie intégrante du film.
Il est tourné comme un film d'action ou d'espionnage digne d'un épisode de James Bond, dont il reprend les codes : le recours à un drône pour déceler une présence humaine par infra-rouge, les survols en hélicoptère, la traque policière, les courses poursuites, le rituel du smartphone dans le congélateur pour préserver son anonymat ... Il est enfin très drôle avec des scènes d'anthologie comme l'ouverture du coffre dégageant la puanteur du fumier ... et qui évite une fouille minutieuse.
Il s'achève avec une ultime métaphore par une scène d'inondation, présageant une catastrophe écologique comme celles auxquelles on va devoir s’habituer si rien ne change.
Tout est inventé, comme dans les contes, mais tout est plausible et il faut y décoder un message d'avertissement. On y croit parce que le scénario est très solide. Il est à voir, absolument !
Avec Halldora Geirhardsdottir, Jóhann Sigurðarson, Davíd Thór Jónsson
Au cinéma depuis le 4 juillet 2018 (1h 41)
Prix SACD (Meilleur Scénario) et Prix du Public à la Semaine de la Critique 2018.
Rail d'Or 2018 (Prix du Public remis par une centaine de cheminots cinéphiles)
Coup de Cœur Cinécole 2018 (Prix du public, remis par des enseignants)
Le film a aussi reçu le soutien du Groupe Action Promotion de l'AFCAE.
Merci à Lucie pour ses photos prises lors de son séjour en Islande il y a quelques semaines.
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