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mardi 4 septembre 2018

Les lundis du Dr Dory au Théâtre de Nesle

Drôle de titre, drôle de bonhomme, Cyril Dory est un artiste qui ne laisse pas indifférent. Son entrée sur scène est à son image, étonnante. Il est vêtu d'un pantalon noir, d'une robe de chambre carmin, d'une cravate pourpre, arbore un maquillage qui lui fait le regard d'un raton-laveur, et ouvre une mallette de cuir hors d'âge dont s'échappe ... le bruit des vagues, nous projetant immédiatement dans son univers surréaliste.

Un grelot égrène douze coups. On peut imaginer qu'il est minuit. Cyril s'installe au piano et commence avec Santa Barbara, la chanson de la célèbre série télévisée, dont il a traduit les paroles.

Sa voix est belle. Le ton est juste. Mais ... l'apparence masquée du personnage instaure le doute. Devons-nous l'entendre au second degré ou prendre les mots au pied de la lettre ?

Il répond à la question, et à beaucoup d'autres, en intercalant les interventions sur le thème qu'il a choisi pour ces lundis ... les adieux en se focalisant non pas sur le pourquoi mais sur le comment.

Son récital (qu'il appelle conférence) explore cette étrange question en s'appuyant sur des airs de tous les temps : chanson française, pop anglaise, générique TV... et quelques-unes qu'il a composées lui-même.

Il a pris le titre de docteur comme nom de scène mais s'avoue être docteur en rien du tout. On passe en sa compagnie un moment agréable, sans se torturer l'esprit par des questions pourtant existentielles, sur l'emploi de l'imparfait du subjonctif, sur la douleur généré par le départ, sur le courage qu'il faut avoir pour prendre une telle décision, et sur l'envie irrépressible que nous aurions de nous vouloir immortels.

Cyril n'est pas donneur de leçons. Et pourtant il nous apprend, ou nous rappelle,  beaucoup de choses. par exemple comment est née la vocation d'architecte de Ferdinand Cheval, ce facteur qui, à l'âge de 43 ans butte sur une pierre si bizarre lors de sa tournée qu’elle provoque le déclic. Cet achoppement sera à l'origine de la construction du Palais de rêve qu'il achèvera en 1912 dans son potager de Hauterive (et que l'on vient du monde entier pour le visiter encore aujourd'hui).

Il chante les drames engendrés par un adieu mais il termine la soirée par un titre peu connu que Nana Mouskouri interprétait en 1960 : Qu'il fait beau, quel soleil !

Car l'homme est résolument optimiste. C'est parce que cette céréale a poussé spontanément sur son balcon qu'il porte un épi de blé à la boutonnière. Faut-il y voir le présage du bonheur ? Il ne fait aucun doute en tout cas qu'après avoir exercé plusieurs métiers c'est bien sur la scène qu'il s'épanouit le plus.

Il assure lui même l'interprétation, la scénographie et la mise en scène ... c'est peut-être beaucoup pour un seul homme même s'il dit que la scène l'amène au lâcher prise en le détachant du jugement du monde. On pourrait penser qu'un regard dramaturgique l'aiderait à repousser la ligne d'horizon.

Les spectateurs reçoivent, à la fin du spectacle, le livret dans lequel on retrouve chacune des musiques, ce qui est trop rare au théâtre, alors qu'il serait impensable de ne pas mentionner les titres, principaux ou additionnels dans un générique de film. En outre, cette information donne envie d'écouter d'autres morceaux qu'il a composés.

Le Théâtre de Nesle l'avait déjà programmé, en ce jour particulier qu'est le lundi. Il a décidé de reprendre ce rituel dans le cadre du festival 7, 8, 9 qui se poursuit jusqu'à la fin du mois de septembre.

On peut imaginer qu'il reviendra dans quelques semaines avec un nouveau spectacle parce qu'il a à coeur de traiter les sujets qu'un patient épistolaire peut lui soumettre, par lettre ou par courriel (docteurdory@gmail.com), en apportant une ou plusieurs réponses en chansons, au cours de séances qui au final sont uniques.

Les lundis d'adieux du Dr Dory
Le lundi à 21 heures au Théâtre de Nesle
Jusqu'au 24 septembre 2018
8 rue de Nesle
75006 Paris

Cyril Dory a été l'invité d'une émission que je produis et anime sur Needradio et que vous pourrez podcaster pour en savoir davantage sur son univers :

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