Je suis allée voir Justice, écrit (et joué) par Samantha Markowic au Théâtre de l'Oeuvre, mis en scène par Salomé Lelouch. C'est prodigieux de justesse (oui c'est le mot) et interprété avec immense talent. C'est rythmé, intelligent. Le spectacle dégage une grande humanité et le texte est pourtant sans concession. La démonstration est brillante. Le théâtre du vrai peut être aussi du vrai théâtre. Bravo. Courez-y ! Et espérons une reprise ultérieure.
Parce qu'elle a été confrontée à la justice, Samantha Markowic a eu envie de travailler sur des interrogatoires, des témoignages, et des scènes d’audience, que Salomé Lelouch a mis en scène en nous plongeant au cœur d’une justice en temps réel, celle des comparutions immédiates. Elle avait très bien réussi à dénoncer ce que cachait le Politiquement correct à la Pépinière il y a deux ans et j'étais sure que cette nouvelle mise en scène serait une autre forme d'interpellation.
Je deviens dingue, voilà ce que répètent les trois comédiennes en écho sur tous les tons toutes ensemble, campées sur leurs jambes, droites devant le rideau de fer. Je me suis fait taper, putain, et il a un sursis. On attend la seconde ? C'est quoi cette justice ?
Une des bonnes idées du spectacle est de faire jouer les fonctions de procureur de la République, d'avocat et de prévenu (homme ou femme) uniquement par des femmes, dans un domaine si masculin. Elles sont donc trois comédiennes qui changent de rôles entre les scènes, démontrant que tout le monde peut un jour ou l'autre être de l'un ou de l'autre coté de la barre. Rien n'est tranché et la justice est une machine à broyer.
C'est par contre un peu énervant, cette valse des têtes d'affiche, qui fait qu'on vient pour quelqu'un alors que c'est un(e) autre qui est sur scène ... J'aurais bien aimé voir Camille Cottin mais je dois dire que la distribution de ce soir était excellente et fonctionnait parfaitement (Samantha Markowic, Aidra Ayadi et Camille Chamoux). Il y a pire vous me direz quand un acteur est nominé Meilleur comédien aux Molières pour un rôle ... où il est remplacé par un autre ...
Lorsque s'ouvre le rideau de fer, on les découvre assises, sur ce qu'on devine être des piles de dossiers, format A3, en feutre noir qui composeront les meubles, les murs et où l'on puisera les affaires qui seront rendues ... en comparution immédiate, avec la particularité que dans ce type de justice, on ne juge que l'acte, pas la personne. Le décor est saturé de dossiers et c'est une excellente idée d'avoir évité l'écueil de la reconstitution.
Le vocabulaire est très précis. C'est celui de la justice que pour une fois on comprend, parce que la mise en scène et l'interprétation la rend intelligible, ce qui ne signifie pas qu'on valide le verdict. Le spectateur est ainsi toujours en alerte au profit du jeu des comédiennes et du texte qui fait souvent l'effet d'une bombe et que l'on jurerait (à tort) pour partie improvisé tant il est vivant :
- Evidemment si on compare les 80 € que coute une journée de prison aux 800 d'une journée en hôpital psychiatrique c'est vite emballé et pesé.
- Une sortie sèche de prison, les statistiques sont formelles, c'est 90% de récidive assurée (On se dit que tout ce petit monde pourrait faire un tour en maternelle. Les enseignants le savent bien que punir un enfant ne sert pas à grand chose, juste à apaiser la victime). A ce compte là il est logique que le personnage de Mohamed Ali réapparaisse régulièrement.
Mais le public apprécie aussi des moments de poésie avec par exemple la légende tzigane du quatrième clou qui n'a pas transpercé le corps de Jésus, et qui donc a accordé, en sorte de remerciement aux gitans le droit de mentir et de voler.
Le portrait de notre société est sans concession. On éprouve de l'empathie envers les délinquants autant que pour ceux qui font la justice et qui ne perdent pas leur passion. Chacun se sent concerné, ayant forcément vécu une des scènes ou connaissant un de ses proches qui a été emporté dans ce tourbillon, comme victime ou comme prévenu. Les chiffres donnés à la fin semblent surestimés et pourtant non : 75000 homicides volontaires chaque année, un peu plus d'un millier de viols, 95 000 conduites en état d'alcoolisme, 65 000 sous l'emprise de stupéfiants (des chiffres sans doute en deça de la réalité puisque pas vu pas pris), 275 379 peines de prison.
Combien de fois il sera nécessaire de marteler que le racisme n'est pas une opinion, c'est un délit ?
Justice est un moment de théâtre très fort, qui fait réfléchir mais qui remplit tout à fait aussi sa mission de divertir. C'est du grand théâtre.
Parce qu'elle a été confrontée à la justice, Samantha Markowic a eu envie de travailler sur des interrogatoires, des témoignages, et des scènes d’audience, que Salomé Lelouch a mis en scène en nous plongeant au cœur d’une justice en temps réel, celle des comparutions immédiates. Elle avait très bien réussi à dénoncer ce que cachait le Politiquement correct à la Pépinière il y a deux ans et j'étais sure que cette nouvelle mise en scène serait une autre forme d'interpellation.
Une des bonnes idées du spectacle est de faire jouer les fonctions de procureur de la République, d'avocat et de prévenu (homme ou femme) uniquement par des femmes, dans un domaine si masculin. Elles sont donc trois comédiennes qui changent de rôles entre les scènes, démontrant que tout le monde peut un jour ou l'autre être de l'un ou de l'autre coté de la barre. Rien n'est tranché et la justice est une machine à broyer.
C'est par contre un peu énervant, cette valse des têtes d'affiche, qui fait qu'on vient pour quelqu'un alors que c'est un(e) autre qui est sur scène ... J'aurais bien aimé voir Camille Cottin mais je dois dire que la distribution de ce soir était excellente et fonctionnait parfaitement (Samantha Markowic, Aidra Ayadi et Camille Chamoux). Il y a pire vous me direz quand un acteur est nominé Meilleur comédien aux Molières pour un rôle ... où il est remplacé par un autre ...
Lorsque s'ouvre le rideau de fer, on les découvre assises, sur ce qu'on devine être des piles de dossiers, format A3, en feutre noir qui composeront les meubles, les murs et où l'on puisera les affaires qui seront rendues ... en comparution immédiate, avec la particularité que dans ce type de justice, on ne juge que l'acte, pas la personne. Le décor est saturé de dossiers et c'est une excellente idée d'avoir évité l'écueil de la reconstitution.
Le vocabulaire est très précis. C'est celui de la justice que pour une fois on comprend, parce que la mise en scène et l'interprétation la rend intelligible, ce qui ne signifie pas qu'on valide le verdict. Le spectateur est ainsi toujours en alerte au profit du jeu des comédiennes et du texte qui fait souvent l'effet d'une bombe et que l'on jurerait (à tort) pour partie improvisé tant il est vivant :
- Evidemment si on compare les 80 € que coute une journée de prison aux 800 d'une journée en hôpital psychiatrique c'est vite emballé et pesé.
- Une sortie sèche de prison, les statistiques sont formelles, c'est 90% de récidive assurée (On se dit que tout ce petit monde pourrait faire un tour en maternelle. Les enseignants le savent bien que punir un enfant ne sert pas à grand chose, juste à apaiser la victime). A ce compte là il est logique que le personnage de Mohamed Ali réapparaisse régulièrement.
Mais le public apprécie aussi des moments de poésie avec par exemple la légende tzigane du quatrième clou qui n'a pas transpercé le corps de Jésus, et qui donc a accordé, en sorte de remerciement aux gitans le droit de mentir et de voler.
Le portrait de notre société est sans concession. On éprouve de l'empathie envers les délinquants autant que pour ceux qui font la justice et qui ne perdent pas leur passion. Chacun se sent concerné, ayant forcément vécu une des scènes ou connaissant un de ses proches qui a été emporté dans ce tourbillon, comme victime ou comme prévenu. Les chiffres donnés à la fin semblent surestimés et pourtant non : 75000 homicides volontaires chaque année, un peu plus d'un millier de viols, 95 000 conduites en état d'alcoolisme, 65 000 sous l'emprise de stupéfiants (des chiffres sans doute en deça de la réalité puisque pas vu pas pris), 275 379 peines de prison.
Combien de fois il sera nécessaire de marteler que le racisme n'est pas une opinion, c'est un délit ?
Justice est un moment de théâtre très fort, qui fait réfléchir mais qui remplit tout à fait aussi sa mission de divertir. C'est du grand théâtre.
Justice de Samantha Markowic
Du 10 janvier au 31 mars 2018
Mise en scène : Salomé Lelouch
Avec en alternance : Aidra Ayadi, Camille Chamoux, Camille Cottin, Samantha Markowic, Fatima N'Doye, Oceanerosemarie
Le succès a été tel, et je suis la première à m'en réjouir, que le spectacle est repris toujours au Théâtre de l'Oeuvre, 55, rue de Clichy, 75009 Paris
Du 12 Septembre au 8 Décembre 2018
Du mercredi au samedi à 21h et le dimanche à 15h
Avec une distribution légèrement modifiée, et en alternance: Naidra Ayadi, Alix Poisson, Judith El Zein, Samantha Markowic, Fatima N'Doye, Oceanerosemarie
Du mercredi au samedi à 21h et le dimanche à 15h
Avec une distribution légèrement modifiée, et en alternance: Naidra Ayadi, Alix Poisson, Judith El Zein, Samantha Markowic, Fatima N'Doye, Oceanerosemarie
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