C’est bien entendu à un dialogue imaginaire que nous prie d’assister l’équipe artistique du Poche Montparnasse.
Des livres occupent le mur de fond de scène, en quantité ; des bougies sont disposées un peu partout, abondamment. La salle est petite mais pleine. Montesquieu (Laurent Joffrin) semble attablé depuis longtemps. Il est surpris par l’arrivée, en cape et avec une certaine majesté, de Machiavel.
Tous les hommes aspirent à dominer. La loi n’est qu’un avatar de la force, nous dira celui-ci. Hélas, l’actualité internationale nous en fait la démonstration trop régulièrement !
Tous les hommes aspirent à dominer. La loi n’est qu’un avatar de la force, nous dira celui-ci. Hélas, l’actualité internationale nous en fait la démonstration trop régulièrement !
Mes vaticinations (prédictions emphatiques ou prétentieuses) existent déjà. Ça n’est pas moins que c’est complexe et violent, comme l’est le monde. Leur échange fait tellement écho à ce qui s’est passé et/ou se déroule sous les ors du pouvoir qu’on écoute l’un et l’autre en hochant de la tête, même si leurs idées s’opposent le plus souvent. On compte les points …
Le raisonnement de Machiavel est admirablement servi par Hervé Van der Meulen. Il a recours à toutes les subtilités pour dammer le pion à un Montesquieu qui ne veut pas se fâcher et qui pense l’emporter par la sagesse de ses arguments. On a parfois le sentiment d’assister à un débat comme on peut en voir se multiplier à la télévision. Il est vrai que Laurent Joffrin (journaliste et successivement directeur de la rédaction du Nouvel Obs dès 1988 et de Libération dès 1996, quotidien dont il occupera les plus hautes fonctions éditoriales jusqu’à son départ en 2020) est familier de cet exercice.
Le raisonnement de Machiavel est admirablement servi par Hervé Van der Meulen. Il a recours à toutes les subtilités pour dammer le pion à un Montesquieu qui ne veut pas se fâcher et qui pense l’emporter par la sagesse de ses arguments. On a parfois le sentiment d’assister à un débat comme on peut en voir se multiplier à la télévision. Il est vrai que Laurent Joffrin (journaliste et successivement directeur de la rédaction du Nouvel Obs dès 1988 et de Libération dès 1996, quotidien dont il occupera les plus hautes fonctions éditoriales jusqu’à son départ en 2020) est familier de cet exercice.
Chacun se cite. Chacun savoure ses tirades. Nos « gouvernants » en prennent pour leur grade. Les fonctionnaires me devront un soutien obligatoire puisque je les paie. La perfidie de Machiavel fait écho à ma propre expérience. J’ai entendu cela … quand je travaillais à l’Education nationale et qu’on nous menaçait de faute professionnelle à la moindre critique de la réforme en cours.
Mais l’homme est aussi celui qui rend optimiste : Je vais donner à l’esprit d’entreprise un essor prodigieux. Souvent il écrase Montesquieu qui ne se défend pas. C’est dommage. A force de ne pas vouloir se fâcher, son argumentation s’affaiblit, même lorsque le philosophe invoque Blaise Pascal.
Le combat est inégal. Il est très malin de nous rendre Machiavel sympathique, malgré la violence de ses propos et son manque d’humanité. Du coup Dialogue aux enfers, Machiavel Montesquieu est un spectacle à venir voir pour réfléchir davantage sur l’âme humaine.
Le texte est ancien mais ce pamphlet, paru en 1864 à Bruxelles n’a rien perdu de son interêt. Il a été rédigé par Maurice Joly (1829-1878), un avocat parisien qui partageait la révolte de Victor Hugo devant le coup d’État de Napoléon III, et qui voyait dans la manipulation des milieux d’affaires, de la presse et de la population par le nouvel Empereur un grave risque de servitude morale pour la totalité du peuple français.
Bien qu’ayant écrit sous pseudo, il fut identifié et emprisonné. Déçu par la République autant que par l’Empire il finit par se suicider en 1878.
La démocratie peut-elle triompher durablement du despotisme ? Montesquieu, conformément à son rôle historique, met l’accent sur la séparation des pouvoirs, l'État de droit, la souveraineté de la nation, mais Machiavel retourne à chaque fois ses arguments pour montrer comment ces notions nobles peuvent être détournées au service d'un homme, ici Napoléon III qui n'est jamais cité, manipulant toutes les composantes de la société.
Le texte de Joly entra dans l’oubli et la première adaptation est due à Pierre Fresnay, qui a lu le texte en compagnie de Julien Bertheau au Théâtre de la Michodière en 1968.
La Comédie-Française monta ce texte en 1983 au Petit-Odéon, dans une adaptation de Pierre Franck, mise en scène par Simon Eine avec Michel Etcheverry et François Chaumette.
Pierre Tabard réadapta la version de Pierre Fresnay qui fut joué par Jean-Paul Borde et Jean-Pierre Andreani en 2005 au Lucernaire.
En 2018, le réalisateur et metteur en scène Marcel Bluwal signe son retour au théâtre en montant sa propre pièce issue du texte de Maurice Joly au Théâtre de Poche-Montparnasse, en faisant appel à Véronique Viel pour l’assister à la mise en scène. C’est alors Pierre Santini qui est Montesquieu et Hervé Briaux qui interprète Machiavel. Le comédien est aujourd’hui est à l’affiche dans ce même théâtre dans Le Faiseur de théâtre. La version de Bluwal est régulièrement reprise et le succès n’est jamais démenti quelle que soit la distribution.
Dans l’adaptation de Marcel Bluwal
Collaboration artistique de Pauline Devinat et Véronique Viel
Avec Laurent Joffrin et Hervé Van Der Meulen
Reprise depuis le 25 janvier 2022
Au Poche Montparnasse - 75 boulevard du Montparnasse -75006 Paris
Représentations du mardi au samedi 19h, dimanche 17h 30Le texte du spectacle édité par L’avant-scène théâtre, éditions des Quatre-Vents, est en vente au bar du théâtre.
Les dimanches 13 mars et 3 avril, à l’issue de la représentation, sera proposé un débat sur Dialogue aux enfers et sa modernité en période de campagne présidentielle. Il sera animé par Christophe Barbier en présence de Laurent Joffrin et de quelques personnalités du monde politique.
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