La journée a démarré très tôt et a failli être chaotique car le train est arrivé en retard en gare d’Avignon TGV, ce qui a compliqué les correspondances pour certains voyageurs. Au moins il n’était pas en grève et j’ai été surprise des efforts du chef de cabine pour trouver une solution pour tous les passagers en difficulté ! Je suis loin de me douter que le retour sur Paris, quinze jours plus tard sera encore plus complexe, avec un départ différé d’une heure et demie et une arrivée encore plus décalée.
Pas davantage que j’imagine la quantité d’oublis de réservation, consécutifs à des erreurs de transmission de dates, soit disant par suite de dysfonctionnements informatiques auquel je serai confrontée pendant tout le festival. Je crois plutôt qu’à force d’avoir fonctionné en distanciel les bons réflexes du travail en présentiel ont été perdus. Rien ne vaut papier-crayon-gomme pour faire un planning, dresser une liste et ne rien oublier. Aucun clic maladroit ne peut alors rien effacer !
Il y eut aussi un couac pour une générale parce qu’on ne voulait pas de public (alors que ce spectacle avait déjà été créé à Paris) … Je suis bien entendu gentiment invitée à le voir un autre jour mais n’ayant plus aucune disponibilité à cette heure là dans mon planning ce sera impossible. Dommage pour les artistes !
Avignon, ce sont des images, même si aujourd’hui et jusqu’à 22 heures, la ville n’est pas encore noyée sous les affiches. La rue des Fourbisseurs a laissé tomber les parapluies et s’est couverte de chapeaux, comme si on avait déjà deviné que la canicule allait plomber la ville.
Ce sont aussi des cris d’animaux. Les sifflements des martinets tard le soir et tôt le matin. Toute la journée résonnent les cigales dont j’avais oublié le chant.
La ville est réputée pour ses glaces. Chacun sa préférence. Je m’étais promis de vérifier mon classement mais je n’ai pas dégagé suffisamment de temps pour me régaler chez chacun des 3-4 glaciers avignonnais qui foisonnent encore eux-mêmes ce qu’ils vendent. Je réussirai malgré tout à en visiter deux. J’ai peu de regret parce que mon palais n’a pas encore retrouvé le goût dont m’a privé un Covid assez sévère deux mois avant mon départ.
On se sentirait presque en vacances en cette première journée si on ne devait pas autant marcher d’un lieu à l’autre. Chaque jour, un festivalier actif ne fait pas moins de 10 km, même en ayant un programme tenant compte de la situation géographiques des théâtres où il se rend. La seule parade est de disposer d’un vélo.
Les conditions de circulation faites à la bicyclette en Avignon sont à saluer. Mais quelle galère, et le mot n’est pas trop fort, pour trouver un poteau libre pour l’accrocher car la moindre barre est utilisée par les poseurs d’affiches. Il est plus qu’indispensable de songer à fixer des barres où cadenasser nos vélos en sécurité pas trop loin de chaque théâtre sans devoir marcher désespérément dans les rues voisines alors qu’on a si peu de temps libre entre deux spectacles. A croire que personne n’utilise de bicyclette dans l’équipe municipale ! Et que penser des arêtes coupantes de ce bac métallique qui dépasse du sol en face du 80 rue du portail Magnamen ? C’est tout simplement criminel surtout la nuit.
Il y aura des jours où sillonner Avignon à vélo dans la foule, m’évoquera la situation d’un de ces pantins secoués par la main d’un joueur sur un plateau de baby-foot géant. Et en cas de souci technique je recommande la gentillesse et la compétence de Vélo Cité place Pasteur qui m'a donné de l'air … parce que, franchement, les équipements des loueurs de la ville ne sont pas entretenus ! Les câbles sont rompus.
Et puisqu’on en est aux critiques je vous donne le conseil qui sauvera peut-être votre séjour : prenez une « petite » laine ou un châle pour supporter le souffle glacial des climatiseurs de nombreux théâtres. Je veux bien croire que l’écoresponsabilité soit un des 5 piliers du projet de la nouvelle équipe du festival Off mais il va falloir prendre des mesures adéquates, pour la santé des spectateurs et celle de la planète.
Et la basse température de certaines salles n’est pas la seule aberration. Pensons à la pléthore d’affiches qui, n’en déplaise à la maire de la ville, ne participe pas du tout au folklore local mais défigure totalement les façades de bâtiments historiques. Elles vont battre au vent et que celui/celle qui ne s’en est pas pris une sur le coin du visage un jour de mistral lève le doigt ! Chaque matin des dizaines giseront sur un sol devenu glissant, et donc dangereux. Pratique coûteuse et absurde qu’il faudrait supprimer, carrément. Le In n’en placarde aucune, le If pas davantage. Et pourtant leurs séances seront noires de monde.
On peut rêver … D’autant que les responsables ont pourtant pleine conscience du phénomène. A l’occasion de la première conférence de presse au village du Off, le co-président de AF&C, Laurent Domingos, comédien, metteur en scène, directeur artistique de la Compagnie Minuit 44 et président des Sentinelles (à gauche sur al photo ci-dessus), rappellera une réflexion encore juste aujourd’hui, mais qu’il voudrait rendre caduque : au fond, lui disait un avignonnais, vous les festivals vous êtes un peu un Paris-Dakar. Vous débarquez, vous faites votre truc et vous repartez en laissant par terre vos affiches.
Le Festival d’Avignon (dit le In) est à pied d’œuvre, toujours au cloitre Saint Louis, mais dans une autre salle que les années passées. Les demandes d’invitation qui avaient été acceptées sont confirmées, mais à d’autres dates, ce qui va m’obliger à modifier un planning calculé au quart d’heure près. Ce ne sera pas le seul changement à gérer. Déception de constater qu’il ne sera pas possible de voir Anima de Maëlle Poésy, parce que la jauge est trop faible, ni Gretel et Hansel de Igor Mendjisky (à droite sur la photo ci-dessous) parce que le spectacle a été très sollicité. Je les verrai donc à l’Azimut (92) en cours de saison.
Par contre le service de presse du Festival Off n’est pas encore installé dans ses nouveaux locaux du 6 rue Pourquery Boisserin (ouvert de 9h30 à 13h et de 14h à 19h30), juste en face de la resplendissante nouvelle Scala.
Plusieurs directeurs ont organisé une conférence de presse de lancement. A la Factory, dans la grande salle du Théâtre de l’Oulle, les choix que j’avais faits début juin se confirment. Mais, comme prévu, le regret de ne pouvoir caser plusieurs spectacles se confirme aussi. En tout cas la programmation de Laurent Rochut est pertinente, audacieuse et prometteuse. A suivre donc. Le premier sur mon planning sera Almataha dont la magie, j’en suis certaine, m’enchantera. A signaler que je reviendrai ultérieurement (à la fin de mon séjour) sur les choix de ce directeur et sur ses projets.
On apprendra bientôt, au cours d'une conférence de presse, avec le second co-président, Harold David, directeur de 3 théâtres (à droite sur la photo ci-dessus), l’intention de démontrer que la culture est un moyen de vivre ensemble. Le dispositif mis en place avec Culture de coeur a été revu avec l’aide du mécénat pour financer 3000 places offertes à des personnes qui n’ont pas les moyens de les payer en accompagnant leur venue au théâtre par une médiation culturelle. Je leur suggère d’aller plus loin (sans dépenser plus) par exemple en ouvrant les générales à ce public.
Ils accorderont aux théâtres respectueux des bonnes pratiques un label qui je l’espère intégrera de vraies promesses en matière d’écoresponsabilité (notamment la température des salles).
La ministre de la culture viendra 3 jours et si je la verrai à Bérénice dans le In, sachez qu’elle assistera aussi à un spectacle au 11 Gilgamesh. Et surtout elle discutera « horizontalement » des orientations du projet. Puis-je prendre le pari d’un spectacle In dans une salle du off l’an prochain, pour témoigner de l’ouverture d’une porte dans ce mur d’Avignon, pour ne pas dire Berlin ?
On saura, après une semaine de festival, que presque autant de cartes auront été vendues qu’en 2019 qui était jusqu’ici l’année de la plus forte fréquentation. L’appétit de revenir au spectacle vivant serait une bonne nouvelle.
Les étudiantes de l’école des Beaux-Arts (ci-dessus) l’avaient pressenti en imaginant une affiche à partir de l’idée de la maquette d’une ville où les rues se métamorphosent en une nuit. Parmi les axes d’évolution il y aura aussi l’amélioration de l’accompagnement des compagnies étrangères. De beaux sujets de reportage.
Plusieurs rencontres ponctueront le festival. Ne pouvant être au four et au moulin je n’en suivrai beaucoup. Je me limiterai (lundi 18 juillet) à une discussion sur la diversité des écritures sur les scènes d’humour francophones, au Cloître Saint-Louis, à l’initiative de La Scène Indépendante Avignon, anciennement SNES. Elle rassemblait Réda Seddiki, Julien Bing et Les Apollons, Caroline Vigneaux, Gérard Sibelle (première photo) et Bruno Landrieu, Pierre Michelin, Naima Bourgaut (seconde photo).
J’ai comprendrai la différence entre Stand-up et One Human Show (je change le nom du concept intentionnellement pour satisfaire Caroline Vigneaux pour qui j’ai une énorme admiration). Echanges très intéressants dont je reparlerai ultérieurement. il y a une telle diversité dans les formes et les approches que l’humour, comme « le » champagne, mérite le pluriel. Il faut régulièrement décoller les étiquettes qui estampillent nos artistes. J’aurais voulu ne pas partir avant la fin mais un spectacle m’attendait.
Et comme je vous dis tout, vous saurez que j’ai passé la fin de la soirée du mercredi 13 dans un jardin (qui cette fois n’est pas un lieu du If) à discuter avec comédiens, metteurs en scène et auteurs sous l’égide de plusieurs organismes importants pour le monde du théâtre comme le Syndicat national des metteurs en scène, et les Écrivaines et Écrivains Associés du Théâtre-EAT.
Sans polémiquer sur la place des femmes dans l’un et l’autre j’ai remarqué qu’elles étaient nombreuses sur Avignon. Je repense malgré tout à la parole de Pauline Bureau à la dernière soirée des Molières alertant la ministre de la culture sur la répartition des subventions. Il y a une marge de progrès en perspective.
Le temps fort de cette journée du 5 juillet fut le vernissage de deux exposition à la Maison Jean Vilar à propos desquelles vous trouverez toutes les informations sur maisonjeanvilar.org :
- Infiniment, Maria Casarès, Gérard Philipe - une évocation,- et Ce soir, oui tous les soirs, Jean Vilar, Notes de service, TNP 1951 - 1963
Une troisième exposition commencera dans 48 heures, autour du travail de Christophe Raynaud de Lage, photographe du festival depuis 17 ans. Émotion garantie pour moi qui vais revoir tant d’artistes que j’ai connus et avec qui j’ai pour certains travaillé.
Elles méritent toutes une publication spécifique, que vous pouvez lire ici. Et si vous ne l’aviez pas vue l’an dernier, ne manquez pas non plus Côté jardin en plein air dans le jardin des Doms de photos des trois compères Vilar-Casarès et Philipe. Elle se poursuit jusqu’à l’automne et c’est entrée libre. Voici ce que j’en écrivais en juillet 2021 : https://abrideabattue.blogspot.com/.../une-exposition...
D'autres travaux artistiques, plus secrets, méritent d'être découvertes comme les maquettes exceptionnelles de réalisme de Paul Silve et de Dominique Lafont au Théâtre Notre-Dame où ils ont installé leur Musée Rigolo d'Art Contemporain.
Pour le moment la ville est encore presque déserte mais l'affluence viendra bientôt.
Et surtout on peut l'admirer sans la pollution visuelle qui viendra bientôt la défigurer. Sans non plus les fanfaronnades parfois abrutissantes et les supplications à aller voir tel ou tel spectacle (même si j'en comprends parfaitement la nécessité). A ce propos je signale la discrète incitation pour les Mots bleus, dont la suggestion m'aurait décidée si j'avais eu un créneau dans mon agenda.
Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If, ainsi que des rencontres.
Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.
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