L'envie me trottait dans la tête depuis plusieurs semaines mais je n'osais pas me lancer toute seule. Alors quand j'ai vu que Pascale Weeks proposait un atelier sur l'art de la fermentation au salon Video City j'ai aussitôt profité de l'occasion.
Elle a fait appel à Luna Kyung qui est une grande spécialiste de la question et qui vient de publier une sorte de bible sur le sujet aux éditions La Plage.
Pascale travaille pour 750 g et est une cuisinière qui aime expérimenter, tester, et partager ses découvertes. Elle a remis au goût du jour la mousse au chocolat à l'eau (oui) pour le magazine et elle a sorti récemment un livre sur les desserts avec beaucoup d'astuces pour ne pas les rater.
Je me suis inscrite en toute confiance ... et je n'ai pas été déçue : j'ai appris beaucoup de choses et suis repartie avec mon bocal de légumes qui n'avaient plus qu'à fermenter gentiment à la maison.
Le mot fermentation est un peu effrayant mais Luna nous a démontré que nous mangeons tous les jours des aliments fermentés : les cornichons, les olives ou la choucroute bien sûr, mais aussi le pain quand il est au levain, les yaourts, les fromages, et même la sauce soja, le café, le chocolat, le thé noir, la pata negra. Ces aliments favorisent les "bonnes" bactéries qui renforcent notre flore intestinale. C'est la base de l'alimentation coréenne.
Vous apprendrez dans le livre beaucoup de choses sur les pratiques culinaires traditionnelles du monde entier. Par exemple que s'il existe plusieurs recettes de Picalilli (qui est une version des achards réunionnais) il y a un légume qu'on retrouve toujours, c'est le chou-fleur. Ce sont les indiens qui ont mis au point l'équilibre des saveurs au XVIII° siècle autour de la moutarde et du curcuma.
C'est à la même époque que le coleslaw (salade de chou en néerlandais) se répand dans le monde anglo-saxon, surtout aux Etats-Unis où il est l'ingrédient incontournable du barbecue. Luna ajoute souvent à ses recettes ce qu'elle désigne par "notes" et qui sont des conseils précieux d'utilisation. Pour le coleslaw, elle indique qu'une vinaigrette à l'huile d'olive peut remplacer la sauce que l'on fait théoriquement avec le jus de fermentation, mayonnaise, sel, poivre, raisins secs et graines de céleri.
Du coup ce livre est classique mais créatif. Les photos de Camille Oger sont très illustratives et les 150 recettes font le tour de la question. Lactofermentation, fermentation alcoolique ou acétique, on trouve tout ... en restant néanmoins dans l'univers végétarien. Plus d'excuse pour ne pas faire soi-même ses cornichons (je les faits déjà) ou sa choucroute. Par contre la fermentation des prunes japonaises m'a semblé plutôt complexe pour le moment.
Pascale avait amené un bocal de navets fermentés, colorés au jus de betterave pour faire goûter les sceptiques. Et nous nous sommes lancés aussitôt dans un grand classique : les achards. Ils doivent être colorés, croquants et épicés. Ils accompagnent à merveille une viande grillée ou peuvent être employés comme condiment dans un sandwich.
Nous avons fait une grande quantité pour que chacun des participants de l'atelier puisse repartir avec un bocal. Je vous donne donc les proportions pour 1 litre : 300 grammes de chou blanc, autant de carottes et autant d'oignons, un piment frais, 1 cuillère à café de curcuma, autant de graines de cumin, et autant de graines de moutarde noire, une demi de graines de fenugrec, 10 grammes de gingembre, deux gousses d'ail, 14 grammes de sel marin (très important, le sel ne doit pas comporter d'additifs), 50 ml d'huile végétale.
On hache ail et gingembre. On retire les graines du piment si on ne souhaite pas trop épicer la préparation. Les légumes sont taillés en julienne.
On écrase dans un mortier le gingembre et l'ail pour en faire une pâte. On écrase aussi ensuite et à part tous les épices.
Dans une poêle chaude on fait rapidement revenir les oignons dans un peu d'huile. On ajoute la pâte puis les épices. On cuit moins d'une minute en remuant.
C'est le tour des haricots verts pour deux minutes. Hors du feu on ajoute carottes et chou et le piment. Et on remue bien le tout. (On pourrait une autre fois ajouter chou-fleur en lamelles, concombre, citron jaune)
Arrive le moment préféré, consistant à remplir les bocaux en tassant bien jusqu'à 1 cm du bord. Nous n'avons pas pu le faire dans notre cuisine improvisée mais la moindre des prudences serait d'ébouillanter les bocaux comme on le fait pour les confitures.
Luna nous a recommandé de laisser le bocal fermé une semaine à température ambiante avant de commencer à en prélever un peu. Ensuite on conserve au réfrigérateur.
Luna nous a donné encore un certain nombre d'indications. Le principe peut varier en faisant ou non précuire les légumes, en mettant plus ou moins de sel ... même si on peut retenir la proportion générale de 30 grammes de sel marin (sans additif) pour 1 litre d'eau.
On peut retrouver ses conseils sur son blog Les deux auteures sont aussi auteures de blogs, respectivement : La table de Diogène est ronde (un blog sur la cuisine et la culture coréenne) où on trouve en ce moment une video expliquant la confection des pickles et Le manger que Camille Oger définit comme un blog d'ethno-gastronomie. J'y ai appris que les fleurs de glycine (attention QUE les pétales) sont parfaitement comestibles, au Japon comme chez nous.
Très honnêtement je me suis régalée, et mes amis aussi qui en ont largement profité. C'est effectivement très intéressant pour relever une viande grillée comme cette succulente noisette d'agneau Quart de coeur Saint-Georges photographiée ci-dessus en accompagnement d'une purée de patates douces dont je donnerai bientôt la recette.
Je me demande si ce n'est pas sur une bonne tranche de pain croustillant que je les préfère, tout "simplement".
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