C'est un des meilleurs spectacles du moment. Jean-François Prévand a écrit les dialogues à partir de textes originaux rendant cette rencontre "fictive" entre Voltaire et Rousseau tout à fait plausible et surtout extrêmement vivante.
Il n'est pas nécessaire de connaitre leurs oeuvre pour apprécier les joutes verbales. elles sont tellement d'actualité avec les débats qui occupent les ondes sur la citoyenneté et l'éducation qu'on a le sentiment que les propos n'ont pas vieilli. Mais de toute évidence, il y a encore plus de plaisir, lorsqu'on a lu par exemple Candide ou L'Emile, à entendre des phrases qui avaient suscité réflexion sur les bancs du lycée ou de l'université.
L'usage de costumes qui ne sont pas très datés rend le face à face encore plus "contemporain". Le démarrage est un peu artificiel. Les comédiens sont campés dans une forme de raideur, sans doute intentionnelle pour signifier la bienséance de l'époque. mais très vite les masques tombent et les caractères se révèlent.
On s'amuse d'apprendre que Voltaire avait une passion pour les fleurs, tout en la trouvant logique puisqu'il employait la métaphore de cultiver son jardin. On sourit d'entendre que Rousseau se moque du quand dira-t-on et que dès lors qu'on aime le théâtre on est capable de tous les forfaits.
Le philosophe a du mal à imposer son point de vue face à un adversaire qui plaisante de tout alors qu'il voudrait le convaincre que Molière n'a rien compris au Misanthrope. C'est que Voltaire est extrêmement irrité : quand je vous lis il me prend des envies furieuses de marcher à 4 pattes. Ses répliques sont d'une ironie grinçante, justifiée de la constatation que l'homme est un loup pour l'homme et que ce n'est pas à votre chien que je vais l'apprendre.
Rousseau se défend avec de mauvais arguments contre son cher "centre du monde". Il a beau réaffirmer que l'intelligence est la mère de tous les vices, la démonstration ne peut pas tenir, qu'il soit ou non intelligent lui-même. Et Voltaire est très drôle dans son imitation satirique, mimant un jean-Jacques appelant ses chers petits lapins et promettant que Papa Emile leur lira la Bible.
C'est que le plus grand reproche qu'on peut lui faire est d'avoir abandonné ses cinq enfants à l'Assistante publique tout en prétendant discourir de l'éducation. Et Voltaire ne s'est pas privé de le critiquer à ce propos. Le "bon" papa a même oublié leur date de naissance et se défend piteusement : je ne voulais pas qu'ils vivent la vie que j'ai vécue. Je ne suis pas vraiment coupable.
Qu'ils abordent le thème religieux et la guerre reprend. J'adore un Dieu créateur et intelligent, ... s'il existe affirme Voltaire en nuançant son propos : on n'aurait jamais eu ni l'Islam ni la Chrétienté qu'est ce qu'on serait tranquille !
La solution est simple pour Rousseau : il faut changer de gouvernement pour trouver le chemin du bonheur. Vous imaginez les rires dans la salle !
Voltaire est au bord de l'exaspération : L'homme ne serait que le produit de la société ? Cela signifierait alors qu'il n'a pas été créé à l'image de Dieu ...
Il est au bord de l'implosion : Diderot est en prison, D'Alembert n'ose plus écrire, je suis exilé (...) Je suis pour la tolérance et contre la censure mais on me fait taire. Vous êtes venu pour vous disculper (d'avoir abandonné ses enfants). Quel que soit l'art d'être coupable ou innocent nous sommes res-pon-sa-bles (de nos actes).
Le combat de coqs se poursuit en insultes. Il manque un arbitre à ce débat d'idées mais le public saura se forger son opinion. Deux siècles plus tard les sujets sont aussi brûlants, les questions toujours aussi pertinentes. Pourrons-nous transmettre l'équivalent à nos descendants avec les querelles qui nous agitent en ce moment ?
L'affrontement de deux courants de pensée concomitants, mais opposés, par deux comédiens exceptionnels est un grand moment de théâtre. On peut se réjouir que le Poche Montparnasse ait repris cette pièce, créé il y a trois ans dans ce même lieu. La performance des comédiens (dont la biographie est trop longue pour être résumée) est d'autant plus remarquable qu'ils doivent quitter le théâtre très vite pour enfiler un autre costume quelques rues plus loin au Rive Gauche où Jean-Paul Farré interprète le mage Radjapour et où il retrouve Jean-Jacques Moreau qui est le président Delbec. Il faut retenir la conclusion, prononcée par Voltaire : le remède à la rage du fanatisme, c'est la culture.
Il n'est pas nécessaire de connaitre leurs oeuvre pour apprécier les joutes verbales. elles sont tellement d'actualité avec les débats qui occupent les ondes sur la citoyenneté et l'éducation qu'on a le sentiment que les propos n'ont pas vieilli. Mais de toute évidence, il y a encore plus de plaisir, lorsqu'on a lu par exemple Candide ou L'Emile, à entendre des phrases qui avaient suscité réflexion sur les bancs du lycée ou de l'université.
L'usage de costumes qui ne sont pas très datés rend le face à face encore plus "contemporain". Le démarrage est un peu artificiel. Les comédiens sont campés dans une forme de raideur, sans doute intentionnelle pour signifier la bienséance de l'époque. mais très vite les masques tombent et les caractères se révèlent.
On s'amuse d'apprendre que Voltaire avait une passion pour les fleurs, tout en la trouvant logique puisqu'il employait la métaphore de cultiver son jardin. On sourit d'entendre que Rousseau se moque du quand dira-t-on et que dès lors qu'on aime le théâtre on est capable de tous les forfaits.
Le philosophe a du mal à imposer son point de vue face à un adversaire qui plaisante de tout alors qu'il voudrait le convaincre que Molière n'a rien compris au Misanthrope. C'est que Voltaire est extrêmement irrité : quand je vous lis il me prend des envies furieuses de marcher à 4 pattes. Ses répliques sont d'une ironie grinçante, justifiée de la constatation que l'homme est un loup pour l'homme et que ce n'est pas à votre chien que je vais l'apprendre.
Rousseau se défend avec de mauvais arguments contre son cher "centre du monde". Il a beau réaffirmer que l'intelligence est la mère de tous les vices, la démonstration ne peut pas tenir, qu'il soit ou non intelligent lui-même. Et Voltaire est très drôle dans son imitation satirique, mimant un jean-Jacques appelant ses chers petits lapins et promettant que Papa Emile leur lira la Bible.
C'est que le plus grand reproche qu'on peut lui faire est d'avoir abandonné ses cinq enfants à l'Assistante publique tout en prétendant discourir de l'éducation. Et Voltaire ne s'est pas privé de le critiquer à ce propos. Le "bon" papa a même oublié leur date de naissance et se défend piteusement : je ne voulais pas qu'ils vivent la vie que j'ai vécue. Je ne suis pas vraiment coupable.
Qu'ils abordent le thème religieux et la guerre reprend. J'adore un Dieu créateur et intelligent, ... s'il existe affirme Voltaire en nuançant son propos : on n'aurait jamais eu ni l'Islam ni la Chrétienté qu'est ce qu'on serait tranquille !
La solution est simple pour Rousseau : il faut changer de gouvernement pour trouver le chemin du bonheur. Vous imaginez les rires dans la salle !
Voltaire est au bord de l'exaspération : L'homme ne serait que le produit de la société ? Cela signifierait alors qu'il n'a pas été créé à l'image de Dieu ...
Il est au bord de l'implosion : Diderot est en prison, D'Alembert n'ose plus écrire, je suis exilé (...) Je suis pour la tolérance et contre la censure mais on me fait taire. Vous êtes venu pour vous disculper (d'avoir abandonné ses enfants). Quel que soit l'art d'être coupable ou innocent nous sommes res-pon-sa-bles (de nos actes).
Le combat de coqs se poursuit en insultes. Il manque un arbitre à ce débat d'idées mais le public saura se forger son opinion. Deux siècles plus tard les sujets sont aussi brûlants, les questions toujours aussi pertinentes. Pourrons-nous transmettre l'équivalent à nos descendants avec les querelles qui nous agitent en ce moment ?
L'affrontement de deux courants de pensée concomitants, mais opposés, par deux comédiens exceptionnels est un grand moment de théâtre. On peut se réjouir que le Poche Montparnasse ait repris cette pièce, créé il y a trois ans dans ce même lieu. La performance des comédiens (dont la biographie est trop longue pour être résumée) est d'autant plus remarquable qu'ils doivent quitter le théâtre très vite pour enfiler un autre costume quelques rues plus loin au Rive Gauche où Jean-Paul Farré interprète le mage Radjapour et où il retrouve Jean-Jacques Moreau qui est le président Delbec. Il faut retenir la conclusion, prononcée par Voltaire : le remède à la rage du fanatisme, c'est la culture.
VOLTAIRE ROUSSEAU
De Jean-François Prévand
Mise en scène Jean-Luc Moreau et Jean-François Prévand
Avec Jean-Paul Farré (Voltaire) Jean-Luc ou Jean-Jacques Moreau (Rousseau)
Décor Charlie Mangel
Lumières Jacques Rouveyrollis
Costumes Mathilde Penin
75 boulevard du Montparnasse, 75006 Paris 01 45 44 50 21
À partir du 21 mars et jusqu'au 1er juillet 2017
Du mardi au samedi à 19h
Relâches exceptionnelles les 17-18-19-20 et 23 mai
Photos Brigitte Enguerrand
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