Il ne faut pas être phobique des ascenseurs pour apprécier ce spectacle... Le cas Sneijder raconte ce qu'est devenu un homme après un terrible accident et l'objet est au centre des préoccupations.
Mais si Didier Long, le directeur de l'Atelier, prend la parole pour rassurer le public c'est à propos des fumées qui déborderont sur la salle et qui sont inoffensives pour la santé.
Paul Sneijder est l'unique survivant d'une chute incroyable qui a couté la vie à sa fille. Il a émergé du coma mais rien dans sa vie ne peut reprendre un cours "normal" et le brouillard n'est pas là par hasard. Il représente la confusion dans laquelle il tente de survivre.
Je devrais être mort depuis le mardi 4 janvier 2011. Et pourtant je suis là, chez moi, dans cette maison qui m’est de plus en plus étrangère, (...) repensant à une infinité de détails, réfléchissant à toutes ces petites choses méticuleusement assemblées par le hasard et qui, ce jour-là, ont concouru à ma survie.
L'homme couvre les murs de son appartement de formules mathématiques et de croquis qui font penser aux illusions anamorphiques de type trompe-l'œil ... Plus tard il s'acoquinera avec un éleveur de chiens de concours obsédés par les nombres palindromes (qui se lisent pareillement de gauche à droite comme de droite à gauche).
Les ascenseurs décident de nos vies. Leurs câbles tirent les ficelles. On le voit boiter. On sent combien il souffre psychiquement de sa position de rescapé. Ses priorités ont évolué. Sa position lui offre l'occasion d’une retraite spirituelle pendant laquelle il va remettre toute son existence en question. Il faut dire qu'il y a de quoi, entre un travail qui ne peut plus lui apporter de satisfaction, une épouse qui le trompe et des fils jumeaux qui n'ont aucune empathie à son égard.
Tout lui devient peu à peu indifférent. L'homme au bord de la folie parle à voix haute (de dos et en voix off) pour évacuer toutes les pensées négatives, parfois très drôles. Pressentant néanmoins le danger supplémentaire de l'inactivité il cherche un (petit) boulot et devient promeneur de chien. On se demandera ultérieurement qui promène qui, de l'homme ou du chien...
Didier Bezace, que l'on a connu dirigeant le théâtre de la Commune d’Aubervilliers, a mis la pièce en scène. Il y donne la réplique à Pierre Arditi, qu'il dirige pour la quatrième fois. Je me souviens en particulier des Fausses confidences de Marivaux.
Didier Bezace interprète l'avocat chargé de convaincre son client de demander réparation. Paul acceptera-t-il de se battre sur ce registre ou préférera-t-il un autre terrain ?
Pierre Arditi est formidable dans ce registre d'homme blessé, mais encore capable d'humour, autant à l'égard de sa femme (qui rapporte systématiquement un poulet rôti après avoir rendu visite à son amant) que de ses garçons, que de son nouvel employeur. On ne l'avait encore jamais vu dans ce registre de drôlerie, à la limite du tragique. On comprend qu'il soit nominé pour le Molière du Comédien dans un spectacle de Théâtre privé (il a déjà reçu le Premier prix Jacques Toja pour le théâtre).
Le décor est bien pensé, signé par un de nos grands décorateurs, Jean Haas, comme ces boites que les magiciens ouvrent et referment sans cesse, faisant à chaque fois apparaitre un objet qu'on croyait perdu.
Le Cas Sneijder
D'après le roman de Jean-Paul DuboisEditions de l'Olivier / Editions Points
Adaptation et mise en scène de Didier Bezace
Avec Pierre Arditi, Didier Bezace, Sylvie Debrun, Morgane Fourcault et Thierry Gibault
Jusqu'au 22 avril 2017
Du mardi au samedi à 21hMatinées le samedi à 18h et le dimanche à 15h.
(Pas de matinée samedi 22 avril)
Le cas Sneijder est un livre de Jean-Paul Dubois, paru à l'Olivier en octobre 2011
Photos Nathalie Hervieux.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire