Les poteaux étaient carrés est un livre déroutant. Je ne saurais dire si je l'ai aimé mais en tout cas apprécié c'est certain. L'auteur rapporte la parole de Pierre Cangioni, un match n'est jamais terminé avant le coup de sifflet final (p. 125). On pourrait en dire autant d'un livre où le lecteur cherche son plaisir jusqu'à la dernière page.
Le titre, original pour quiconque ne connait pas le milieu du football, fait référence (p. 87) à la forme des poteaux des buts de l'Hampden Park, qui sont carrés, à l'ancienne, alors que les barres sont rondes depuis plusieurs années dans la plupart des stades modernes. Le ballon qui heurte le bas d'une barre transversale carrée rebondit sur l'arête anguleuse et repart en sens opposé, alors qu'en heurtant une barre ronde il peut glisser sur la courbe métallique et poursuivre sa trajectoire jusqu'au fond des filets.
Si le titre est intrigant mais compréhensible j'ai par contre eu du mal à déchiffrer la couverture ... qu'il était difficile de choisir plus laide, même si le cliché est historique. Les connaisseurs y reconnaîtront Ivan Curkowic, le gardien stéphanois qui, le 12 mai 1976, n'a pas réussi à arrêter à Glasgow le but qu'on dira malheureux pour l'ASSE qui est battue par le Bayern de Munich par coup franc 1/0.
C'est vrai, on ne rejoue pas une finale (p.114). Le nom de l'équipe qui sera inscrit au palmarès y restera gravé à jamais. En sport il n'y a pas de rattrapage. (...) Les victoires n'annulent pas les défaites qui les ont précédées. (...) C'est étourdissant lorsque l'on a seulement treize ans et demi de se dire que "dans vingt minutes" on va vivre un moment qui durera toujours, ... ce que l'auteur désigne plus loin par l'expression "ce vertige de l'irréversibilité".
On ne rejoue pas une finale. Le parallèle que fait Laurent Seyer avec des évènements familiaux qui, à l'instar d'un match, ne se rejoueront pas non plus, est très intéressant. Mais il souligne aussi un match n'est jamais terminé avant le coup de sifflet final. On pourra ainsi analyser l'histoire familiale en changeant de point de vue. Ainsi, au fil des pages le garçon réalisera que les moments heureux qu'il a vécu avec son père sont systématiquement associés à la présence concomitante de sa mère qui, depuis a quitté le foyer familial.
Il nous dit détester être adolescent (il ne l'est plus au moment où il écrit) : Je n'aime pas ce temps où tout nous semble définitif alors que tout est transitoire (p. 104). A treize ans et demi il apprécie dans le football la sensation de se diluer dans une foule qui vibre à l'unisson et de pouvoir se laisser porter par ses mouvements démesurés (p. 43). Voilà comment il devient le 24 août 2013 le fidèle d'un culte (le mot est fort mais juste) qu'il venait à peine de découvrir.
C'est évidemment davantage à la défaite du club stéphanois qu'à la victoire de coupe d'Europe des munichois que l'auteur a pensé en écrivant cet ouvrage. Ce qui est original c'est aussi la position dans laquelle se trouve le jeune homme, toujours derrière un poste de télévision, jamais dans les gradins d'un stade.
On ne le voit sur aucun terrain. Il ne participe pas aux entraînements, ne joue pas en amateur mais il se révèle être un connaisseur avisé. Il définit très clairement (p. 100) le une-deux, puis le dribble ... et si on me l'avait expliqué plus tôt j'aurais peut-être pu me passionner pour ce sport qui se résume pour moi à courir derrière un ballon sur un espace vert dans un sens, puis dans l'autre.
L'attitude du jeune homme face aux jurons (si fréquents sur un terrain !) est surprenante. Lui qui ne craint pas d'insulter l'arbitre, est interprété par son ami Guillaume comme la découverte de sa conscience politique (p. 108) parce qu'il défie un représentant de l'ordre.
Guillaume est son meilleur ami. Il a une soeur handicapée mentale. Comme lui, il est "différent" mais il reste positif. Il lui dira plus tard (p. 95) qu'il y a des tas de jeunes sur terre qui vivent des trucs bien plus terribles (que d'avoir des parents divorcés ou un soeur handicapée).
On comprend (p. 82) quel processus d'identification peut se mettre en place entre un téléspectateur et une équipe. Cela se passe curieusement (s'ancre) au moment où la victoire semble hors de portée : Pour la première fois depuis le début du match j'ai un mauvais pressentiment. Je la connais bien cette angoisse (...) J'ai déjà ressenti cette humiliation de l'impuissance, quand on réalise que l'on n'aura pas gain de cause, que ce sont nos adversaires qui iront danser sur le podium (...) et il faudra vivre avec ce regret toute sa vie.
Si le titre est intrigant mais compréhensible j'ai par contre eu du mal à déchiffrer la couverture ... qu'il était difficile de choisir plus laide, même si le cliché est historique. Les connaisseurs y reconnaîtront Ivan Curkowic, le gardien stéphanois qui, le 12 mai 1976, n'a pas réussi à arrêter à Glasgow le but qu'on dira malheureux pour l'ASSE qui est battue par le Bayern de Munich par coup franc 1/0.
C'est vrai, on ne rejoue pas une finale (p.114). Le nom de l'équipe qui sera inscrit au palmarès y restera gravé à jamais. En sport il n'y a pas de rattrapage. (...) Les victoires n'annulent pas les défaites qui les ont précédées. (...) C'est étourdissant lorsque l'on a seulement treize ans et demi de se dire que "dans vingt minutes" on va vivre un moment qui durera toujours, ... ce que l'auteur désigne plus loin par l'expression "ce vertige de l'irréversibilité".
On ne rejoue pas une finale. Le parallèle que fait Laurent Seyer avec des évènements familiaux qui, à l'instar d'un match, ne se rejoueront pas non plus, est très intéressant. Mais il souligne aussi un match n'est jamais terminé avant le coup de sifflet final. On pourra ainsi analyser l'histoire familiale en changeant de point de vue. Ainsi, au fil des pages le garçon réalisera que les moments heureux qu'il a vécu avec son père sont systématiquement associés à la présence concomitante de sa mère qui, depuis a quitté le foyer familial.
Il nous dit détester être adolescent (il ne l'est plus au moment où il écrit) : Je n'aime pas ce temps où tout nous semble définitif alors que tout est transitoire (p. 104). A treize ans et demi il apprécie dans le football la sensation de se diluer dans une foule qui vibre à l'unisson et de pouvoir se laisser porter par ses mouvements démesurés (p. 43). Voilà comment il devient le 24 août 2013 le fidèle d'un culte (le mot est fort mais juste) qu'il venait à peine de découvrir.
C'est évidemment davantage à la défaite du club stéphanois qu'à la victoire de coupe d'Europe des munichois que l'auteur a pensé en écrivant cet ouvrage. Ce qui est original c'est aussi la position dans laquelle se trouve le jeune homme, toujours derrière un poste de télévision, jamais dans les gradins d'un stade.
On ne le voit sur aucun terrain. Il ne participe pas aux entraînements, ne joue pas en amateur mais il se révèle être un connaisseur avisé. Il définit très clairement (p. 100) le une-deux, puis le dribble ... et si on me l'avait expliqué plus tôt j'aurais peut-être pu me passionner pour ce sport qui se résume pour moi à courir derrière un ballon sur un espace vert dans un sens, puis dans l'autre.
L'attitude du jeune homme face aux jurons (si fréquents sur un terrain !) est surprenante. Lui qui ne craint pas d'insulter l'arbitre, est interprété par son ami Guillaume comme la découverte de sa conscience politique (p. 108) parce qu'il défie un représentant de l'ordre.
Guillaume est son meilleur ami. Il a une soeur handicapée mentale. Comme lui, il est "différent" mais il reste positif. Il lui dira plus tard (p. 95) qu'il y a des tas de jeunes sur terre qui vivent des trucs bien plus terribles (que d'avoir des parents divorcés ou un soeur handicapée).
On comprend (p. 82) quel processus d'identification peut se mettre en place entre un téléspectateur et une équipe. Cela se passe curieusement (s'ancre) au moment où la victoire semble hors de portée : Pour la première fois depuis le début du match j'ai un mauvais pressentiment. Je la connais bien cette angoisse (...) J'ai déjà ressenti cette humiliation de l'impuissance, quand on réalise que l'on n'aura pas gain de cause, que ce sont nos adversaires qui iront danser sur le podium (...) et il faudra vivre avec ce regret toute sa vie.
Souhaitons à l'auteur que l'écriture de ce livre ait atténué ses regrets.
Les poteaux étaient carrés de Laurent Seyer, chez Finitude, mai 2018
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