Pour clôturer la première journée de compétition, les festivaliers de Paysages de cinéastes ont pu se détendre en découvrant le dernier film de Julie Delpy en avant-première (il sortira le 18 septembre).
Les barbares est un petit bijou de comédie, dont la bande-annonce reflète insuffisamment toutes les qualités.
Cette comédie traite avec humour mais sérieux la place de l’autre, qu’il soit réfugié d’un lointain pays, ou qu’il soit son voisin un peu fantaisiste pour mieux tordre le cou à de nombreux clichés, plus ou moins criants. Le spectateur remarquera-t-il la majorité de blondinets à l’école et la couleur dominante des cheveux des femmes du village ? Notera-t-il la fréquence d’apparition de rayures sur les vêtements, comme si on pouvait oublier que nous sommes en Bretagne ?
La réalisatrice, qui a co-écrit le scénario, y interprète Joëlle, une institutrice au grand coeur un peu gaffeuse. Sandrine Kiberlain, sa meilleure amie, co-propriétaire de la supérette, a trouvé soutien dans l’alcool et devra faire face pour reprendre sa vie en mains. Laurent Laffite a accepté le "mauvais" rôle, celui d’un plombier réactionnaire et raciste d’origine alsacienne, devenu plus breton que les autochtones, qui a bien de la chance d’être supporté par une épouse fine et intelligente finement interprétée par India Hair (César du meilleur espoir féminin pour Camille redouble, et qui nous avait ravie en Adélaïde de Savoie dans Jeanne du Barry de Maïwenn).
On pense assister à un conte. Chaque personnage est un monde à lui seul, et le village de Paimpont en est un autre. Il semble fantaisiste (même le spectateur a des idées reçues) alors qu’il existe vraiment, au coeur de la forêt de Brocéliande. La rue principale (rebaptisée dans le film) s’appelle d’ailleurs rue du général de Gaulle en souvenir de la mère du général qui y trouva refuge pendant la seconde guerre mondiale.
Ce village "très français" fait acte de générosité en voulant recueillir une famille ukrainienne mais les réfugiés seront syriens (campés par de formidables acteurs). Moult péripéties s’enchaineront avant qu’ils ne soient acceptés (voire plus). Je ne spolie pas la fin. Vous aurez deviné qu’elle sera heureuse puisque Julie Delpy a choisi l’angle de la comédie pour nous faire réfléchir.
Les répliques fusent sans filtre. Le scénario se déroule comme un opéra en quelques actes. La musique accompagne le déroulement de ce qui aurait pu être tragique. La réalité est légèrement modifiée, qu’il s’agisse du Radeau de la méduse de Géricault pour annoncer chaque changement de « tableau » ou d’extraits qu’on croirait être des images d’archives. On commencera avec l’ouverture de Coriolan de Beethoven dont la puissance héroïque reste intacte. On finira avec la Fantaisie en D mineur de Mozart.
Julie Delpy n’a pas hésité à nous montrer aussi une très belle brume s’élevant au-dessus d'un plan d’eau mais cette fois on ne rit pas et on frissonne en songeant à ce qui pourrait arriver si ce n’était pas une comédie. On voudrait tant, comme son personnage, que le monde soit meilleur.
Qui seront les barbares en fin de compte ? Il y a beaucoup d’humour et de farce mais également de la tendresse et de beaux sentiments dans ce film qui est bien plus profond qu’il n’y parait.
Les barbares, film de Julie Delpy
Avec Julie Delpy, Sandrine Kiberlain, Laurent Lafitte, India Haïr, Ziad Bakri, Jean-Charles Clichet …
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