Le public est installé de part et d'autre d'une longue table gris anthracite qui occupe le centre de la salle, sous la voute du Théâtre de Poche qui devient tout à fait crédible en cuisine de château. A ceci près que le mobilier n'est qu'une esquisse où officie Kristin (Carolina Pecheny), parfaite domestique qui ne se risquerait pas à sortir de son rang.
Elle prend son repas, solitaire, et fait la vaisselle alors qu'on entend au loin les musiques de la fête de Midsommar, célébrant le solstice d’été.
Toute la première scène est mimée (la comédienne s'est formée au Conservatoire national d’art dramatique à Buenos Aires et à l’École Argentine du Mime), instaurant une seconde distance à celle que le décor avait installé. Plus tard ce sera elle -méconnaissable- qui fera une apparition surréaliste en interprétant un de ces trolls qui peuplent les contes et légendes scandinaves.
Le metteur en scène a voulu retraduire le texte parce que Strindberg rêvait d’une écriture qui aurait été comme un canevas d’improvisation pour les acteurs. Et de fait on pourrait presque penser par moment que la pièce a été écrite pour ces trois là.
Arrive ensuite son presque fiancé, Jean (Fred Cacheux interprété en alternance avec Nils Öhlund), qui est le valet de Monsieur le Comte, lequel est absent ce soir. Sa fille, mademoiselle Julie (Jessica Vedel), va pouvoir s'en donner à coeur joie et libérer ses pulsions.
On songera par moment à la folie shakespearienne d'une nuit d'été. La pièce entière se déroulera dans cet espace, confiné comme un huis-clos étouffant, où les chambres sont conçues comme des placards aux portes coulissantes. Jean et Julie sont animés tous les deux par des rêves d’affranchissement, mais ils sont diamétralement opposés et, une fois les tensions retombées, la jeune femme sera face à un dilemme tragique et cruel.
Nils Öhlund a choisi des comédiens exceptionnels pour interpréter les rôles (on peut se demander quel Jean il est lui-même les soirs où il se glisse dans le personnage). Ils se connaissent de longue date. Il était Jupiter dans Amphitryon où Jessica jouait la Nuit alors que les costumes étaient signés de Laurianne Scimeni et que Carolina assistait Guy-Pierre Couleau à la mise en scène. Les deux comédiennes avaient aussi travaillé ensemble sur le Songe qui fut créé au Festival de Bussang.
Carolina a ce qu'il faut de raideur pour rappeler les valeurs de l’ordre établi. Fred exprime avec fougue l'ambivalence des sentiments à l'égard du maitre, entre fierté et servilité, haine et admiration. Jessica sème le trouble en étant aussi bien capable de mépris que de candeur, se montrant aristocrate et femme, animée d'une volonté de domination (parce qu'elle hait les hommes, à commencer par son père) et pourtant si fragile et solitaire, ayant un oiseau pour seul ami.
Elle prend son repas, solitaire, et fait la vaisselle alors qu'on entend au loin les musiques de la fête de Midsommar, célébrant le solstice d’été.
Toute la première scène est mimée (la comédienne s'est formée au Conservatoire national d’art dramatique à Buenos Aires et à l’École Argentine du Mime), instaurant une seconde distance à celle que le décor avait installé. Plus tard ce sera elle -méconnaissable- qui fera une apparition surréaliste en interprétant un de ces trolls qui peuplent les contes et légendes scandinaves.
Le metteur en scène a voulu retraduire le texte parce que Strindberg rêvait d’une écriture qui aurait été comme un canevas d’improvisation pour les acteurs. Et de fait on pourrait presque penser par moment que la pièce a été écrite pour ces trois là.
Arrive ensuite son presque fiancé, Jean (Fred Cacheux interprété en alternance avec Nils Öhlund), qui est le valet de Monsieur le Comte, lequel est absent ce soir. Sa fille, mademoiselle Julie (Jessica Vedel), va pouvoir s'en donner à coeur joie et libérer ses pulsions.
On songera par moment à la folie shakespearienne d'une nuit d'été. La pièce entière se déroulera dans cet espace, confiné comme un huis-clos étouffant, où les chambres sont conçues comme des placards aux portes coulissantes. Jean et Julie sont animés tous les deux par des rêves d’affranchissement, mais ils sont diamétralement opposés et, une fois les tensions retombées, la jeune femme sera face à un dilemme tragique et cruel.
Nils Öhlund a choisi des comédiens exceptionnels pour interpréter les rôles (on peut se demander quel Jean il est lui-même les soirs où il se glisse dans le personnage). Ils se connaissent de longue date. Il était Jupiter dans Amphitryon où Jessica jouait la Nuit alors que les costumes étaient signés de Laurianne Scimeni et que Carolina assistait Guy-Pierre Couleau à la mise en scène. Les deux comédiennes avaient aussi travaillé ensemble sur le Songe qui fut créé au Festival de Bussang.
Carolina a ce qu'il faut de raideur pour rappeler les valeurs de l’ordre établi. Fred exprime avec fougue l'ambivalence des sentiments à l'égard du maitre, entre fierté et servilité, haine et admiration. Jessica sème le trouble en étant aussi bien capable de mépris que de candeur, se montrant aristocrate et femme, animée d'une volonté de domination (parce qu'elle hait les hommes, à commencer par son père) et pourtant si fragile et solitaire, ayant un oiseau pour seul ami.
Nils Öhlund a voulu pointer une mise à nu progressive des personnages une fois que les masques sont tombés. Au début, l’identité sociale et ses codes fixent les rôles. Julie est autoritaire, provocatrice : elle est la maîtresse. Jean incarne la domesticité dans sa présence invisible qui le fait être là pour servir.
La jeune femme lui demande de boire en sa compagnie, et va jusqu’à lui ordonner de s’agenouiller et d’embrasser sa chaussure, au cours d'une scène fondamentale qui est reprise sur l'affiche.
Au grès des coups de boutoir, ils laissent tomber leurs habits (c’est d’ailleurs ce que Julie demande à Jean : abandonner sa livrée, alors que plus tard elle se débarrassera de sa jupe). Ils vont pouvoir devenir ce qu’ils sont vraiment (ce qui n’empêche pas les rapports de force), laissant leurs statuts sociaux de côté et, l'espace d'un instant le spectateur croit en leur avenir.
L'échange de confidences renforce notre illusion avant que l'on ne comprenne que Julie s'est laissée prendre dans les griffes du désir qu’elle voudrait être de l’amour, devenant celle qui tombe vers celui qui monte.
Il y a beaucoup de violence au cours de la soirée, aussi bien verbale que physique. On assiste autant à un combat de classes qu'à une lutte des sexes. L'âme humaine pourrait ne pas être si noire. En cela le metteur en scène respecte le texte. Mais la proximité des comédiens rend les enjeux très palpables et le jeu de la séduction est trouble. Un valet est un valet lance Julie à la tête de Jean. On se surprend à s'interroger : qu'aurions-nous répondu à sa place ? Sans doute pas qu'une prostituée est une prostituée.
Lequel est le plus dangereux des deux ? Celui qui s'enorgueillit qu'il faut toujours impressionner les femmes pour les attraper ... ou bien celle qui lève la main sur celui qu'elle cherche à conquérir ?
La pièce se termine mal. A qui la faute nous demande Strindberg ...
Mademoiselle Julie d'August Strindberg - Mise en scène Nils Öhlund
Avec JessicaVedel (Julie), Carolina Pecheny (Kristin), Fred Cacheux (Jean) en alternance avec Nils Öhlund
Scénographie, Laurianne Scimemi
Costumes, Laurianne Scimemi, assistée de Blandine Gustin
Lumières, Laurent Schneegans, création de Michel Bergamin
Création son, Grégoire Harrer
Au Théâtre de Poche
75, Boulevard du Montparnasse, 75006 Paris
Du 19 janvier au 18 mars 2018
Du mardi au samedi à 21h, dimanche 15h
Relâches exceptionnelles du 30 janvier au 4 février et les 10 février, 13 et 14 mars
Ce spectacle a été créé à la Comédie de l’Est à Colmar le 12 mai 2015
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