Bérengère Dautun est une de ces actrices que l'on n'oublie pas quand on a la chance de la voir sur scène. Je me souviens d'elle soutenant le combat d'Emile Zola dans J'accuse ! au Studio Hébertot.
Elle était la très sensible Comtesse de Ségur, née Rostopchine à la Comédie Bastille. Et plus récemment elle se glissa dans la peau de Carole Weisweiller pour raconter un pan de la vie de "monsieur Cocteau".
Isabelle est allée la découvrir dans une pièce que propose le Funambule Montmartre et qui prend ses racines comme le Marronnier, rue Caulaincourt. Elle a apprécié cette saga familiale lourde de secrets, et voilà ses impressions :
Elle était la très sensible Comtesse de Ségur, née Rostopchine à la Comédie Bastille. Et plus récemment elle se glissa dans la peau de Carole Weisweiller pour raconter un pan de la vie de "monsieur Cocteau".
Isabelle est allée la découvrir dans une pièce que propose le Funambule Montmartre et qui prend ses racines comme le Marronnier, rue Caulaincourt. Elle a apprécié cette saga familiale lourde de secrets, et voilà ses impressions :
Lorsque nous rentrons dans la salle, Edith (Lou Guyot) cigarette à la main, écrit fébrilement sur une feuille de papier. On comprend qu’elle se trouve dans l’appartement de sa mère, Mona, qui vient de décéder. Comme souvent pendant une période de deuil, on se replonge dans le passé, les photos, les correspondances et on essaye de comprendre d’où on vient. On réalise alors parfois, qu’en plus de la douleur de la perte, de nombreuses questions constituant notre identité resteront sans réponse. C’est cet impact des non-dits, de la transmission au fil des générations, qui va former la trame de la pièce rédigée et adaptée pour le théâtre par Véronick Bourdoncle.
Edith a choisi de partir sur les traces de son passé et d’en faire un livre. Mais pas sous n’importe quel angle : ce sont les femmes qui l’intéressent. Pourquoi, depuis trois générations, les femmes de sa famille ont-elles perdu leur mari par abandon ou disparition inexpliquée… ? Y a-t-il une malédiction qui la toucherait elle aussi, célibataire endurcie ? Elle s’enregistre dans un dictaphone : "Et moi Edith, orpheline d’une mère exclusive. Quatrième génération d’une longue lignée de femmes seules, rongées par le malheur et la solitude. Je suis seule. "
Sur le même palier, rue Caulaincourt vit Lucie (Bérengère Dautun), grande amie de la famille, qu’Edith considère comme sa grand-mère adoptive. Cette dernière connait de nombreux détails sur l’histoire de la famille et va aider Edith à enquêter sur son passé.
Les deux femmes sont aux antipodes. Edith est torturée par cette quête de vérité, elle est souffrance et colère tout à la fois. Elle en veut à sa mère d’avoir été "Mona avant d’être mère", un personnage de roman excentrique, manipulatrice et fascinante. Lou Guyot joue à la perfection cette trentenaire stressée qui fume et boit trop parce que sa vie est vide, sans amour, hantée par le sentiment d’abandon.
Edith au contraire a sa vie derrière elle. Elle est positive, très énergique et encourage Lucie à se battre et à ne pas s’apitoyer sur son sort. Quand on demande à Berengère Dautun, sociétaire de la Comédie Française de 1972 à 1997, de définir son personnage, elle répond : "amour et ténacité". Son jeu est celui d’une battante qui peut aussi se laisser émouvoir et nous émouvoir. Ainsi lorsqu’enfin éclate la vérité, elle qui pensait être soulagée est en fait extrêmement troublée : "Pourquoi faut-il que ce soit moi qui ouvre la boîte de Pandore. Vos maux se répandent sur moi. Ce poison qui vous a rongé me ronge maintenant. A quoi ça va servir ? "
Bien sûr, je ne vais pas vous révéler les secrets de famille qu’Edith va être la première à élucider. Du reste, ce n’est pas tant le secret qui importe que le comportement que l’on adopte dans certaines circonstances pour ne pas baisser les bras devant le destin. Y a-t-il prescription ? Probablement jamais complètement, c’est bien cela qui nous touche dans cette pièce.
Le jeu tout en finesse des actrices rattrape quelques lourdeurs dans le texte. Pascal Vitiello (qui a déjà signé plusieurs mises en scène avec l'actrice) nous fait passer d’un appartement à l’autre dans une jolie mise en scène, sobre et intimiste. Allez-y avant le 31 décembre. Vous passerez un bon moment. Attention ! Les portes n’ouvrent qu’un quart d’heure avant le spectacle.
Le Marronnier de la rue Caulaincourt de Véronick Bourdoncle
Mise en scène de Pascal Vitiello
Avec Bérengère Dautun et Lou Guyot
Lumières : Thibault Jouliè
Au théâtre Le Funambule Montmartre, jusqu’au 31 décembre.
53 rue des Saules, 75018 Paris 01 42 23 88 83
A 19 h 30 du jeudi au samedi, le dimanche à 16h00
Photos Lot
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